Mardi, 01 Avril 2014 10:23  
 
 
  
 
 
DÉVELOPPEMENT DU BOYCOTT ET TRANSFORMATIONS DU MOUVEMENT DE SOLIDARITÉ PAR L’APPEL BDS.
 
José Luis Moraguès, membre de la coordination nationale CCIPPP et de BDS France.
1- LES CONDITIONS D’EMERGENCE DE LA CAMPAGNE BDS EN EUROPE
 
- QUELQUES INITIATIVES BDS ISOLEES (2002 A 2008)
En août 2002 le PACBI 
[1]
 lance un premier appel pour « un boycott économique, culturel et 
universitaire d'Israël ». Le 28 septembre 2002 à Marseille (France),10 
000 personnes défilent lors d’une « Grande marche internationale, pour 
la protection du peuple palestinien, contre l’occupation, la 
colonisation, l’apartheid en Palestine et pour le boycott des produits 
israéliens». La manifestation marchera sur le « quai Carmel » où les 
bateaux de l’entreprise israélienne Agrexco/Carmel débarque ses produits
 (fruits et légumes ). Lors d’une communication téléphonique en direct 
avec Arafat assiégé, celui-ci remerciera chaleureusement les 
manifestants de leur solidarité. La reprise du « boycott » exprime ici 
davantage un cri de colère et une volonté de réagir face l’invasion, fin
 mars 2002, de la Cisjordanie et Gaza par l’armée israélienne qu’il 
n’est le résultat d’une analyse et d’un projet solidement construit. 
Mais l’idée fait son chemin, notamment au Royaume-Uni où en 2004 les 
activistes bloquent l’entrée du dépôt du centre d’emballage 
Agrexco/Carmel à Hayes dans le Middlesex. Le procès intenté par Agrexco 
contre les activistes (plainte classée sans suite) est célèbre car le 
directeur d’Agrexco a reconnu, devant le tribunal, que l’entreprise 
israélienne produisait dans les colonies de la Vallée du Jourdain. Ce 
qui a constitué un point d’appui pour la dénonciation d’Agrexco dans 
toute l’Europe.
 
L’idée du boycott des institutions universitaires est reprise en 
octobre 2003 par des universitaires et des intellectuels palestiniens 
des territoires occupés et de la diaspora mais sans résultat.
En avril 2004 le PACBI lance un nouvel appel au 
boycott universitaire et culturel d’Israël. Dès 2005, au Royaume-Uni, 
les syndicats universitaires (AUT) votent pour le boycott malgré 
l’offensive sioniste visant à les faire condamner. Pendant quelques 
années ils n’utiliseront pas le mot « boycott » tout en maintenant une 
activité de boycott.
En juillet 2005 grâce à un travail acharné du PACBI, PNGO 
[2],
 Stop the Wall, des organisations de Réfugiés et quelques autres 
organisations est lancé « l’Appel BDS » palestinien. Alors que cet appel
 est signé de 172 organisations représentant tous les courants 
politiques, religieux et l’immense majorité des associations de la 
société civile palestinienne, à de rares exceptions près, il ne 
rencontre aucun écho immédiat dans le mouvement de solidarité à la 
Palestine. L’émotion et la colère de l’invasion de 2002 sont retombées 
et en France, par exemple, face à la propagande sioniste qui brandit la 
menace de poursuites pour antisémitisme, l’idée de boycott a reculé y 
compris parmi les plus radicaux au sein du mouvement de solidarité. Deux
 arguments majeurs sont avancés : le Boycott évoque trop directement le 
boycott des magasins juifs par les nazis et, contrairement aux USA, nous
 n’avons pas la culture des actions de consommateurs.
 
