dimanche 18 avril 2010

Une parole d'un rare courage : Interview du journaliste israélien Gideon Levy

David CRONIN
Samedi 17 Avril 2010

Une parole d'un rare courage : Interview du journaliste israélien 
Gideon Levy 

Traduit par Isabelle Rousselot. Édité par Fausto Giudice 

Gideon Levy est une des rares voix courageuses qui s'élève dans des médias israéliens généralement prosternés devant la classe dirigeante. Depuis 1988, il alimente la rubrique "Twilight Zone" (Zone grise) pour le quotidien israélien Haaretz, informant sans répit des multiples cruautés infligées au peuple palestinien sous occupation. Dans son nouveau livre Gaza: Articles pour Haaretz, 2006-2009 qui vient d'être publié par les éditions La Fabrique, Levy émet des opinions qui, de son propre aveu, sont considérées comme "insensées" par la plupart de ses compatriotes. David Cronin s'est entretenu avec Gideon Levy sur son itinéraire et sur le  journalisme.

David Cronin : Vous êtes né à Tel Aviv dans les années 1950. Vos parents sont-ils des survivants de l'Holocauste ?  

Gideon Levy : Ils ne sont pas des survivants de l'Holocauste, ils ont juste quitté l'Europe en 1939. Mon père était originaire d'Allemagne, ma mère tchèque. Tous les deux étaient des réfugiés typiques car mon père est arrivé illégalement sur un bateau qui a été bloqué pendant 6 mois à Beyrouth par les Britanniques et c'est seulement après encore 6 mois passés en mer qu'il a pu débarquer en Palestine. Ma mère est arrivée dans le cadre d’un programme de l’ONG Save the Children (Sauveons les enfants).. Elle est venue sans ses parents et s'est rendue directement dans un kibboutz.  

Mon père a toujours dit qu'il n'avait jamais trouvé sa place en Israël. Il y a vécu pendant 60 ans mais sa vie était détruite. Il a un doctorat en droit mais n'a jamais exercé en Israël. Il n'a jamais vraiment parlé l'hébreu correctement. Je pense qu'il a été vraiment traumatisé toute sa vie.  

En même temps, il n'a jamais voulu retourner en Europe même en simple visiteur. Il était originaire des Sudètes qui sont devenues tchécoslovaques. Tous les Allemands en ont été expulsés.  

DG : De quelle manière l'histoire de vos parents vous a-t-elle affecté durant votre enfance et adolescence ?

GL : J'étais un immigrant type de la première génération. Quand ma mère me parlait en allemand, j'avais grand honte car elle me parlait dans une langue étrangère. Son prénom était Théa ; je l'ai toujours appelé Léa. Théa est un nom grec issu de la mythologie. C'est un prénom magnifique mais quand j'étais enfant, j'ai toujours dit Léa pour couvrir le fait qu'ils étaient immigrants.  

Le nom de ma famille était Loewy et pendant de nombreuses années, on m'a appelé Loewy. Puis j'en ai changé pour Levy et maintenant je le regrette beaucoup.
 
DC : Parlez-moi de votre service militaire dans l'armée israélienne.  

GL : J'ai fait mon service militaire dans la station de radio de l'armée. J'ai toujours été un bon petit gars de Tel Aviv, j'avais une vision très traditionnelle, je n'ai pas grandi dans une maison où on parlait politique.  

J'étais dans cette station de radio pendant quatre ans au lieu de trois (la durée standard du service militaire) mais la quatrième année en tant que civil. C'est une station de radio très populaire, elle est financée par l'armée mais elle est entièrement civile.  

Je n'avais pas du tout conscience de ce qu'était l'occupation. C'était un mot que je n'osais pas prononcer. J'étais un produit typique du système d'endoctrinement israélien, je ne posais pas de question et je n'avais pas de doute. J'avais une grande fierté nationale, je pensais que nous étions les meilleurs.  

Je me souviens de ma première visite dans les territoires occupés (la Cisjordanie et la bande de Gaza). Je ressentais beaucoup d'émotions nationales en visitant la tombe de Rachel et la mosquée à Hébron. Je n'ai vu aucun Palestinien à ce moment-là. Je me souviens juste des draps blancs sur les terrasses. J'étais même convaincu qu'ils étaient heureux que nous les ayons vaincus, qu'ils étaient reconnaissants que nous ayons libéré les Palestiniens du régime jordanien.  

DC : Quel a été le tournant qui vous a amené à critiquer l'occupation ?  

GL : Il n'y a pas eu de moment décisif. Ça a été un processus progressif. Ça a commencé quand je me suis mis à voyager dans les territoires occupés en tant que journaliste pour Haaretz. Ce n'est pas comme si j'avais décidé un jour "je dois couvrir l'occupation". Non, pas du tout. J'ai été attiré progressivement comme un papillon par le feu ou par une lumière.

 

Mes opinions politiques se sont forgées au cours des années. Ce n'est pas comme si j'avais changé en un jour. Ça a vraiment été un processus progressif lors duquel j'ai réalisé l'importance du drame : le sionisme, l'occupation. Et en même temps, j'ai réalisé qu'il n'y avait personne pour le dire aux Israéliens. Je ramenais très souvent des récits en exclusivité car presque aucun d'autre (journaliste israélien) n’était présent. Durant la première Intifada (palestinienne), il y avait un certain intérêt dans les médias israéliens. Mais entre la première Intifada et la seconde Intifada, je me suis vraiment retrouvé tout seul à couvrir le côté palestinien.  

DC : Avez-vous complètement rejeté le sionisme ?
 
