Il y a trois mois, j’ai participé en coup de vent à une conférence du mouvement Solidarité avec la 
Palestine à Stuttgart.         
         Le thème de ce rassemblement était "la solution d’un  état". J’étais par hasard en voyage en Allemagne au même moment et j’ai  donc accepté de dire quelques mots à la demande de l’organisateur.
Comme je suis avant tout un artiste et pas un politicien  ni un militant je suis attaché à la beauté et la vérité et pas à la  ligne du parti ni à quelque doctrine idéologique. Et pourtant sans en  avoir l’intention et sans avoir fait un long discours, j’ai réussi à  franchir toutes les "lignes rouges" possibles et imaginables et je me  suis fait quelques ennemis de plus.
Dans mon discours j’ai dit que le concept  "d’universalisme" est un concept magnifique mais qu’il n’est pas  compatible avec la culture juive parce que la culture juive a une  orientation tribale. J’ai aussi dit à ces supporters allemands des  Palestiniens que "la paix" est un concept magnifique car il évoque  l’harmonie et la réconciliation mais que Shalom, le mot hébreu pour paix signifie en fait pour les Israéliens "sécurité pour les Juifs".
Il me semblait que ces supporters devaient être conscients de la complexité qui ce qui les attend.
J’ai aussi réussi à rendre furieux quelques autres  personnes en disant que j’étais contre les comparaisons entre Israël et  l’Allemagne nazie. En effet, je crois que d’un point de vue idéologique,  Israël est pire que l’Allemagne nazie car à la différence de  l’Allemagne nazie, Israël est une démocratie et 
cela implique que les citoyens israéliens sont complices des atrocités que commet Israël.
Inutile de dire que quelques participants à la  conférence étaient en colère après moi. De telles idées sont rarement  exprimées en Allemagne. Quelques militants juifs, et au moins un  marxiste, ont demandé qu’on me retire du protocole de la conférence.
Cela m’a fait de la peine -je croyais que ceux qui  soutenaient la solution d’un état seraient capables d’accepter le  pluralisme intellectuel. Mais il apparaît que certains de ceux qui  militent pour une Palestine démocratique seraient bien avisés de prendre conscience de leurs propres tendances staliniennes.
Plus tard j’ai appris qu’un des militants juifs allemands qui a pris la parole à la conférence m’a défendu. Evelyn Hecht-Galinski  a fermement déclaré que si on me retirait du protocole elle aussi  demanderait à en être enlevée. Elle a dit pour ma défense que j’avais  dit la vérité en ce qui concernait à la fois la culture juive et la  culture israélienne.
En dépit de l’impitoyable pression exercée par la communauté juive, une vidéo de ma présentation a été chargée sur 
Youtube et beaucoup de gens l’ont vue.
Il y a deux jours, j’ai appris que Arbeiterfotografie,  (le groupe qui a couvert la conférence) avait retranscrit mon discours  et l’avait qualifié de "tout à fait convaincant et humain". Selon cette  firme, mes paroles devaient être "largement diffusées" (voir  ci-dessous).
Je suppose que la vérité ne peut plus être censurée,  même en Allemagne. Si Israël se définit comme un état juif, c’est  certainement notre devoir de demander ce que signifie cette judaïcité.  Je crois que la solidarité avec la Palestine prend plus de sens quand nous 
avons  la courage de dire la vérité. Au lieu de nous conformer à quelque  consensus ou discours extérieur, notre devoir est de présenter une  réalité différente tout en gardant comme but la morale et la beauté.
Pour que la justice triomphe il faut dire la vérité.
Arbeitfotografie : Qu’est-ce que Gilad Atzmon a dit exactement à Stuttgart ?
Une des phrases les plus essentielles que gilad Atzmon a  prononcées au début de son discours de bienvenue à la conférence de  Stuttgart est certainement la suivante : "Nous sommes tous d’accord avec  la solution "d’UN état", et nous pensons tous que c’est probablement la  seule solution éthique et universelle à la crise. Nous pensons tous que  c’est la bonne route vers la paix." Gilad Atzmon explique que la paix  et l’universalité, dans le sens de réconciliation, sont étrangers à la  culture juive -et plus particulièrement à la culture israélienne. Il  affirme que la culture juive a une orientation tribale. Et que lorsque  les Israéliens utilisent le mot "Shalom", ils ne veulent pas dire paix  mais sécurité pour les Juifs. Il croit qu’il est capital d’exercer une  pression maximale sur Israël par le biais du "Boycott, Désinvestissement  et Sanctions" (BDS).
Bien qu’il soit juste de dire que des déclarations de  cette nature ne peuvent pas manquer pas de provoquer de violentes  réactions de la part des supporters des idéologies racistes et  sionistes, on a du mal à comprendre qu’il en soit de même chez les  militants du mouvement Solidarité avec la Palestine.
