La très grande ouverture d’Israël en direction des marchés  extérieurs a rendu ce pays particulièrement vulnérable aux pressions  économiques provenant de l’extérieur...
La pauvreté touche le quart des Israéliens et tout particulièrement la  population palestinienne qui subit de plus une discrimination raciale,  une absence d’investissement criante, délibérée, d’infrastructures  publiques.         
                    
 Israël a investi dans les colonies  installées, toutes illégalement,
dans les territoires palestiniens  occupés en 1967.
Ici, Ma’ale Adumim, à l’est de Jérusalem,  Cisjordanie occupée.
 
Il y a plus de 60 ans Israël se donnait l’image d’un pays pionnier,  d’agriculteurs organisés dans des kibboutz, structures collectivistes  modèles du sionisme « socialiste » des Ben Gourion et travaillistes de  l’époque. Les tomates poussaient dans le désert et les agrumes de Jaffa  inondaient les marchés. Des photos de cette « épopée » empruntaient à  l’imagerie du réalisme socialiste. Bien entendu, nul Palestinien ne  venait troubler le paysage. Un peuple sans terre pour une terre sans  peuple ... entouré par une marée hostile. David contre Goliath ...  Depuis les choses ont bien changé. Les masques sont tombés.
 
Si l’image politique d’Israël a changé, il n’en va pas  toujours de même de la représentation que l’on se fait de son économie.  La production d’agrumes avec l’orange « Jaffa » qui en était autrefois  le symbole, est en net recul, leur commercialisation passant entre 1990  et 2002 de 1,46 à 0,4 million de tonnes. En 2008 le poids de  l’agriculture dans l’économie est faible : 2,6% du PIB ; 2,5%.des  exportations nettes (1,3 Mds$) et 4,1% si on intègre les industries  agroalimentaires. La proportion d’agriculteurs est tombée à 3,5 % contre  un tiers de la population active en 1948.
 
De l’industrie traditionnelle à la  haute technologie
 
Confrontée à une absence de ressources naturelles et de  matières premières - hormis les minéraux de la Mer Morte et du Néguev -  l’industrie israélienne s’articulait essentiellement sur l’agriculture  (agroalimentaire, engrais, pesticides, textile, outillages et  équipements ...) et sur le développement d’infrastructures. Avec de plus  un savoir-faire pour le travail du diamant, taille et polissage.
 
La nécessité d’assurer l’intégration immédiate - et donc  l’emploi - à des contingents d’immigrés juifs en provenance des pays  arabes, souvent peu qualifiés dans le domaine industriel, confortait le  développement d’industries traditionnelles.
 
Les choses commencèrent à changer à la fin des années 60  après la guerre des Six Jours qui aboutit à l’occupation de Gaza et de  la Cisjordanie, Jérusalem-Est incluse, offrant à l’économie israélienne  une main d’œuvre à bon marché, un marché captif, des terres et de l’eau.  Dès 1968 fut créée la première colonie israélienne dans la vallée du  Jourdain, Argaman, affirmant une volonté expansionniste.
 
Il fallait développer les exportations qui ne couvraient  qu’à moitié les importations ce qui inévitablement gonflait la dette  extérieure. L’élément le plus important sinon décisif dans  l’accélération de cette évolution, et plus tard dans son orientation  vers les industries à haute valeur ajoutée, fut la décision politique de  développer une industrie d’armement, en réponse à l’embargo décrété par  le Général de Gaulle après la Guerre des Six Jours en 1967. Avec  l’option stratégique, vitale aux yeux des dirigeants israéliens, de  conquérir le plus haut degré d’indépendance dans ce domaine. Ce qui  fournit à l’industrie surtout à partir des années 90 la base du  développement d’une industrie hi-tech.
 