GL : Le sionisme a plusieurs significations. Bien entendu, le concept le plus courant du sionisme comprend l'occupation, comprend la perception que les Juifs ont plus de droits en Palestine que n'importe qui d'autre, que le peuple juif est le peuple élu, qu'il ne peut pas y avoir d'égalité entre les Juifs et les Arabes, entre les Juifs et les Palestiniens. Je ne peux pas partager toutes ces croyances qui sont fondamentales dans le sionisme d'aujourd'hui. En ce sens, je peux me définir comme anti-sioniste.
 
D'un autre côté, la croyance selon laquelle le peuple juif a le droit de vivre en Palestine, côte à côte avec les Palestiniens, en faisant tout ce qui possible pour dédommager les Palestiniens de la terrible tragédie qu'ils ont du traverser en 1948, cela peut également être appelé la croyance sioniste. Dans ce cas, je partage cette vision.
 
DC : Si quelqu'un vous considérait comme sioniste modéré, y verriez vous une objection ?  

GL : Les sionistes modérés sont comme la gauche sioniste en Israël, que je ne peux pas supporter. Comme Meretz et Peace Now par exemple, qui ne sont pas prêts à ouvrir les "dossiers de 1948" et à comprendre que tant nous n'aurons pas résolu ce point, rien ne pourra fonctionner. Ceux-là sont les sionistes modérés. Dans ce cas, je préfère encore la droite.  

DC : La droite est plus honnête ?  

GL : Exactement.  

DC : En tant que juif israélien, avez-vous rencontré de l'hostilité de la part des Palestiniens pendant votre travail dans les territoires occupés palestiniens ?  

GL : Jamais. Et c'est le plus incroyable. Je les ai parcourus pendant 25 ans. J'ai été sur la scène des plus grosses tragédies un jour après qu'elles s’étaient produites. Il y avait des gens qui avaient perdu cinq enfants d’un coup, même sept enfants une fois.

J'étais toujours là-bas le matin après l'événement et j'aurais compris qu'ils me disent : "Écoutez, nous ne voulons pas parler à un Israélien, partez." Non, il y avait toujours une ouverture pour raconter. Il y avait cette croyance naïve, cet espoir que s'ils le racontaient aux Israéliens à travers moi, les Israéliens changeraient, qu'un récit dans les médias israéliens pourrait peut-être les aider.  

Ils ne savent pas qui je suis. Le peuple n'a jamais entendu parler de moi : ce n'est pas comme si j'avais un nom là-bas. La seule fois où on a tiré sur notre voiture, c'était des soldats israéliens. C'était durant l'été 2003. Nous nous déplacions dans un taxi avec une plaque jaune, un taxi israélien, blindé sinon je ne serais plus là aujourd'hui. Il était clair que c'était un taxi israélien. Nous suivions une instruction de couvre-feu. Un officier nous a dit : "Vous pouvez passer par cette route". Et quand nous nous sommes engagés sur cette route, ils nous ont tiré dessus. Je ne pense pas qu'ils savaient qui nous étions. Ils nous tiraient dessus comme ils auraient tiré sur n'importe qui. Ils avaient la gâchette facile comme ils l'ont toujours. C'était comme fumer une cigarette. Ils n'ont pas tiré qu'une balle. La voiture était remplie de balles.
 
DC : Etes-vous allé à Gaza récemment ?

GL : On m'a empêché d'y aller. La dernière fois que j'y suis allé, c'était en novembre 2006. Comme je l'ai mentionné dans l'avant-propos de mon livre, je suis allé voir le jardin d’enfants Indira Gandhi à Gaza le jour après qu'une puéricultrice (Najwa Khalif), eut été tuée devant tous ses petits élèves (par un missile israélien). Quand je suis arrivé, ils retiraient les cadavres, il y avait un avion dans le ciel et un char au sol. Je suis juste allé aux funérailles de la puéricultrice. Cet jardin d’enfants s'appelait Indira Gandhi pas parce qu'Indira Gandhi (le Premier ministre indien assassiné) s'y était impliquée mais parce que la propriétaire de ce jardin d’enfants avait reçu le nom d'Indira Gandhi par admiration pour Indira Gandhi.  

DC : Vous avez souvent mentionné combien vous appréciez de jouir d'une complète liberté pour écrire ce que vous vouliez. Mais n'avez-vous pas l'impression que la vie devient de plus en plus difficile pour les gens qui sont critiques envers Israël et que le gouvernement essaie activement de réprimer la contestation ?  

GL : Pour moi personnellement, en écrivant pour Haaretz et en passant à la TV, cela ne m'a pas fait gagner plus de liberté. Aujourd'hui je passe chaque semaine à la TV israélienne dans un programme de débats. Il y a eu des périodes pendant lesquelles il fallait être plus prudent, il y a eu des périodes pendant lesquelles les mots « crimes de guerre » étaient illégaux, même pour Haaretz. Aujourd'hui, ces mots sont partout et je suis totalement, totalement libre. Aucune pression du gouvernement ou de l'armée, rien.  

Mais bien sûr, cette dernière année il y a eu de vraies fêlures dans le système démocratique d'Israël. Les autorités ont essayé d'empêcher les manifestants de se rendre à Bilin (un village de Cisjordanie, la scène de protestations fréquentes contre le mur construit par Israël). Mais il y a également un processus de délégitimation de toutes sortes de groupes et d'organisations non gouvernementales, pour réellement faire taire toutes ces voix. Ce n'est pas occasionnel, c'est systématique. Les choses deviennent bien plus difficiles. Ils l'ont fait à Breaking the Silence  (« Briser le silence ») (un groupe de soldats critiques de l'occupation) de manière tout à fait cruelle mais très efficace. "Briser le silence" ne peut plus manifester sa contestation. Et ils l'ont fait à beaucoup d'autres organisations, comme ISM, le Mouvement de Solidarité Internationale, qui est considéré comme un ennemi en Israël.
 