- L’ELECTROCHOC DE LA GUERRE ISRAELIENNE CONTRE LA BANDE DE GAZA 
 La guerre contre Gaza de l’hiver 2008-2009 engendre une exigence d’actions contre Israël. 
Avant même la trêve du 18 janvier 2009, les centaines de milliers de 
manifestants remplis de colère et galvanisés par le succès de leurs 
mobilisations sont en demande de propositions pour sanctionner Israël. 
On assiste alors à une série d’initiatives qui spontanément mettent en 
œuvre des types d’actions préconisées par l’appel BDS palestinien : 
- Dès la première semaine de janvier 2009 les syndicats norvégiens 
appellent à des grèves contre les massacres commis. Certains demandent 
le retrait des investissements norvégiens en Israël, d’autres exigent de
 leurs employeurs qu’ils retirent les produits israéliens des magasins 
privés et publics du pays…
- le 10 janvier les dockers grecs bloquent des munitions US à destination d’Israël dans le port d’Astakos.
- Le même jour Naomi Klein publie dans The Guardian un long article intitulé « Ca suffit. Le temps du boycott est venu ».
- Le 20 janvier la CGT d’Alsthom en France réclame que l’entreprise 
cesse sa collaboration avec Israël dans la construction du tramway à 
Jérusalem.
- Le 22 janvier une dizaine d’universités britanniques y compris 
Oxford sont occupées pour que cesse la collaboration avec Israël.
- Le 23 janvier c’est l’université de Parme qui est occupée pour 
protester contre la collaboration avec la firme américaine Caterpillar, 
qui fournit des bulldozers à l’armée israélienne. Puis ce sera celle de 
Milan.
Ce mouvement va s’amplifier dans toute l’Europe et s’épanouir dans la réponse à l’appel BDS palestinien.
La guerre contre Gaza signe la fin du « processus de paix ».
 Par delà la violence des bombardements intensifs, jours et nuits contre
 une population civile terrifiée, par delà les 1340 morts dont 430 
enfants, les milliers d’adultes et enfants blessés et handicapés à vie, 
la barbarie israélienne fait tomber les masques et accélère les prises 
de conscience. Le monde entier découvre que le nettoyage ethnique est 
une politique d’Etat et donc qu’Israël ne veut pas « la paix ». Cette 
révélation signe la fin de la période ouverte par les Accords d’Oslo, 
signe la mort du prétendu « processus de paix » .
Force est de constater que celui-ci a été utilisé, par l’axe 
israélo-étatsunien et avec la complicité active de l’Union Européenne, 
comme une arme de guerre pour « continuer 48 » c’est à dire : 
intensifier le nettoyage ethnique. Que sur la scène internationale, il a
 réussi à imposer idéologiquement, en faveur d’Israël, le rapport de 
force établi militairement par l’état israélien et ses colons sur le 
terrain.
La fin politique des Accords d’Oslo sanctionne également l’impasse 
d’un système mis en place par l’Autorité Palestinienne. On peut 
considérer que la division Autorité palestinienne/Hamas était un élément
 de ce système qui octroyait à l’Autorité Palestinienne la 
« Légitimité » permettant les financements extérieurs et qui octroyait 
au Hamas, l’exercice d’un pouvoir sur la Bande de Gaza. 
Dans ce contexte de révolte face à la barbarie et de prise de 
conscience de la tromperie du « processus  de paix » les derniers tabous
 sur le boycott volent en éclat. Les propositions de boycott de l’appel 
BDS palestinien contre Israël s’imposent dès lors comme une évidence 
d’action. Le mouvement de solidarité s’empare enfin de l’appel BDS.
- DÉPLOIEMENT ET ORIENTATIONS DE LA CAMPAGNE BDS EUROPÉENNE [3] (2009 – 2013) 
 2009 - 2011 Les actions de boycott dominent dans le BDS
Durant ces deux années l’appel BDS est perçu en Europe, avant tout 
comme une modalité d’action et une modalité d’action centrée sur le 
Boycott des produits israéliens dans les grandes surfaces. La référence à
 l’Afrique du Sud (cf. les oranges Outspan) semble avoir induit dans 
plusieurs pays l’idée que boycott signifiait « boycott des produits ». 
Ainsi les avocats remplaceraient les oranges et ce dans une démarche 
individuelle de boycott.
Ce qui caractérise ces actions de boycott inspirées des thèses de la 
non violence c’est leur caractère audacieux et en rupture complète avec 
le type d’action d’avant la guerre contre Gaza. (Cf. cette action de 
boycott du 7 février 2009 au Pays de Galles
http://www.youtube.com/watch?gl=GB&hl=en-GB&v=f729KqURQc4).
 Un saut qualitatif est franchi : les actions sont passées de la 
dénonciation et de la protestation par délégation : nous demandons aux 
élus, aux instances etc. de refuser tel produits etc. à l’action 
directe : nous, citoyens, allons en personne dans les magasins mettre en
 acte notre refus des produits et des entreprises incriminées et nous 
nous adressons directement au public et aux directeurs des supermarchés.
 