Les choses se sont faites progressivement. Dans un  premier temps les sites de maintenance de l’aviation commencèrent à  développer des appareils (Kfir) copiés sur le Mirage ou plus exactement  visant à « améliorer » les Mirages dont disposait Israël. Le  remplacement de la France par les Etats-Unis comme fournisseur s’est  accompagné d’accords de partenariats avec les industriels de la défense  de ce pays. Fort de ces relations et du savoir-faire industriel acquis,  les autorités israéliennes par l’IAI (Israeli Aerospace Industries,  compagnie gouvernementale) poursuivirent l’ambition d’un avion  entièrement israélien (le Lavi) avec son propre système d’armement,  d’électronique etc. Ce vieux rêve n’aboutit pas du fait de l’exiguïté du  marché israélien et du coût de l’opération 
(1). L’industrie aéronautique états-unienne  n’allait pas non plus aider à transformer un important client en  concurrent. L’aventure, très coûteuse, s’arrêtât au milieu des années  80. Elle eut tout de même des retombées technologiques importantes. Des  techniciens et ingénieurs retournés sur le marché du travail  s’orientèrent par la force des choses hors de la sphère exclusivement  militaire.
 
L’arrivée massive dans les années 90 de plus d’un  million d’immigrés de l’ex-URSS, souvent hautement qualifiés en  physique, électronique, informatique, mathématiques fournit les  ressources humaines pour booster le développement dans les nouvelles  technologies. Israël est devenu un centre de recherche et développement  dans ces domaines. L’exiguïté du marché militaire israélien et même plus  généralement du marché intérieur a poussé les entreprises high-tech à  s’ouvrir largement sur l’ensemble du marché intérieur et surtout sur le  marché international.
 
Après un recul dû à l’éclatement de la bulle internet au  début du millénaire, le développement reprit son cours. Aujourd’hui  plus d’une centaine d’entreprises israéliennes sont cotées sur les  bourses états-uniennes, surtout au Nasdaq. C’est le 2ème plus gros  contingent étranger après le Canada.
 
Profitant d’un environnement favorable - ressources  humaines qualifiées disponibles, coûts salariaux inférieurs, subventions  
(2), réseaux de recherche et développement,  programmes de soutien aux projets innovants -des multinationales  importantes se sont implantées en Israël notamment dans le domaine des  semi-conducteurs : Intel, Vishay, Texas Instruments exportent la  quasi-totalité de leur production 
(3)... Motorola dispose d’une filiale en Israël qui  exporte « seulement » un tiers de sa production : cela tient à sa  position de fournisseur de l’armée israélienne notamment dans les  systèmes de mises à feu. Cette compagnie est active également dans le  secteur de la surveillance automatisée de zones et installations  stratégiques. La présence sur le marché israélien permet aussi d’assurer  une « veille » des start-up israéliennes. Les multinationales US y ont  investi des milliards de dollars. Intel par exemple est présent dans 11  entreprises israéliennes (plus qu’au Royaume-Uni, Taiwan, Japon ou Corée  du Sud).
 
Dès 1977 une fondation (BIRD) était créée avec des fonds  gouvernementaux états-uniens et israéliens pour aider les entreprises  innovantes. D’autres fonds et mécanismes d’aide étaient créés par la  suite dans le même but. Plus généralement le financement du  développement des start-up israéliennes se fait au moyen de capitaux  levés essentiellement aux Etats-Unis par des fonds d’investissement.  Pour le capitalisme financier à son stade actuel les entreprises sont  d’abord des marchandises qu’on achète et revend en les introduisant en  bourse ou en en cédant le contrôle total. Tant qu’on en tire un bénéfice  les investisseurs se précipitent, les créateurs d’entreprise se  demandant s’ils seront dans le prochain tirage du gros lot ...
 
Ainsi les relations entre Israël et les Etats-Unis ne se  bornent pas à une aide annuelle de 3 Mds$ et plus. Elles s’accompagnent  de relations commerciales et d’un partenariat technologique ou  capitalistique entre les industries militaires et hi-tech des deux pays.  Sachant que les plus importantes entreprises hi-tech travaillent aussi  pour le secteur militaire, ou ont utilisé des techniques issues de ce  secteur. Les articles de presse sur l’armée israélienne mettent souvent  en valeur son côté hi-tech, sa capacité à promouvoir les jeunes dans ce  domaine avec un message du type « enrôlez-vous pour rencontrer vos  futurs associés dans votre future start-up ». Evidemment rien sur les  exactions de cette armée et encore moins sur les crimes d’une guerre  « propre » hi-tech où on voit le moins possible son ennemi.
 