DC : Avez-vous rencontré Rachel Corrie, militante pour la paix Usaméricaine tuée par un bulldozer israélien il y a sept ans ?  

GL : Je ne l'ai jamais rencontrée, malheureusement. J'ai juste regardé le film qui lui a été consacré, la semaine dernière. Rachel, James Miller et Tom Hurndall ont tous été tués sur une période de six à sept semaines, l'un après l'autre, au même endroit, plus ou moins, à Gaza. Il est clair que c'était un message.

DC : Que pensez-vous de la décision de ses parents d'intenter un procès à l'État d'Israël pour sa mort ?  
GL : Excellent. Je les ai vu tous les deux quand ils étaient en Israël. Ils sont tellement nobles. Ils parlent de la tragédie du soldat qui a tué leur fille, en disant que c'est aussi une victime. Et ils sont tellement délicats. J'admire la façon dont ils gèrent cela et j'espère qu'ils vont gagner. Ils méritent un dédommagement, des excuses, quelque chose. Leur fille a été assassinée.  

J'ai participé à un film au sujet de James Miller, un documentaire de la BBC. L'histoire de James Miller est encore plus bouleversante. Il y a eu un vrai meurtre. Ils savaient qu'il était journaliste, il était photographe, sur sa veste était écrit « Presse ». Il était clair que c'était un journaliste. Et ils lui ont juste tiré dessus.
 
DC : Que pensez-vous du soi-disant affront d'Israël envers les USA quand a été annoncée la construction de nouvelles colonies à Jérusalem-Est pendant la visite au Moyen-Orient du vice-président US, Joe Biden ?  

GL : Je pense vraiment qu'il est trop tôt pour en juger. Quelque chose se prépare. C'est certain qu'il y a un changement dans l'atmosphère. Il est certain que Netanyahou (le Premier ministre israélien) transpire. Et la question est : est-ce que les Usaméricains ont un programme clair ?
 
Une chose est claire : Israël n'a jamais été aussi dépendant des USA qu'aujourd'hui. Jusqu'à maintenant, (Barack) Obama a fait toutes les erreurs qu'il est possible de faire. Sa première année a été un gâchis. Mais pourtant nous devons leur donner (aux Usaméricains) une chance car il est certain qu'il y a un changement de ton. Mais j'ai peur que leur but principal soit de se débarrasser de Netanyahou. Et si c'est le cas, cela ne va nous mener à rien. Avec la personne qui le remplacera, ce sera plus ou moins la même, juste en plus gentil. Et ce sera à nouveau cette mascarade du processus de paix, de belles occasions de faire des photos, de gentillesses qui ne mènent à rien. De ce point de vue, je préfère un gouvernement de droite. Au moins, avec eux, il n'y a pas de surprise.
 
DC : L'Espagne, l'actuelle détentrice de la présidence tournante de l'Union Européenne, semble désireuse de renforcer les relations de l'Europe avec Israël. Quel signal enverrait une plus grande intégration d'Israël dans le programme politique et économique de l'E.U. ?  

GL : Je pense qu'il serait honteux de récompenser Israël aujourd'hui. La récompenser pour quoi ? Pour construire plus de colonies ? Mais je pense également que l'Europe suivra les changements à Washington comme elle suit presque aveuglément, tout ce que font les Usaméricains.
 
DC : Il y a eu une controverse mineure récemment sur le fait qu'Ethan Bronner, le correspondant du New York Times à Jérusalem, a un fils dans l'armée israélienne. Avez-vous aussi un enfant dans l'armée et pensez-vous que, de ce fait, Bronner ait été compromis par cette affaire ?
 
GL : Mon fils sert dans l'armée. Mon fils ne sert pas dans les territoires mais je me suis toujours déconnecté de mes fils. Ils ont leurs vies propres et je n'ai pas essayé de les influencer.  
En ce qui concerne Ethan Bronner, c'est vraiment une question très délicate. Le fait qu'il y ait tant de journalistes juifs, de journalistes sionistes qui fassent des reportages pour leurs médias nationaux depuis le Moyen-Orient, est certainement un problème. D'un autre côté, je sais, de par ma propre expérience, que vous pouvez avoir un fils qui sert dans l'armée et être vous-même très critique. Je n'en ferai pas une raison suffisante pour lui interdire de couvrir le Moyen-Orient pour The New York Times, même si, je dois l'admettre, Il y a peu de possibilités que le correspondant du New York Times à Jérusalem soit quelqu'un dont le fils puisse servir dans les Brigades des martyrs d'Al-Aqsa (l'organisation de la résistance palestinienne), par exemple.

DC : Quel rôle peuvent jouer les journalistes pour essayer de parvenir à une solution juste et durable au conflit entre Israéliens et Palestiniens ?

GL : Le rôle historique que jouent les médias israéliens est énorme. Les médias israéliens, qui sont des médias libres, libres de censure, libres de pression gouvernementale ont déshumanisé les Palestiniens, les diabolisant. Sans la coopération des médias israéliens, l'occupation n'aurait pas duré si longtemps. Ils sont destructifs d'une façon que je ne peux même pas décrire. Ce n'est pas la Roumanie, ce n'est pas la Russie soviétique. C'est une démocratie libre, les médias peuvent jouer le rôle qu'ils veulent mais ils ont choisi de jouer ce rôle. Et quand on voit le flot d'informations : il est tellement unilatéral, il y a tellement de propagandes, de mensonges et d'ignorance. 