L’action phare qui a marqué ces deux années est la campagne contre 
Agrexco menée par la Coalition contre Agrexco. Initiée à Montpellier en 
raison d’une décision du Conseil Régional Languedoc-Roussillon de 
construire, dans le Port de Sète, des entrepôts réfrigérés afin de 
recevoir les fruits et légumes israéliens débarqués des bateaux 
d’Agrexco, cette campagne a pris en six mois d’existence une dimension 
européenne. Pendant deux ans et demi, la Coalition contre Agrexco a été 
un laboratoire du BDS et la matrice du BDS Européen. En juillet 2011 
l’entreprise déclarait faillite et la liquidation était prononcée le 11 
septembre 2011. La baisse des parts de marché en Europe a provoqué des 
difficultés de trésorerie qui ont déclenché une série de problèmes 
lesquels ont conduit à la faillite. C’est la première victoire 
européenne de boycott contre un fleuron historique de l’agriculture 
coloniale israélienne ; celle qui « faisait fleurir le désert » (avec 
l’eau et sur la terre des palestiniens ( !). )
 2010 - 2013 structuration et orientation du BDS sous direction palestinienne.
Durant ces trois années le BNC a encouragé l’ouverture de nouveaux 
fronts d’intervention BDS, sur les terrains culturel, académique et 
sportif. Concernant le boycott économique qui nous intéresse ici, on 
retiendra un double mouvement dans la présence palestinienne. Une 
progression constante de l’implication des organisations paysannes 
palestiniennes dans la campagne européenne de boycott et l’affirmation 
respectueuse mais ferme des positions stratégiques palestiniennes.
La campagne contre Agrexco a été menée en lien direct et permanent 
avec le BNC qui à plusieurs reprises a envoyé des messages de soutien 
dans des situations critiques. Pour la première fois le PARC 
[4]
 va s’impliquer directement, en France, dans le boycott d’Agrexco. Pour 
casser le boycott, la direction d’Agrexco (appuyée par les officines 
sionistes en France) avait annoncé un arrivage massif de fraises de Gaza
 exportées par Agrexco. Boycotter ces fraises serait boycotter les 
Palestiniens de Gaza il fallait donc cesser le boycott d’Agrexco, telle 
était en substance la manoeuvre israélienne. Le 30 décembre 2010 le PARC
 ripostait « (…) PARC confirme son soutien au boycott de toutes les 
compagnies complices de la violation de la loi internationale, dont 
Agrexco. (…) A cette occasion, PARC salue tous-te-s les militant-e-s et 
soutiens internationaux de la campagne BDS, et particulièrement nos amis
 et partenaires Français qui ont été capables de contrarier la tentative
 par Agrexco d'organiser … etc. ».
- Passer du boycott des produits au boycott des entreprises
Après la victoire contre Agrexco, la désignation de la nouvelle cible (Mehadrin 
[5])
 s’est faite en concertation avec le BNC et la coordination BDS 
européenne (Novembre 2011). Il y a dans le choix d’une cible principale 
l’affirmation qu’il est nécessaire de concentrer les tirs du boycott au 
lieu de disperser les forces sur une quantité de cibles. Il y a 
également la volonté affichée de poursuivre la démarche d’Agrexco qui 
était de cibler l’entreprise et non les produits. L’Appel BDS de 2005 ne
 rentre pas dans les détails, il ne se prononce pas sur le boycott des 
produits ou des entreprises, par contre l’Appel palestinien du 9 février
 2013 
[6] et le texte « Farming injustice » 
[7]
 publiés un peu plus d’un an après la victoire contre Agrexco apportent 
des réponses plus explicites sur le sujet. Le texte « Farming 
injustice » qui développe l’argumentaire de l’appel montre comment 
l’agriculture de l’ensemble de la Cisjordanie et Gaza (sans oublier les 
pêcheurs) est victime du système colonial israélien. Les signataires : 
toutes les organisations paysannes, celles de la société civile 
palestiniennes sous occupation militaire et le BNC, appellent à « cesser
 tout commerce avec les Entreprises agroalimentaires Israéliennes ». Les
 cibles sont nommées : sept entreprises agroalimentaires dont une cible 
prioritaire Mehadrin, suivie de Hadiklaim 
[8].
 L’objectif est également fixé : la fin de tout commerce complice avec 
ces entreprises qui causent la destruction de l’agriculture 
palestinienne (
[9]).
- Pour l’interdiction d’entrée dans l’UE des produits des colonies
En ciblant les entreprises agricoles israéliennes l’appel de 2013 
réaffirme son alignement stratégique sur le droit international, 
notamment en matière des colonies. Il refuse de prendre pour base de 
discussion les accords UE-Israël qui sont le résultat du rapport de 
force issu d’un « processus de paix » au service de la domination et de 
l’apartheid israélien. Non seulement les accords UE-Israël n’appliquent 
pas le droit international mais ils le violent souvent. Quand les 
produits des colonies clairement identifiés entrent en Europe après le 
simple paiement d’une taxe, au lieu d’être bloqués aux frontières et 