La place de l’armée est considérable en Israël. Son  poids dans le budget de l’Etat est de 18% en 1995 et de 18,5% en 2000 et  2005. Selon le « Central Bureau of Statistics » israélien (CBS) ces  dépenses seraient même supérieures de 20% à ces chiffres si l’on prend  en compte celles réalisées au titre de la « défense » dans les budgets  des autres ministères et cela sans compter celles générées par  l’occupation militaire pas toutes prises en compte dans cette approche  (par exemple les exonérations fiscales, aides diverses, coûts  d’infrastructures des colonies ...). Rapportées au PIB ces dépenses sont  très supérieures à celles des pays industrialisés (2 à 4% du PIB  Etats-Unis y compris) : entre 8 et 8,5% du PIB sur la période 1995-2005  ou environ 10% du PIB en intégrant les dépenses d’autres ministères. A  certaines périodes le poids de ces dépenses était bien plus  considérable : près du tiers du PIB dans la période 73-75 (effet de la  guerre de 73) puis près du quart entre 76 et 85, ne commençant vraiment à  baisser que dans les années 90 avec le processus d’Oslo.
 
Exportations et importations de matériel militaire  tiennent un rôle important. D’autant que les exportations permettent  d’alléger le poids économique des dépenses militaires de manière non  négligeable. Important pour Israël qui non seulement perfectionne son  équipement mais a obtenu de son allié les Etats-Unis d’avoir une  supériorité militaire qualitative dans la région en étant doté des  armements les plus modernes, les plus sophistiqués 
(4). Avoir quelques longueurs d’avance fait partie  de cette volonté de dominer la région. Selon le CBS, les importations au  titre de la « défense » sont de 2,5 Mds$ en 2008, à peu près constant  depuis 3 ans. Les exportations militaires israéliennes sont par contre  en augmentation régulière : 6,3 Mds$ en 2008, 5,6 en 2007, 4,8 en 2006.  Israël est maintenant le 5ème exportateur de matériel militaire derrière  les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Russie et la France. Avec des  clients importants en Asie, l’Inde avec dernièrement un contrat de plus  d’un milliard de dollars et la Chine, client très important pour Israël  ce qui ne va pas sans problème avec les Etats-Unis qui se sont opposés à  des ventes de matériel sensible à la Chine. On comprend qu’Israël et la  Chine soient discrets sur ces échanges.
 
L’intégration de l’économie  israélienne dans la mondialisation
 
L’industrie manufacturière, composante la plus dynamique  de l’économie israélienne, voit ses exportations passer de 6,2 Mds$  (hors diamants) en 1988 à 40,4 Mds$ en 2008 : une croissance de 552% en  20 ans. Plus de 80% de la croissance (non déflatée) des exportations a  pour origine l’industrie manufacturière.
 
En 2008 l’industrie chimique et pharmaceutique constitue  de très loin le premier poste dans les exportations israéliennes (34,2%  des exportations hors diamants, particulièrement des produits  pharmaceutiques et des engrais). Vient ensuite l’industrie électrique et  électronique (27,4%), l’optique et instruments médicaux (7,8%), le  plastique et assimilés (6,7%) et la métallurgie (6,7%). A eux quatre ces  industries fournissent plus de 80% (82,9%) des exportations  israéliennes.
 
Un nombre restreint de multinationales israéliennes  assure une grande part des exportations : 32% des exportations  manufacturières en 2008, tous secteurs confondus, sont réalisées par 10  entreprises.
 
Les privatisations, commencées à la fin des années 70,  ont grandement contribué à ce processus de concentration 
(5) baignant dans les thèses reaganiennes et néo  conservatrices des Chicago boys. Des économistes israéliens 
(6) considèrent que les privatisations réalisées  ont favorisé le développement de la corruption, par le bradage des  entreprises publiques et de celles appartenant à la Histadrouth. Cinq  conglomérats principaux se sont dégagés dans ce processus contrôlant à  la fin des années 90 une part importante de l’activité avec parfois des  participations croisées complexes : Israel Corporation (Ofer), IDB,  Koor, Dankner, et Arison. A quoi s’ajoutait un important secteur d’Etat.  Sans pour autant que ces conglomérats disparaissent, les choses ont  évolué avec des recompositions, de nouveaux arrivants Kardan N.V.,  Africa Israel de Lev Leviev (construit dans les colonies israéliennes,  en difficulté depuis la crise financière et immobilière), Delek Group  ... L’Etat a réduit son périmètre mais reste encore très présent dans  l’économie avec une participation encore maintenue dans la Banque Leumi  (l’Etat vient de céder en janvier 2010 sa participation de 25% dans la  Banque Discount à la Deutsche Bank), la propriété des plus grandes  entreprises d’armement, Mekorot (la compagnie de l’eau), la Compagnie  d’Electricité...
 