Plein succès pour l’Iran

Dimanche 18 Avril 2010
Nordine Mzalla

C’est au Centre international des conférences, situé au nord de Téhéran, que se tient, depuis hier matin, la conférence pour le désarmement nucléaire. En présence de plus de 40 pays représentés par des ministres ou des hauts responsables dans des secteurs spécifiques, l’Iran, pays hôte, anime le front de la protestation contre le fait accompli nucléaire militaire. Un rendez-vous qui remet un peu de vérité dans le débat, comme ce discours d’Ahmadinejad emprunt de modération et de responsabilité.

C’est le ministre iranien des Affaires étrangères, Mouchehir Moutaki, qui a prononcé l’allocution d’ouverture en rappelant la conjoncture faite de pressions et de menaces quant au programme nucléaire civil. Puis, ce fut bien entendu au charismatique président de la République islamique Mahmoud Ahmadinejad de prononcer un discours confirmant les grandes orientations de la politique iranienne en matière d’énergie nucléaire dans le monde. Il s’agit en fait d’un credo partagé par de nombreux Etats de différents continents et qui se résume sous ce slogan porté sur les affiches et autres banderoles annonçant l’événement : «Nuclear energy for all, nuclear weapons for none», ce qui signifie littéralement en français «pour une énergie nucléaire accessible à tous et des armes nucléaires pour personne». En effet, l’intransigeant chef d’Etat iranien qui refuse tout chantage sur la question a réitéré tout l’argumentaire qui justifie la position de Téhéran par rapport «aux mensonges des Etats-Unis et de ses alliés».

«Les paradoxes des Américains mis à nu»

Mettant en exergue le «déficit d’humanisme» de certains détenteurs de l’arme nucléaire et d’autres armes de destruction massive, Ahmadinejad rappelle les différents crimes exécutés ou orchestrés par les Américains et leurs alliés dans l’histoire contemporaine. Par une véritable synthèse des horreurs, d’Hiroshima aux massacres en cours en Afghanistan ou en Irak, l’orateur donne avec force détails des informations peu répandues telles que l’utilisation de déchets nucléaires en Irak par l’occupant ou le nombre affolant de têtes nucléaires pointées par la plus grande puissance du monde et visant des objectifs vitaux des pays ciblés. Certain d’une large approbation devant une audience attentive à ce récit sur les monstruosités de la menace nucléaire, le président iranien n’a pas eu de mal à prouver les contradictions flagrantes entre les discours des détenteurs de la bombe atomique qui veulent empêcher toute maîtrise de l’énergie nucléaire chez les pays non détenteurs de ces effrayantes armes et signataires du Traité de non-prolifération. Une opposition à des ambitions pacifiques tandis que ces fournisseurs en combustibles et technologie n’hésitent pas à appuyer le développement de l’atome chez des pays qui défient le TNP et possèdent l’arme atomique. Le leader iranien se pose alors la question : «Jusqu’à quand va-t-on laisser Israël ignorer le TNP ?» Et de marteler, après chaque démonstration sur l’hypocrisie occidentale, qu’«il faut dénucléariser le monde pour sécuriser l’humanité». S’adressant aux politiques américains et à leurs soutiens, il déclare solennellement en provoquant une vive émotion dans la salle : «L’ère de l’arme nucléaire est révolue, vous devez en finir avec les rêves de domination et de profit éternel de nos richesses que vous ont légués vos prédécesseurs et les jeter dans la poubelle de l’histoire.»

Réformer l’AIEA

Sur un plan plus pratique, le président iranien suggère de réformer en urgence l’AIEA, l’Agence internationale de l’énergie atomique, «utilisée, à l’instar du Conseil de sécurité de l’ONU, comme un outil de répression injuste au service des Américains». Il propose par exemple la suspension des membres qui détiennent l’arme atomique pour remettre de la logique dans le principe de promotion du nucléaire civil, ce qui devait être la réelle vocation de l’AIEA. «Un rôle qui a produit l’effet inverse ces dernières années et encouragé la course à l’armement tant le sentiment d’injustice et le déficit de crédibilité a été manifeste», ironise le tribun. Cependant, Ahmedinejad n’omettra pas de rappeler que son pays collabore étroitement avec l’AIEA malgré ses dysfonctionnements. Il évoque plus de 4 500 contrôles par an en plus de caméras braquées sur les installations. Une omniprésence qui n’a jamais permis de conclure avec des preuves sur une déviation du programme civil, comme l’a signifié Salehi Ali Akbar à la tête de l’organisation iranienne de l’énergie atomique : «L’AIEA a confirmé plus de 20 fois que notre programme n’est pas déviant.» C’est donc dans le sillage de cette critique constructive au sujet de la désinformation occidentale que les interventions des participants sont venues renforcer cette conviction que l’ordre établi en matière nucléaire ne peut rien garantir de bon pour la planète. Les ministres syrien, irakien, libanais et omanais des Affaires étrangères ainsi que bien d’autres intervenants ont abondé dans le sens d’une nécessaire prise en charge de la dénucléarisation sans attendre en instituant des mécanismes juridiques pour la rendre effective.

