Serge Dumont
Ameer Makhoul et Omar Sayid sont soupçonnés par Israël d’espionner au profit du Hezbollah. La minorité arabe dénonce une « campagne discriminatoire » [1]
Pourquoi le leader arabe israélien Ameer Makhoul ainsi que le militant nationaliste arabe Omar Sayid ont-ils été arrêtés ? Ces derniers jours, il était inutile de poser la question aux responsables de l’Etat hébreu car toute allusion à cette mystérieuse affaire était interdite par la censure. Jusqu’à lundi, les journalistes israéliens ne pouvaient pas l’évoquer publiquement et ceux qui s’y risquaient se contentaient d’allusions alambiquées qui n’apprenaient pas grand-chose.
Ce que la justice israélienne et le Shabak (la Sûreté générale) ont voulu cacher à l’opinion publique de leur pays est pourtant simple : jeudi dernier, une vingtaine de policiers, dont 16 agents du Shabak, ont perquisitionné aux domiciles d’Ameer Makhoul avant de l’interpeller sous les yeux de ses proches. Une semaine auparavant, Omar Sayid avait également été arrêté alors qu’il tentait se rendre en Jordanie avec sa famille.
Les appartements ont été entièrement retournés et de nombreux documents emportés. Parmi ceux-ci, une partie des archives d’Itijah, une importante et influente ONG arabe israélienne dont Ameer Makhoul est le responsable. Chez Omar Sayid, ce sont des papiers relatifs au parti Balad qui ont été saisis. Cette formation politique n’avait pu se présenter aux dernières élections législatives parce que son leader de l’époque avait été accusé d’espionner au profit du Hezbollah.
Ameer Makhoul et Omar Sayid sont également soupçonnés d’avoir entretenu des contacts avec l’organisation chiite libanaise. Ce qui explique pourquoi leur mandat d’arrêt est régulièrement prolongé au cours d’une procédure à huis clos et pourquoi ils sont gardés au secret.
« Campagne discriminatoire »
Avant même d’être confirmée par la justice sous la pression des médias israéliens, l’arrestation des deux militants s’était répandue comme une traînée de poudre au sein de la communauté arabe israélienne (20% de la population de l’Etat hébreu). Car au-delà de son influence locale, le dirigeant d’Itijah est un écrivain réputé et un membre du Comité de suivi, une structure qui représente les Arabes israéliens face aux autorités de l’Etat hébreu. Voilà pourquoi la quinzaine de journaux et périodiques arabes d’Israël, mais également les représentant de cette communauté à la Knesset, les ONG ainsi que les élus locaux, se sont mobilisés pour sa libération ainsi que pour celle d’Omar Sayid.
A l’appel de l’ensemble des organisations arabes israéliennes, plusieurs milliers de membres de cette communauté ont manifesté lundi à Haïfa [2]pour dénoncer la « campagne discriminatoire » qui les viserait. « Il ne se passe pas un mois sans que l’on accuse les Arabes israéliens de faire partie d’une cinquième colonne étrangère et de se livrer à l’espionnage, affirme l’ex-député Issam Makhoul, le frère du principal suspect. Vous verrez que cette affaire se dégonflera dans quelques semaines comme ce fut le cas avec la plupart des précédentes dans lesquelles des Arabes israéliens étaient impliqués. Mais en attendant, les responsables de ce pays et surtout le Shabak auront exacerbé la méfiance et le sentiment de racisme anti-arabe régnant dans ce pays depuis sa création. »
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titre modifié et ajout de notes : C. Léostic, Afps