Le gouvernement projette de démanteler-privatiser  l’entreprise publique d’électricité, privatiser l’éducation (les soins  en milieu scolaire étant déjà cédés au privé), subventionner le secteur  associatif pour qu’il prenne en charge des services précédemment assurés  par l’Etat ... Dans le secteur de la chimie les 10 plus grandes  entreprises assurent 82% des exportations. Israel Chemicals Ltd,  quasi-monopole israélien privatisé en 1995 exploitant les ressources  minérales de la Mer Morte et du Néguev, dispose de filiales et sites de  production dans de nombreux pays. Il a réalisé 94% de son chiffre  d’affaires à l’étranger dont plus de la moitié par ses filiales  étrangères. C’est notamment un des principaux fournisseurs d’engrais en  Europe.
 
Teva, classée dans les 20 premières entreprises  pharmaceutiques mondiales, spécialisée dans les génériques, a réalisé  95% de son chiffre d’affaires hors d’Israël. Première entreprise  israélienne par son chiffre d’affaires (en 2008 11,1 Mds$ dont 6,1 Mds$  aux Etats-Unis et 2,8 Mds$ en Europe), elle a 38.000 salariés.
 
Dans les composants électroniques les 10 plus grandes  entreprises réalisent 84% des exportations, dont plus de 60% par des  filiales de compagnies étrangères.
 
Dans le plastique, Keter, qui a acquis l’entreprise  française Allibert en 2003, réalise 89% de son chiffre d’affaires à  l’étranger. Dans l’industrie d’armement Elbit et Israeli Aerospace  Industries plus de 80%, et Rafael plus de 50%. Ou encore Elron (holding  dans l’électronique), Delek (pétrole, gaz), Iscar (métallurgie,  entreprise rachetée par le financier Warren Buffet), ...
 
Israël dispose aussi de quelques « success stories »  dans l’industrie du logiciel : Check Point Software, Amdocs, Aladdin  Knowledge Systems, Comverse ... A noter que le plus souvent il s’agit de  produits à destinations des entreprises (B2B) et non directement  commercialisés à des particuliers.
 
Globalement l’économie israélienne a un degré  d’ouverture 
(7) moyen de 62% entre 2005 et 2008. L’Union  Européenne pèse un tiers des exportations israéliennes (chiffres 2008,  hors diamants) et représente sensiblement le même poids dans les  importations. Pris globalement c’est le premier partenaire économique  d’Israël. Les pays de l’UE qui reçoivent le plus d’exportations  israéliennes sont dans l’ordre d’importance : les Pays-Bas, l’Allemagne,  le Royaume-Uni et l’Italie (entre 1,6 et 2 Mds$). Viennent ensuite la  Belgique, la France et l’Espagne (entre 1,1 et 1,2 Mds$).
 
Les Etats-Unis reçoivent 28% des exportations  israéliennes mais pèsent beaucoup moins dans les importations : la  balance commerciale avec les Etats-Unis est largement positive pour  Israël. A noter la montée de l’Asie, l’Inde et surtout la Chine qui  devient deuxième fournisseur d’Israël passant devant l’Allemagne 
(8), et le Brésil en Amérique du Sud.
 
Les territoires palestiniens  occupés
 
Les échanges avec les territoires « sous contrôle »  virtuel palestinien ne sont pas inclus dans les statistiques douanières.  Le traitement spécifique de ces données exprime de facto leur statut de  « marché déversoir » pour les produits israéliens. Des échanges  extrêmement profitables pour l’économie israélienne : en 2002 l’excédent  au profit d’Israël était de 811 M$ ; en 2008 il passait à 2,6 Mds$ !  Une manière de réduire les déficits commerciaux israéliens. Tout en  empêchant, de mille et une manières, les productions palestiniennes de  concurrencer les produits israéliens. Israël a investi dans les colonies  installées, toutes illégalement, dans les territoires palestiniens  occupés en 1967 mais pas en dehors de ces colonies. En effet le but  poursuivi était et est toujours de s’accaparer la terre et les  ressources, particulièrement l’eau, sans annexer la population. Pour  encourager le peuplement de ces colonies des aides importantes ont été  dégagées par l’Etat pour financer les infrastructures, les habitations,  des aides aux familles, des incitations fiscales 
(9) très importantes pour les entreprises notamment  dans la vallée du Jourdain etc.
 