L’incontournable partage du nucléaire civil

Par-delà ce message contre le nucléaire militaire et autres armes non conventionnelles et de destruction massive, s’est affirmée lors des prises de parole des représentants des divers pays ayant engagé des programmes sur l’atome ou non la prise de conscience générale que le nucléaire civil et pacifique s’impose à l’échelle de la planète pour dépasser l’époque des énergies fossiles. A ce propos, le président iranien a été aussi explicite : «En raison de la pollution, du réchauffement climatique, du coût des énergies fossiles, de l’intérêt du nucléaire dans la médecine et de l’industrie, nous devons inévitablement nous tourner vers l’utilisation généralisée de cette énergie atomique.» Des propos qui expliquent le succès de cette réunion qui a réussi à rassembler tant de pays malgré une pernicieuse diabolisation permanente de l’Iran, œuvre des Etats-Unis et de leurs satellites inconditionnels. La conférence de Téhéran semble contredire une fois pour toutes la coupable théorie qui prétend que des pays sont plus responsables que d’autres, une théorie paternaliste entretenue par les Occidentaux. La suite des travaux aujourd’hui ici à Téhéran devrait confirmer ce succès iranien contre la propagande atlantiste qui piège un débat qui concerne toute l’humanité.

Le Jeune Indépendant/Algérie 

http://www.jeune-independant.net/pages/indexPolitique.htm  

http://www.alterinfo.net/Plein-succes-pour-l-Iran_a45128.html 

Les forces de l’occupation renforcent la “sécurité” autour de Naplouse et raflent un enseignant de Naplouse originaire de Gaza et des jeunes


Cisjordanie - 17-04-2010
Par Palestine Info 
Les forces de l’occupation israélienne ont renforcé leurs mesures de « sécurité » à tous les checkpoints qui encerclent Naplouse aujourd’hui, provoquant de longues files d’attente de Palestiniens à ces barrières.
D’après la population locale, les mesures de sécurité ont été renforcées pour permettre que l’escorte militaire hebdomadaire accompagne les fanatiques juifs qui vont prier à la tombe Nabi Yusuf, à l’est de Naplouse.
Les troupes d’occupation ont également détenu un professeur de l’université An-Najah de Naplouse, vendredi soir, à un barrage militaire installé à l’entrée d’Al-Khalil. Des témoins ont dit que les soldats ont emmenés Tarek Al-Najjar après avoir intercepté sa voiture à la barrière, ajoutant qu’il est originaire de la Bande de Gaza et vit avec sa famille à Naplouse.
Dans la même journée d’hier, les troupes ont également raflé 11 autres jeunes gens à Naplouse, Tubas, Bethléem et Al-Khalil ; neuf d’entre eux ont moins de 20 ans.
Toujours vendredi, des colons juifs de la colonie de Kadumim ont attaqué le village de Jinsafout, dans le district de Qalqiliya, et ont incendié deux véhicules civils.
Des colons avaient, la veille, pris d’assaut le village d’Huwwara, près de Naplouse, et écrit des insultes sur la mosquée principale du village, la mosquée Bilal.

Célébration de la journée du prisonnier : Hamas et Fatah en rangs serrés

Les mouvements rivaux Hamas et Fatah ont célébré hier, ensemble, dans la bande de Ghaza, la Journée du prisonnier palestinien, en réclamant la libération de plus de 7000 détenus dans les prisons israéliennes, au lendemain de la mort de l’un d’entre eux.
Devant les locaux de la Croix-Rouge à Ghaza, des familles de détenus et des militants internationaux ont observé une grève de la faim de 24 heures pour cette journée supervisée par un comité représentant les factions palestiniennes, notamment le Hamas et le Fatah, une première depuis la prise de contrôle de Ghaza par le Hamas en 2007. Le ministre de la Justice et des Prisonniers du gouvernement Hamas, Faraj Al Ghoul, a souligné la nécessité d’« unifier les efforts des mouvements palestiniens et du peuple pour soutenir la cause des prisonniers ». Le représentant du Fatah, Raafat Hamdouna, a affirmé que cette journée « doit permettre de mettre fin aux divisions (...) Il faut que nous mettions de côté tout ce qui peut nuire à notre unité ».
Dans un communiqué, le président palestinien, Mahmoud Abbas, a pour sa part souligné qu’« il ne pouvait y avoir de paix sans un règlement définitif de la question des prisonniers et la libération de tous les détenus palestiniens des prisons israéliennes ». « Le président Abbas salue tous les détenus dans les prisons israéliennes et leur promet, une nouvelle fois, ainsi qu’à notre peuple palestinien, que la question des prisonniers restera notre priorité », ajoute le communiqué.
Par R. I.
http://www.elwatan.com/Celebration-de-la-journee-du,156854 

Judaïsation AlQods: Musée du Temple, nouvelles synagogues et réserves naturelles

17/04/2010 
Des sources palestiniennes ont mis en garde contre un nouveau plan sioniste pour inaugurer le soi-disant "musée du Temple" en face du mur de Buraq (ou mur de lamentations selon leur appellation). Le musée sera plus grand que la sainte mosquée d'Al Aqsa et se situera à quelques mètres de la façade ouest de la mosquée.
Le plan sioniste comprend également l'inauguration d'une nouvelle synagogue qui sera baptisée "la fierté d'Israël".
Selon ces mêmes sources, les prochains plans israéliens dans la ville d'Al Qods mettront en danger la mosquée d'Al Aqsa, et ils seront plus dangereux que la synagogue de la Hourva (des ruines), inaugurée ces dernières semaines.
De plus, une autre synagogue baptisée "la Sainte Lumière" sera construite dans le quartier cheikh Jarrah d'ici 2014 sur les ruines de vingt maisons palestiniennes selon un décret sioniste, et une réserve naturelle remplacera des maisons de Palestiniens dans la région At Tour. Dans cette région, les autorités de l'occupation prétextent qu'une "rare espèce d'aigles vivent dans ce quartier, et que les maisons palestiniennes seront détruites pour assurer leur survie"!
Cette dernière décision menace plus de 3000 Palestiniens d'expulsion d'AlQods, au moment où les autorités sionistes ont empêché plus de 160 civils palestiniens résidents dans la ville sainte d'y accéder.
http://www.almanar.com.lb/NewsSite/NewsDetails.aspx?id=133817&language=fr