confisqués comme les produits de contrefaçon, il s’agit tout simplement 
d’une violation du droit. « Farming injustice » rappelle que les 
colonies sont illégales, que leur construction et le déplacement de 
population constituent un crime de guerre, donc que leurs productions 
sont illégales et a fortiori le commerce avec les entreprises qui 
produisent et/ou commercialisent ces produits.
« Farming injustice » se prononce aussi sur l’étiquetage. L’étiquetage 
[10]
 des produits des colonies et le choix laissé au consommateur d’acheter 
ou non ces produits dans les magasins européens constituent également 
une violation du droit. Comme l’écrivent les signataires de l’appel de 
2013 : « Tout commerce avec des entreprises agissant ou impliquées dans 
des colonies illégales israéliennes soutient la pérennité des colonies. 
(…) Le maintien des échanges commerciaux avec les entreprises opérant 
dans les colonies illégales accorde de facto une reconnaissance et une 
légitimité politique aux colonies. » (Farming injustice p.16). Même si 
c’est pour appeler à leur boycott ensuite, l’étiquetage des produits des
 colonies en ne s’opposant pas à leur entrée en UE, légalise de fait 
leur commercialisation. La seule réponse de droit est l’interdiction 
d’entrée de ces produits et le refus de commercer avec les entreprises 
israéliennes qui les produisent et/ou les commercialisent. 
La nature des interventions du BNC via les différents canaux (dans la
 coordination européenne, par ses articles, vidéos, et site 
[11])
 qui toutes martèlent les orientations stratégiques de l’appel de 2005 
et ses objectifs fondamentaux ont fini par redonner au BDS toute son 
épaisseur. La prise en compte progressive de la dimension stratégique de
 l’appel BDS va transformer radicalement le mouvement de solidarité 
[12].
2 - L'APPEL BDS  : UNE ALTERNATIVE STRATEGIQUE ET DES 
MODALITES D’ACTIONS QUI TRANSFORMENT RADICALEMENT LE MOUVEMENT DE 
SOLIDARITE AVEC LA PALESTINE. 
L’appel BDS comporte deux volets :
-          
Une alternative stratégique qui définit 
les conditions minimales pour une réelle autodétermination du peuple 
palestinien. Le mouvement de solidarité a désormais un nouveau cadre 
politique cohérent, basé sur les droits fondamentaux des trois 
composantes du peuple Palestinien. Un cadre stratégique, riche de 
perspectives et alternatif aux solutions politiques issues des accords 
d’Oslo. 
[13]
-          Une alternative tactique d’actions pour le mouvement de solidarité, indissociables des trois objectifs stratégiques.
Dans cette dernière partie nous traiterons des transformations que la
 prise en compte et la mise en œuvre de ces deux volets de l’appel BDS 
ont engendré dans le mouvement de solidarité. L’expérience de la lutte 
contre Agrexco sera le fil conducteur pour illustrer ces 
transformations. 
-       Une direction palestinienne impliquée dans l’action
Dans l’avant BDS on avait surtout recours aux Palestiniens en tant 
que témoins et victimes. Nous leur demandions de raconter les horreurs 
de la colonisation israélienne et ses crimes pour mieux les dénoncer. 
Dans la campagne BDS les Palestiniens sont non seulement acteurs mais 
garants des orientations stratégiques d’une campagne dont ils 
revendiquent légitimement la direction.
Dans la lutte contre Agrexco l’implication palestinienne s’est faite dès la première rencontre (
[14]). A Ramallah O. Barghouti nous a dit que le BNC
[15]
 voulait donner une dimension européenne à la bataille contre Agrexco et
 qu’il allait activer ses contacts en Europe. Il ne s’agissait pas 
seulement d’un conseil extérieur mais d’une implication immédiate et 
directe dans la réalisation de cet objectif. Trois mois après cette 
rencontre, au premier grand meeting de la Coalition contre Agrexco le 
10/10/09 (
[16])
 non seulement Omar Barghouti était présent mais également les 
écossais : Terry Brotherstone, du syndicat STUC ; Mick Napier, Sofiah 
Macleod de SPSC (Scottish Palestine Solidarity Campaign) et les 
italiens de : « Coalitione contro l’Agrexco », Carlo Tombola (TRANSARMS 
EUROPE), Alfredo Tradardi (ISM), Diana Larminati (ISM). A la réunion du 
lendemain on a jeté les bases de la construction d’une coordination 
Européenne contre Agrexco. Quelques mois après le BNC ouvrait sur son 
site (
www.bds.movement.net) une page spéciale pour la Campagne contre Agrexco (
http://www.bdsmovement.net/activecamps/agrexco). La CCA
[17] a pris l’initiative du Forum Européen des campagnes contre Agrexco (
[18])
 en lien avec tous nos contacts européens et bien sûr le BNC. Les 
personnes présentes au Forum on pu mesurer l’implication directe de la 
palestinienne Rafeef Ziadah, représentante du BNC et de Michael Daes, 
coordinateur du BNC pour l’Europe. Il-elle ont animé très activement 
ateliers, meeting etc. et directement contribué au succès du forum, à la
 création de la coordination Européenne contre Agrexco. Depuis, ils 
