23/11/2010
Comment détruire les murs  qui pénètrent les terres des  agriculteurs, qui défigurent les paysages  palestiniens et qui  paralysent l’économie ? Une réalité qui fait écho à  l’apartheid en  Afrique du Sud mais qui n’émeut pas pour autant la Communauté  internationale. Contrairement aux jeunes de l’association Génération  Palestine  qui se sont rendus cet été en Cisjordanie pour en savoir  davantage sur  ce conflit qui s’éternise malgré les injustices flagrantes  dont est  victime au quotidien le peuple palestinien. Vendredi soir  à  l’Espace Accueil aux Etrangers, Mina et Méline ont fait le récit  de  leur voyage, choquées de voir « qu’on ne tolère pas les palestiniens   chez eux ». Autant de brutalités que les citoyens épris de justice,  ont  choisi de contrer pacifiquement via des comités populaires de  résistance  contre le mur et la colonisation. Des comités de résistance que  souhaite privilégier Fayez Al Tanib, agriculteur palestinien dont la terre à Tulkarem est coupée en deux par « le mur de la honte » qui  s’étend sur 730 km en Cisjordanie, du nord à Salem, au sud, au-delà  d’Hébron. L’association Génération Palestine- Marseille, l’invitait pour  témoigner des réalités occultées par les médias et de son engagement  pour la résistance pacifique.
« Se faire sa propre opinion et dépasser les clichés médiatiques »   sur le conflit israélo-palestinien, tels étaient les buts de ce voyage   initié en juillet dernier par l’association Génération  Palestine-Marseille.  Un voyage qui a éveillé la curiosité et susciter la  consternation des  jeunes qui se sont rendus cet été à Jérusalem,  Bethléem, ou encore  Hébron, une ville qui a particulièrement marqué  Mina. Cette dernière  s’est dite « écœurée » par le traitement  discriminatoire à l’égard des  palestiniens. « C’est assez dangereux de vivre à Hébron quand on est palestinien » confie-t-elle.
« Hébron : paroxysme de l’aberration de la colonisation israélienne » 
« Cette ville  cisjordanienne  emblématique de la colonisation israélienne, abrite 200  000  palestiniens et 800 colons idéologiques qui revendiquent la judéité  de  la ville ». Autant dire que les pressions sont fortes et l’atmosphère qui y règne, étouffante. « La forte présence militaire est insupportable » souligne-t-elle, photos à l’appui. « Les   militaires sont armés jusqu’aux dents. Ils contrôlent la circulation   via les checks-point. Il y a même des postes de contrôle sur les toits   des maisons palestiniennes » ajoute-t-elle. L’objectif n’est autre   que de pousser les palestiniens à quitter les lieux. Un plan qui porte   déjà ses fruits. Puisqu’à Hébron, des rues entières ont été désertées,   abandonnées par les Palestiniens dont les commerces ont été scellés par   les colons. C’est selon elle, une façon sournoise de déposséder les   palestiniens de leurs terres et de s’approprier petit à petit la ville   et ce, « sous le regard bienveillant et complice de la communauté internationale » fait-on remarquer dans la salle.
« Ils ne tolèrent pas les Palestiniens chez eux. C’est fou ! »
Au « climat d’agressivité et de racisme » s’ajoute les multiples discriminations. « Seuls   les colons ont la possibilité d’être véhiculés et d’emprunter les  voies  qui leurs sont réservées et qui mènent vers la vieille ville.  Tout est  fait pour le bien être des colons » qui n’hésitent pas à  jeter des  projectiles et des blocs de pierre sur les palestiniens  contraints de  poser des grillages pour se protéger. « Je suis écœurée. On ne tolère pas les Palestiniens chez eux. C’est fou ! » s’insurge-t-elle.
« Au pied de ces murs, on se sent dominés, humiliés, enfermés »
Cette politique d’apartheid se  matérialise également par les murs  qui pullulent dans les territoires  occupés et pour la plupart, érigés  sur des terrains agricoles, dans une  volonté délibérée de paralyser l’économie palestinienne. En effet, ces  murs  de 9 mètres de haut et parcourant des centaines de kilomètres,   contraignent à la fois les paysans palestiniens dans l’exploitation de   leur terre et le déplacement des populations dont une partie a perdu son   emploi.
Check-point où sont contrôlés les palestiniens souhaitant passer de l’autre côté pour aller travailler
Ce sont autant de constructions sauvages et illégales au regard du droit international et dont le but est d’ « englober toutes les colonies de peuplement situées à l’Est de Jérusalem ainsi que les puits d’eau »  explique Méline s’étant rendue à Tulkarem en juillet dernier.  « D’autres pays se seraient vus contraints de respecter le droit   international en quelques heures. 60 années se sont écoulées et Israël   bénéficie toujours d’une impunité scandaleuse » fait remarquer, Fayez  Al  Tanib agriculteur de Tulkarem, spolié d’une partie de ses terres   pénétrées en 2002 par le tracé du mur de séparation. Depuis, il subit la   pression quotidienne des israéliens pour le faire partir.