L'Iran dénonce le seul criminel atomique du monde et propose un désarmement

17/04/2010  
Le guide suprême de la République islamique, l'Ayatollah Sayed Ali Khamenei, a dénoncé, ce samedi, les "mensonges" des Etats-Unis, "seul criminel atomique du monde", qui accusent l'Iran de chercher à se doter de l'arme nucléaire.
Dans un message à la conférence internationale sur le désarmement nucléaire et la non-prolifération réunie pour deux jours à Téhéran, l'ayatollah Khamenei a affirmé que "seul le gouvernement américain a commis un crime nucléaire. Le seul criminel atomique du monde ment en se présentant lui-même comme opposé à la prolifération des armes nucléaires, alors qu'il n'a pris aucune mesure sérieuse dans ce domaine".
L'Ayatollah Sayed Khamenei, a par ailleurs réitéré, que l'utilisation des armes nucléaires est "interdite par l'islam" ("haram").  

AHMADINEJAD PROPOSE UN DESARMEMENT SOUS CONTROLE INTERNATIONAL
Peu après le discours de Sayed Khamenei, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a proposé la création d'un "organe international indépendant" pour "superviser le désarmement nucléaire et empêcher la prolifération".
Le président iranien a également proposé, à l'ouverture de cette conférence, que "les Etats ayant l'arme nucléaire, ceux l'ayant utilisée ou ceux ayant menacé de l'utiliser" soient "suspendus de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), et particulièrement les Etats-Unis".
"Un organe international indépendant, disposant de pleins pouvoirs donnés par l'Assemblée générale de l'ONU, devrait être créé pour planifier et superviser le désarmement nucléaire et empêcher la prolifération", a-t-il précisé.
M.Ahmadinejad a également appelé à une révision du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) "par les pays indépendants ne possédant pas d'armes nucléaires. La présence des pays possédant l'arme nucléaire, particulièrement les Etats-Unis, empêche l'élaboration d'un traité équitable".
Il a ajouté que le droit de veto des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, est "antidémocratique, injuste et inhumain".
Selon le président iranien, ce droit "devrait soit être annulé, soit, si certains insistent pour le conserver, être étendu à certains pays d'Amérique latine, d'Asie, d'Afrique et d'Europe afin de réduire ses effets négatifs".
La conférence doit discuter pendant deux jours du "désarmement nucléaire, de la non-prolifération et de l'utilisation de la technologie nucléaire à des fins pacifiques. 
Elle réunit huit chefs de diplomatie (Irak, Syrie, Liban, Oman, Arménie, Turkménistan, Centrafrique et Swaziland) ainsi que des vice-ministres de Russie, du Qatar, des Emirats arabes unis et un "assistant spécial du ministre chinois des Affaires étrangères", selon les Affaires étrangères.
Le président de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) Ekmeleddin Ihsanoglu et des représentants de l'AIEA et de l'ONU y sont également présents.

Après la crise avec Ankara, Les avions israéliens à la recherche d'autres cieux

17/04/2010  
Le quotidien israélien le Jérusalem Post a révélé que l'armée de l'air israélienne cherche des régions de survols en Europe et en Asie, et ce, après la détérioration des relations avec la Turquie.
Le quotidien a précisé que l'armée de l'air a renforcé ces dernières années les manœuvres militaires en raison du "danger iranien". Il a notamment cité l'an 2008, lorsque plus de 100 avions de combat F-16 et F-15 israéliens ont pris part à des manœuvres au-dessus de la Méditerranée orientale et la Grèce pour préparer l'armée à des attaques contre l'Iran.
Le ministère israélien de la guerre entend, dans ce sens, proroger un accord signé en 2006 avec la Roumanie, qui permet aux avions de chasse israéliens de survoler l'espace roumain.  
Le Jérusalem Post, a dans ce contexte, cité le survol à Budapest des deux avions espions israéliens le mois dernier. Selon ce quotidien, ce survol entre dans le cadre des manœuvres aériennes en Europe.
Sur la possibilité de l'ouverture du ciel turque devant les avions israéliens, une source militaire israélienne a affirmé que "le gouvernement actuel à Ankara est loin de permettre à nos avions de survoler la Turquie", ajoutant qu'"il n'y aurait pas de retour à la normale dans les relations avec la Turquie, comme dans le passé".
En fait, après l'offensive israélienne contre Gaza, les relations avec la Turquie se sont détériorées. En 2009, Ankara a annulé un exercice aérien auquel devaient participer des pilotes et des appareils de l’armée de l’air israélienne sur son territoire.
Les responsables turcs ont expliqué que cette décision avait été prise pour dénoncer l'offensive israélienne contre la bande de Gaza, qui a fait plus de 1 400 martyrs.