La dette extérieure : de débiteur à  créditeur
 
Malgré l’orientation résolument exportatrice des grands  groupes industriels israéliens, les importations de biens 
(10) (hors services) ne sont couvertes qu’à 80%  environ par les exportations (après 67% en moyenne au début des années  90), le déficit de la balance commerciale augmentait régulièrement  dépassant 13 Mds$ en 2008.
 
Le solde positif des échanges sur les services a permis  de réduire le déficit sur les échanges de biens. Le montant total  d’exportation de services s’élevait à 24,1 Mds$ en 2008 contre 13,2 Mds$  en 2003 : plus de 80% en 5 ans. Tous les secteurs ont enregistré une  forte progression : Tourisme, Transports, Logiciels, Recherche &  Développement ... L’excédent dégagé sur les services (4,2 Mds$)  s’avérait insuffisant pour couvrir le déficit sur les échanges de biens.  En 60 ans environ 180 Mds$ 
(11) ont été consacrés à la couverture des déficits  extérieurs, les 2/3 étant des dons et transferts en devises étrangères  provenant des Etats 
(12), de fonds de soutien de la diaspora, d’apports  des immigrants, d’investissements dans des entreprises ... Ces  mouvements de fonds se maintenant jusques aujourd’hui ont permis de  limiter la dette extérieure.
 
Malgré ces apports importants de devises la dette  extérieure a tout de même augmenté jusqu’en 2002 : 356 M$ en 1954, 6,3  Mds$ en 1975 jusqu’à 20,8 Mds$ en 1995. Puis avec la progression  régulière des exportations de biens et surtout des services  (particulièrement pour les logiciels et la recherche-développement) la  décrue commençait au début du nouveau millénaire.
 
En 2002 la dette extérieure devenait nulle puis, de  débitrice la position s’inversait pour devenir créditrice : +23,2 Mds$  en 2005 et +44,1 Mds$ en 2008. Cette situation laisse à Israël des  marges de manœuvres financières autrefois inexistantes. L’année 2009,  selon les premières estimations du CBS, a vu une amélioration sensible  de la balance des transactions courantes avec, pour la première fois si  les chiffres le confirment, un excédent de la balance des échanges des  biens et services, le très fort recul des exportations étant largement  compensé par une baisse plus importante des importations notamment du  fait de la diminution du coût de l’énergie.
 
Mais l’amélioration de la situation économique de ces  dernières années n’a pas profité à l’ensemble de la population  israélienne. Loin de là. La pauvreté touche le quart des Israéliens et  tout particulièrement la population palestinienne qui subit de plus une  discrimination raciale, une absence d’investissement criante, délibérée,  d’infrastructures publiques. Le retrait de plus en plus marqué des  services publics accroit la paupérisation et la précarité de couches  plus larges de la société. Le CBS estime que 30% de la société peut  tomber dans la pauvreté. Derrière les appels à l’union nationale sacrée  s’exprime une politique ouvertement néo-conservatrice accompagnée de  budgets militaires faramineux qui pèsent toujours plus, imposant  restrictions et privations aux couches les plus faibles. La crise sévit  aussi en Israël.
 
La très grande ouverture d’Israël en direction des  marchés extérieurs a rendu ce pays particulièrement vulnérable aux  pressions économiques provenant de l’extérieur tant pour ses  importations de matières premières que pour les exportations de ses  multinationales. Les autorités israéliennes accordent une grande  d’importance à la signature de traités de libre échange, tant sur le  plan diplomatique qu’économique. Des documents produits par des  ministères ou institutions israéliennes ne manquent pas d’en faire la  liste régulièrement. Dans une même logique elles combattent farouchement  toutes les actions susceptibles d’entraver ces liens, en particulier  les appels à sanctions qui se sont multipliés depuis les crimes de  guerre, voire crimes contre l’humanité, commis à Gaza par Israël.
 