poursuivent ce travail au sein de la coordination européenne. Les 
interventions directe du BNC dans la lutte elle même ont été nombreuses,
 une dizaine en un peu plus de deux ans. La plupart du temps pour 
appuyer une initiative et ainsi la créditer du soutien palestinien.
- S’adresser à l’ensemble de la société civile : Réduire la cible et ouvrir toutes les « portes d’entrées » dans la coalition :
Parce que nous voulions gagner contre Agrexco et pas seulement 
dénoncer les agissements de cette entreprise il fallait mobiliser très 
au delà des associations de solidarité à la Palestine.
Pour rassembler le maximum d’organisations et d’individus il fallait 
réduire la cible et ouvrir ce que nous avons appelé « les 
portes d’entrées » dans la coalition. La cible c’est le refus d’Agrexco.
 Il suffit qu’une association partage un seul des arguments énoncés dans
 l’Appel initial de la Coalition contre Agrexco, pour y avoir sa place. 
Pour rassembler, l’Appel de la Coalition à l’image de celui du BNC se 
réfère aux valeurs et droits fondamentaux sur la base du droit 
international et non aux solutions politiques et institutionnelles. 
Ainsi la proposition d’inclure dans l’appel la revendication des deux 
états a été écartée. Elle aurait créé des clivages, fermé la porte à 
certaines associations mais surtout, parce elle remplaçait une cible 
concrète à portée de main (Agrexco) par une cible abstraite et hors de 
portée de notre action (un état palestinien).
A l’inverse nous avons encouragé l’expression des spécificités de 
l’engagement des uns et des autres, et considéré qu’il n’y avait pas de 
hiérarchie dans ces engagements. Chaque motif de refus d’Agrexco, ou de 
soutien aux Palestiniens fût-il partiel étant d’égale valeur. 
[19]
Ainsi les portes d’entrées dans la coalition étaient nombreuses et 
diversifiées : le BDS ; le respect du droit international ; le respect 
des droits humains, qui mobilise les associations des droits de l’homme 
ou des réfugiés ; mais aussi l’avenir des paysans dans le monde, 
l’emploi local des Sétois et l’emploi régional des paysans, les dégâts 
de l’agrobusiness, la sécurité et la souveraineté alimentaires, la 
nature des échanges commerciaux, l’environnement, la décroissance, 
l’écologie, le commerce éthique. Et la non violence, à la fois en tant 
que stratégie et méthode qui inspire toutes nos actions.
- Entrainer dans l’action la diversité des organisations 
signataires : Passer de la solidarité exogène à l’action directe  ici, 
contre Israël, ses représentants et ses complices.
Avant le BDS, dans le soutien à la Palestine et comme nous ne vivons 
pas la réalité des palestiniens on considérait que le problème était 
« là-bas » et on développait une solidarité qu’on peut qualifier 
d’exogène, c’est à dire apportée de l’extérieur pour des problèmes 
extérieurs aux nôtres (vol de terres, assassinats, Mur etc.). Les cibles
 étaient toujours « là-bas » à des milliers de km. « Ici », au mieux on 
dénonçait la complicité de notre gouvernement et/ou de l’UE.
La question s’est posée de comment allions-nous, non seulement 
sensibiliser mais entraîner dans l’action les organisations signataires 
et les pans entiers de la société civile favorables aux Palestiniens.  
Pour cela nous sommes partis, non pas des revendications des 
Palestiniens en vue de les faire partager par les organisations ici en 
France, ce qui est la démarche habituelle des associations de 
solidarité, mais à l’inverse nous sommes partis des campagnes, des 
actions, des luttes, des revendications menées par les organisations 
signataires ici, en essayant de voir ce qu’elles pouvaient avoir de 
commun avec celles des Palestiniens. Nous avons repéré et identifié les 
thématiques et surtout les VALEURS qui animent les luttes en France et 
nous avons invité les organisations à trouver dans ces valeurs, les 
raisons et les motifs de refus à l’installation d’Agrexco dans le port 
de Sète. Les organisations sont entrées en lutte contre Agrexco sur la 
base des valeurs qui portaient déjà ici leurs propres actions. En 
luttant contre Agrexco elles luttaient pour leurs propres 
revendications. Elles ne luttaient pas « pour » les palestiniens à des 
milliers de km, mais elles luttaient « avec » les Palestiniens malgré 
les milliers de km. 
L’appel BDS palestinien a commencé à transformer radicalement le 
mouvement de solidarité. La Campagne BDS marque la fin de la période 
idéologiquement contaminée par l’attentisme et les impasses des accords 
d’Oslo définitivement enterrés par la guerre contre Gaza.
La solidarité avec les Palestiniens passe désormais par la lutte 
active et ouverte, l’action directe, menée avec les Palestiniens, dans 
chacun de nos pays, contre toute présence, manifestation et expression 
de l’Etat d’Israël, de ses représentants et de ses complices. 
[1] PACBI : Campagne Palestinienne pour le boycott académique et culturel d’Israël
 