Les Etats-Unis prennent le problème des bébés à trois têtes très au sérieux

samedi 17 avril 2010 - 06h:09
William Blum 
Quand est-ce que ça a commencé, tous ces « Merci de patienter, nous allons donner suite à votre appel, nous faisons tout notre possible pour réduire votre attente » ?
Avec cette invention tout droit sortie de l’enfer, le répondeur téléphonique ? Toujours est-il que vous êtes là en train d’attendre depuis une éternité tandis que le service que vous tentez de joindre vous assure qu’ils font tout ce qui est humainement possible pour donner suite à votre appel. Décidément, nous vivons dans une société extrêmement serviable et attentionnée.
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La BBC a rapporté le mois dernier que les médecins de la ville irakienne de Falloujah signalent un taux élevé de malformations chez les nouveaux-nés et certains accusent les armes employées par les États-Unis lors des massacres de 2004 et les suivantes qui ont détruit la majeure partie de la ville. « Ce fut comme un séisme, » a déclaré un ingénieur local candidat à l’Assemblée nationale au Washington Post en 2005. « Après Hiroshima et Nagasaki, il y a eu Falloujah. » A présent, il paraît que les taux de malformations cardiaques chez les nouveaux nés est 13 fois supérieur qu’en Europe.
Le correspondant de la BBC a aussi vu dans la ville des enfants qui souffraient de paralysie ou de malformations au cerveau, et la photographie d’un enfant né avec trois têtes. Il a ajouté qu’il avait souvent entendu dire que les officiels de Falloujah décourageaient les femmes de faire des enfants. Un médecin de la ville a comparé le taux de mortalité actuel avec celui d’avant 2003. Avant, elle constatait un cas tous les deux mois. Aujourd’hui, elle constate plusieurs cas par jour. « J’ai vu des vidéos d’enfants nés avec un oeil au milieu du front, un nez au milieu du front » a-t-elle dit.
Un porte-parole de l’armée étasunienne, Michael Kilpatrick, a déclaré que l’armée prenait « très au sérieux » les affaires de santé publique, mais « qu’aucune étude n’avait révélé un problème d’environnement qui pourrait représenter un risque précis pour la santé. » (1)
On pourrait remplir des volumes entiers avec la liste des horreurs infligées à l’environnement et aux êtres humains par les États-Unis à Falloujah et en d’autres parties de l’Irak après sept ans de phosphore blanc, de bombes à neutrons, d’armes au laser, d’armes à faisceaux d’énergie, d’armes à micro-ondes et autres merveilles technologiques de l’arsenal de science-fiction du Pentagone. La liste des abominations et manières grotesques de mourir est longue et la cruauté gratuite de la politique américaine choquante.
Au mois de novembre 2004, l’armée US a attaqué l’hôpital de Falloujah « parce que les militaires croyaient que l’hôpital était à l’origine des rumeurs qui faisaient état de nombreuses victimes. » (2) Voilà qui vaut largement la fameuse phrase prononcée au cours d’une autre glorieuse guerre américaine, au Vietnam : « nous avons détruit la ville pour la sauver. »
Comment réagir face à un comportement aussi bestial ? (Et tout ce qui précède ne fait qu’effleurer la réalité de la politique internationale des États-Unis) C’est à cet effet que la Cour Pénale Internationale (CPI) fut créée à Rome en 1998 (entrée en fonction le 1er juillet 2002) sous l’égide des Nations Unies. La Cour est domiciliée à La Haye, aux Pays Bas, pour enquêter et inculper des individus, mais pas des états, pour « crime de génocide ; crime contre l’humanité, crime de guerre ; ou crime d’agression. » (Article 5 des statuts de Rome). Depuis le début, les États-Unis ont refusé d’adhérer à la CPI et n’ont jamais ratifié les statuts parce que la CPI pourrait abuser de ses pouvoirs et inculper des citoyens Américains de manière « désinvolte ».
Les autorités américaines étaient si préoccupées par cette éventualité qu’elles ont fait le tour du monde en employant des menaces et la corruption pour convaincre des pays à signer avec les Etats-Unis des accords bilatéraux qui stipulent que des citoyens américains accusés de crimes de guerre ne seraient pas extradés vers la CPI. A ce jour, plus de 100 gouvernements on accepté de signer sous la pression. En 2002, le Congrès US, sous l’administration Bush, a adopté une loi de « protection des soldats américains en service » qui exige d’« obtenir la libération de tout soldat américain ou allié détenu ou emprisonné par (...) la Cour Pénale Internationale (...) par tous les moyens nécessaires et appropriés. » Au Pays-Bas, par dérision, cette loi est appelée la loi « d’invasion militaire de la Haye » (3) Cette loi est toujours en vigueur.
Les officiels américains ont souvent exprimé leurs craintes devant les inculpations « désinvoltes » - c’est-à-dire des soldats, sous-traitants civils ou militaires, ou d’anciens officiels qui se verraient inculpés pour des motifs politiques -, mais il ne fait aucun doute que leur réelle préoccupation concerne les inculpations « sérieuses », pour des motifs concrets. Cela dit, ils n’ont pas vraiment de souci à se faire car le mythe de « l’Amérique vertueuse » est vivant auprès de la Cour Pénale Internationale tout comme il l’est auprès de la plupart des organisations internationales et même chez la majorité de la population de la planète.
La Cour Pénale Internationale, dans ses premières années sous le Procureur en Chef Luis Moreno-Ocampo, un Argentin, a rejeté plusieurs centaines de plaintes pour crimes de guerre portées contre les États-Unis, dont 240 relatives à la guerre en Irak. Les plaintes ont été rejetées pour cause de manque de preuves, d’absence de juridiction, ou parce que les États-Unis avaient la capacité d’effectuer eux-mêmes leurs propres enquêtes et procès. Mais le fait que les États-Unis n’ont jamais procédé à de telles enquêtes ou procès n’a pas l’air d’avoir marqué plus que ça les esprits des juges de la CPI.