C’est le passage suivant en particulier qui a été cité  hors contexte : "Je crois qu’Israël est bien pire que l’Allemagne nazie.  Pourquoi ? Parce que c’est une démocratie. L’Allemagne nazie n’était  pas une démocratie. Le Reichtag a été dissous, les Allemands n’ont  aucune responsabilité dans les actions et les crimes commis par les  Nazis. Israël est une démocratie ; et par conséquent chaque citoyen est  complice. Chaque citoyen est complice comme je le suis moi-même des  crimes commis en 
Iraq en tant que citoyen britannique. "
Le passage ci-dessus a été utilisé pour discréditer Gilad Atzmon  et refuser de discuter avec lui. Est-ce justifié ? La réponse à cette  question devient évidente si on se réfère au contexte dans lequel cette  phrase a été prononcée. Le passage qui a été sorti de son contexte fait  partie d’une digression dans laquelle Gilad explique pourquoi il n’aime  pas les comparaisons -les comparaisons entre Israël et l’Allemagne nazie  et entre Israël et l’Afrique du sud. En réduisant ses paroles à ce que  je viens de citer, on enlève à sa déclaration son sens initial et son  intention profonde. [voir le texte complet ci-dessous]
 En réalité la préoccupation principale de Gilad Atzmon  est d’éveiller la conscience des Israéliens à une notion qu’il décrit  comme suit : "Mais alors tout à coup un concept très important est  devenu clair à mes yeux. Et c’est le seul que les Israéliens peuvent  comprendre. C’est très simple [voir le texte ci-dessous]. Je crois que  la peur hystérique des Israéliens à propos de la délégitimation d’Israël  a un rapport avec le fait qu’ils commencent à comprendre que tôt ou  tard ils seront obligés de vivre avec les Palestiniens.... C’est aussi  le message principal que je leur adresse aujourd’hui. Ce sont les  Israéliens qui sont actuellement prisonniers -prisonniers de la  bienveillance future des Palestiniens.  Personne n’a le pouvoir de  pardonner aux Israéliens leurs actions et leurs crimes -ni 
les Anglais,  ni les Français, ni les Allemands. Le seul peuple qui sera en capacité  de leur pardonner c’est le peuple palestinien. S’ils veulent être  pardonnés, les Israéliens doivent se mettre à réfléchir MAINTENANT. [Il  faut qu’ils commencent à se dire] : "Le destin nous condamne à vivre  dans cette société. C’est un processus irrémédiable." Il n’y aura qu’un  état et nous devons nous assurer qu’ils le comprennent - et qu’ils  comprennent que tout ce qu’ils font à partir d’aujourd’hui sera soumis à  la bienveillance des Palestiniens. Nous devons le leur dire très  clairement."
Sa manière de penser est inhabituelle, mais elle ne mérite absolument pas d’être condamnée.
C’est une façon de voir convaincante et humaine et nous  devrions la soutenir et la diffuser largement. Nous ne devrions plus  jouer à ce jeu qui consiste à renverser les rôles du voleur et du volé,  de l’oppresseur et de l’opprimé, du terroriste et du terrorisé. Nous  devons dire clairement qui a systématiquement commis des crimes contre  qui au cours des dizaines d’années passées. Et dans ce contexte nous  devons admettre avec Gilad Atzmon que cela ne peut plus continuer comme cela. Chaque crime supplémentaire commis par Israël contre les Palestiniens augmente la haine  contre cet état et rend la réconciliation encore plus difficile. Ca ne  peut pas être ce que nous voulons surtout si nous appartenons à une  société chrétienne.
Voici la digression intellectuelle complète de Gilad Atzmon [en italiques] : "Nous avons  déjà entendu la comparaison entre les Israéliens -Israël et l’Allemagne  nazie. Je n’aime pas cette comparaison parce que je crois qu’Israël est  bien pire que l’Allemagne nazi. Pourquoi ? Tout simplement parce que  Israël est une démocratie. Le Reichtag a été dissous, les Allemands  n’étaient en aucune manière responsables de ce que les Nazis avaient  fait -à l’exception de ceux qui avaient directement commis des crimes ou  exerçaient une  responsabilité  politique. Israël, par contre, est une  démocratie.
En conséquence chaque citoyen est complice comme moi je le suis en tant que citoyen britannique des crimes commis en Iraq. Evidemment je ne suis pas responsable au même degré que Tony Blair ou Lord Goldsmith ou même Lord Levy (son donateur numéro un). Quant à la comparaison entre Israël et l’
Afrique du Sud.... il y a eu des massacres [en Afrique du Sud]  -mais il n’y a pas eu de génocide, ni de politique de génocide contre  les noirs.[Contrairement]à ce qui se passe en Israël. Nous avons tous été témoins de ce qui est arrivé à Gaza en 2008/2009. En tous cas je n’aime pas les comparaisons, cependant....."
Ce sont des réflexions annexes. Elles sont provocantes  mais en aucune façon ne justifient un refus de dialoguer avec leur  auteur, d’autant plus qu’elles ont comme centre une notion qui pourrait  difficilement être plus humaine.
* 
Gilad Atzmon est né en Israël et y a fait son service militaire. Il habite à Londres et il est l’auteur de deux romans : 
A Guide to the Perplexed et plus récemment 
My One and Only Love. Il est aussi un des saxophonistes de jazz les plus renommés d’Europe. On peut le joindre à : 
atz@onetel.net.uk