[2] PNGO : Réseau des ONG Palestiniennes
 
[3]
 Comme le lecteur l’aura deviné, cet article, est centré sur le boycott 
dit économique dans le domaine agroalimentaire, requalifié depuis 
l’appel palestinien de 2013 : « Contre le commerce avec les entreprises 
agroalimentaires israéliennes » (Cf. la brochure palestinienne : 
« Farming injustice » 
http://www.bdsmovement.net/activecamps/farming-injustice.)
 
PARC :Comités de soutien à l’agriculture palestinienne. Le PARC, 
historiquement proche de l’Autorité Palestinienne est l’ONG la plus 
importante dans le domaine agricole, 
http://www.pal-arc.org/
[5]
 Mehadrin, déjà concurent d’Agrexco a profité de la liquidation 
d’Agrexco dont il a pris la place de leader en Israël et dans 
l’exportation.
 
[8] Coopérative spécialisée dans la production et exportation de dattes (Vallée du Jourdain en particulier).
 
[12]
 En retour les succès du BDS, par effet boomerang reviennent en 
Palestine et accélèrent la pénétration des objectifs stratégiques de 
l’Appel dans le peuple palestinien réunifié.
 
[13] Le contenu de ce volet fondamental, développé dans d’autres articles du présent ouvrage ne sera pas davantage développé ici.
 
[14]
 Une mission spécifique est allée en Palestine enquêter sur Agrexco dans
 la Vallée du Jourdain, a rencontre les syndicats palestiniens et bien 
sûr le BNC. Egalement Who profits l’ONG israélienne.
 
[15] BNC : Comité National Palestinien du BDS
 
[16] « 8h pour la Palestine : Contre Agrexco et pour l’emploi » Maison des syndicats Montpellier.
 
[17] CCA : Coalition contre Agrexco.
 
[18] Forum européen des campagnes contre Agrexco, 4/5 juin 2011 Montpellier.
 
[19]
 Un an après sa création la Coalition contre Agrexco comptait 100 
organisations signataires dont 60% d’organisations nationales en France.