Il lutte également contre les ravages  causés par une usine  de pesticides qui rejette des eaux toxiques et qui  inonde et pollue  ses champs, l’empêchant ainsi de produire ses produits  bio. C’est une usine  chimique transférée à Tulkarem sur décision de la  justice israélienne  car interdite en Israël, sans doute pour son haut  degré de toxicité.  Des réalités dont a été témoin Méline. « Le mur  coupe  la ville en deux et serpentent entre les maisons. Pour permettre  sa  construction de nombreuses maisons été détruites. Les Palestiniens  ont  eu juste le droit de dégager les lieux avant l’arrivée des bulldozers »  tient-elle à souligner. Et de poursuivre : « au pied de ces murs, on se  sent dominés, humiliés, enfermés. »
Face à toutes ces brutalités, on  pourrait  s’attendre à ce que les palestiniens répliquent avec violence.  Il n’en  est rien. Depuis quelques années, les palestiniens lésés par les   colons, optent pour la résistance pacifique,  une résistance « issue de  la culture palestinienne et qui préserve  l’humain » souligne Fayez Al  Tanib, aussi secrétaire Général du Comité  de coordination de la  résistance populaire contre le mur et la colonisation en Palestine. En  effet, face à ces spoliations, un comité populaire de résistance a été  crée dés 2003 pour permettre la mise en place de manifestations  pacifiques dans les villes pénétrées par le mur et enseigner à ces  habitants les méthodes de résistance.
En 2005, le premier congrès du comité de  résistance qui a eu lieu à Bil’in, a défini la résistance pacifique  comme étant le meilleur moyen de mettre fin à la construction de ces  murs.  Bil’in, petite ville de Cisjordanie située à 12 km à l’ouest de   Ramallah, est devenue le symbole de la contestation palestinienne contre   le mur. En effet, les habitants ont obtenu gain de cause en 2007. En  effet la Cour  Suprême israélienne avait pris la décision de repousser le  tracé du  mur qui privait les villageois de 60% de leur terre. Une terre  qui fût  confisquée pour bâtir la barrière protégeant l’implantation  juive de Modiin Ilit.
« Plus on va vers la paix, plus Israël est violent »
Malgré  le caractère pacifique de ces manifestations hebdomadaires, « les soldats n’hésitent pas à tirer sur la foule ». Mais « la présence d’internationaux dissuade l’appareil répressif israélien » précise le secrétaire Général du Comité de coordination de la résistance populaire contre le mur. Malgré cette violence, « palestiniens et internationaux marchent côte à côte contre le béton du racisme et de la haine » insiste Méline affirmant avoir appris à « vivre  le mur à la mode palestinienne. J’ai appris  la puissance de l’unité et  de la fraternité face au racisme et à la ségrégation » conclut-elle son intervention.
Ce travail de résistance n’est pas  facile  avoue Fayez Al Tanib. La pression des colons étant trop forte et  les  négociations israélo-palestiniennes inacceptables dés lors que le  gel  de la colonisation est temporaire. « On ne peut pas accepter l’arrêt   temporaire de la colonisation. Quand il y a un espoir de négociation,   Israël fait tout pour les faire capoter ; en faisant notamment augmenter   le nombre de chantiers de construction » a-t-il insisté. Et de   poursuivre : « On a beaucoup donné dans le sens de la paix. Mais plus on   va vers la paix, plus Israël est violent. Or, notre seul choix c’est  la  résistance pacifique. »
La mobilisation prend diverses formes.  Par  exemple, depuis plusieurs années, Fayez Al Tanib accueille chez lui   chaque été, de nombreux internationaux, dans le cadre des campagnes et   missions civiles auprès des Palestiniens. A son tour, il se déplace en   Europe pour témoigner et tenter de capter l’attention des médias et   qu’Israël sait utiliser « pour nuire à l’image des palestiniens ».
Ce dernier s’est également dit touché  par  l’absence de réaction de la communauté internationale et notamment  de  la France pendant les bombardements dans la bande de Gaza. « J’étais  en France pendant l’opération Plomb durci. Bernard Kouchner, alors  ministre des affaires étrangères souhaitait favoriser les accords entre  Israël et l’Union Européenne. Nicolas Sarkozy avait, quant à lui, reçu à  l’Elysée la ministre israélienne des Affaires étrangères israélienne,  Tzipi Livni ». « Ce dont a besoin le peuple palestinien, c’est un soutien des politiques pour qu’ils fassent pression sur Israël »   poursuit-il. Pour Pierre Stambul, membre du bureau national de l’Union   Juive Française pour la Paix (UJFP), la communauté internationale  n’est  pas fiable. Selon lui, « Israël est l’Etat rêvé des pays occidentaux. Des pays qui n’ont cessé de trahir les palestiniens ».
« Le boycott : un outil important pour nous »
Face à tant de mépris et pour pallier  aux  injustices qui se succèdent, la société civile palestinienne a lancé  en  2005 une vaste campagne de boycott des produits israéliens issus des   colonies. La campagne « Boycott, Désinvestissement, Sanction » prend   chaque jour de l’ampleur mais provoque aussi la colère de certaines   personnalités politiques, au grand regret de Fayez Al Tanib. « J’ai  écris une lettre à Martine Aubry dans laquelle je lui ai rappelé que la  France avait pris une position respectable en appelant au boycott de  l’apartheid en Afrique du sud. Et que si elle refusait aujourd’hui cette  campagne BDS c’est qu’elle refusait l’égalité entre les peuples ».
Au souvenir de ce qu’ils ont vécu en  Palestine, les jeunes de Génération Palestine  appellent à soutenir la  Campagne BDS. De nouvelles actions devraient  être entreprises à  Marseille dans les prochaines semaines.
Source : Med In Marseille 
 















 
 