Les campagnes de boycott, désinvestissements, sanctions,  se développent dans le monde entier avec des premiers succès (Dexia et  les prêts à des colonies, Veolia-Alstom et le tramway de Jérusalem,  fonds souverain Norvégien se désinvestissant de Elbit, Assa Abloy  déménageant sa filiale Mul-T Lock de Barkan en Cisjordanie, ...). Des  campagnes auprès des consommateurs ciblent des entreprises ayant des  sites de production dans des colonies (Soda Club, Ahava, Agrexco ...),  colonies, faut-il le rappeler, toutes illégales selon le droit  international.
 
Ces mobilisations de consommateurs peuvent être un point  de départ, un levier afin d’exiger des sanctions institutionnelles  contre Israël notamment la suspension de l’accord d’association Union  Européenne/Israël. Objectif que le boycott consommateur ne doit pas nous  faire oublier, une telle sanction étant redoutablement efficace du fait  même des structures de l’économie israélienne. Sinon la politique  israélienne continuera à nier le droit en toute impunité. Comme  l’indiquait le journaliste israélien Gideon Levy dans une interview au  journal l’Humanité en janvier 2010 « Il n’y a aucune perspective parce  qu’Israël n’a payé aucun prix pour l’occupation et la colonisation des  territoires palestiniens. Donc, cela va continuer. » 
 
Notes
 
[1] Le début des années 80  connut l’inflation galopante à 3 chiffres : 133% en 1980, 191% en 1983,  445% en 1984
 
[2] Intel a reçu 600 M$  sur un investissement global de 1,8 M$ pour le site de Kiryat Gat
 
 
[4] Voir l’article de  Caroline Pailhe Les transferts militaires américains  vers Israël dans l’ouvrage collectif Qui arme Israël  et le Hamas ? dans la collection « Les Livres du GRIP »
 
[5] Dans ce processus la  « gauche travailliste » israélienne y a perdu une bonne part de sa  puissance sociale avec le passage du secteur public au privé, de la fin  de toute une série d’acquis sociaux et l’affaiblissement de la  principale base socio-économique des travaillistes, la Histadrouth,  syndicat unique possédant entreprises importantes et banque. Aujourd’hui  seulement le quart des kibboutz fonctionne suivant le schéma d’origine  des « coopératives égalitaires ».
 
[6] Shimshon Bichler et  Jonathan Nitzan New Economy or Transnational Ownership ?  The Global Political Economy of Israel 2002
 
[7] Degré d’ouverture =  (importations + exportations)/PIB. A titre de comparaison, en 2004 :  France, Italie 41-42%, Allemagne 60%, Royaume-Uni 38%, Etats-Unis 20%,  Japon 22% et Chine 44%
 
[8] Interrogé sur les  échanges économiques avec les pays arabes, le gouverneur de la Banque  Centrale Stanley Fischer déclarait qu’il le souhaitait mais que « il ne s’agit pas d’une nécessité vitale ». La volonté  d’intégration israélienne dans la région n’est pas pour demain !  Tel-Aviv, que les israéliens surnomment « The Bubble » - la bulle -  regarde New York ou la Californie mais pas les territoires palestiniens  occupés.
 
[9] Certaines entreprises  ne déclaraient ni leur activité ni leurs bénéfices, l’Etat fermant les  yeux.
 
[10] Les importations de  biens, 64,5 Mds$ en 2008, sont pour la plus grande part des matières  premières (37,6%) et du pétrole (19,9%). Viennent ensuite les biens  d’équipement 15,7% et les diamants 13,8%. Les biens de consommation ne  représentent que 12,8% du total.
 
[11] Ministry of Foreign  Affairs, The National Economy, Balance of Payments, April 2008
 
[12] Etats-Unis environ 3  Mds$ par an (estimation courante à quoi il faudrait ajouter des dons de  surplus militaires) couvrant l’achat de matériel militaire US, une  partie pouvant être utilisée au profit de l’industrie israélienne (25%).  Allemagne environ 750 M$ par an au titre de réparations.