L’ « absence de juridiction » signifie que les États-Unis n’ont pas signé l’accord. Ce qui paraît plutôt étrange. Ainsi donc, les états seraient libres de commettre des crimes de guerres s’ils n’ont pas signé le traité qui interdit les crimes de guerre ? Hum... Voilà qui ouvre un vaste champ de possibilités.
Selon une étude du Congrès des Etats-Unis et publiée au mois d’aout 2006, le procureur général de la CPI a démontré des « réticences à enquêter sur les États-Unis » suite à des accusations sur leur comportement en Irak. (4)Sic transit gloria CPI...
Pour ce qui concerne le crime d’agression, les statuts de la Cour précisent qu’elle « exercera sa juridiction sur le crime d’agression lorsque ... la définition d’un tel crime sera précisée, ainsi que les conditions dans lesquelles la Cour pourra exercer sa juridiction sur ce crime. » Autrement dit, le crime d’agression échappera à la juridiction de la Cour Pénale Internationale tant que le terme « agression » n’aura pas été précisé. Diana Johnstone a écrit que « Cet argument est spécieux dans la mesure ou la notion d’agression a déjà été clairement définie par la résolution 3314 de l’Assemblée Générale des Nations Unies en 1974, qui précise que « l’agression est le recours à la force armée par un état contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un état tiers », et donne une liste de sept exemples précis, » dont :
-  « l’invasion ou l’attaque par des forces armées d’un état contre le territoire d’un autre état, ou toute occupation militaire, même temporaire, résultant d’une telle attaque ou invasion, ou toute annexion par la force d’un territoire ou partie de territoire d’un autre état ; et
-  le bombardement par des forces armées d’un état contre le territoire d’un autre état ou l’emploi de toute arme contre le territoire d’un autre état.
La résolution de l’ONU a aussi précisé qu’« aucune considération de quelque nature qu’elle soit, politique, économique, militaire ou autre, ne peut servir de justification à une agression. »
En réalité, si l’agression échappe à la juridiction de la CPI, c’est parce que les États-Unis, qui ont joué un rôle important dans l’élaboration de ses statuts avant de finalement refuser de les ratifier, y sont fermement opposés. On comprend pourquoi. On peut noter aussi que les cas « d’agressions » sont plus faciles à identifier, puisqu’ils sont purement factuels, que les cas de « génocides » qui présupposent une volonté délibérée. (5)
Au mois de mai (2010) se tiendra une conférence de la CPI à Kampala, en Ouganda, et la question de la définition d’« agression » y sera abordée. Les États-Unis sont préoccupés par cette conférence. Voici ce qu’a dit Stephen J. Rapp, Ambassadeur itinérant sur les Crimes de Guerre, lors d’une intervention devant l’assemblée des pays membres de la CPI (111 pays ont signé à ce jour) à la Haye, le 19 novembre (2009) dernier :
« Je me dois de vous faire part de notre préoccupation quant à la question en suspens devant cet organisme et à laquelle nous attachons beaucoup d’importance : la définition du crime d’agression, qui doit être abordée à la conférence de Kampala l’année prochaine. La position des États-Unis sur les crimes d’agression est bien connue, et prend en compte le rôle et la responsabilité spécifiques qui ont été attribués au Conseil de Sécurité par la Charte des Nations Unies dans le cas d’une agression ou la menace d’une agression. Les États-Unis ont aussi des préoccupations quant à la définition proposée et sa formulation. Nous pensons depuis toujours que si les statuts de Rome devaient être amendés pour inclure une définition du crime d’agression, alors la juridiction ne saurait être précisée avant que le Conseil de Sécurité n’ait déterminé si une agression a bien été commise ou non. »
Vous voyez où M. Rapp veut en venir, n’est-ce pas ? Il dit que c’est le Conseil de Sécurité des Nations Unies qui devrait décider si une agression a bien été commise ou non. Ce même organisme où les États-Unis ont un droit de veto.
La raison principale pour laquelle les États-Unis ont décidé de participer à la conférence est probablement pour empêcher l’adoption d’une définition de l’agression qui pourrait s’appliquer à la politique étrangère des États-Unis. Et si les États-Unis assistent à cette conférence, leur présence sera probablement présentée comme un exemple de plus du changement qui s’est produit dans la politique étrangère des Etats-Unis sous Obama. Mais comme avec pratiquement tous ces exemples, il ne s’agit que de propagande.
C’est comme pour la couverture du magazine Newsweek du 8 mars, où on pouvait lire en gros caractères « la Victoire, enfin : la naissance de la démocratie en Irak. » Avant même la récente farce électorale irakienne - où on a vu des candidats qui avaient remporté le scrutin se faire arrêter ou prendre la fuite (6) - si un tel titre avait fait la couverture de la Pravda ou des Izvestia (en URSS) pendant la guerre froide, les Américains seraient morts de rire.
Notes :
(1) BBC, March 4, 2010 ; Washington Post, December 3, 2005
(2) New York Times, November 8, 2004
(3) Christian Science Monitor, February 13, 2009
(4) Washington Post, November 7, 2006
(5) Diana Johnstone, Counterpunch, January 27/28, 2007
(6) Washington Post, April 2, 2010
Source : Le Grand Soir relayé par Michel Collon
Traduction partielle : VD pour Le Grand Soir

Bouffonneries impériales

samedi 17 avril 2010 - 08h:36
K. Selim - Le Quotidien d’Oran
Ne faites pas des discours, agissez !
Détrompez-vous, ce n’est pas une interpellation de plus de la « rue arabe » - ainsi appelée car n’ayant pas le droit d’exister en tant qu’opinion publique reconnue et dont les évolutions seraient mesurables à travers des sondages – en direction des dirigeants.
Cette « rue » a renoncé à leur demander quelque chose et elle est pleinement consciente que les rencontres, régulières, des dirigeants n’ont d’autre but que de cultiver l’illusion qu’il existe une institution panarabe. Ce n’est donc pas la rue qui interpelle nos dirigeants, mais la secrétaire d’Etat américaine aux Affaires étrangères, Mme Hillary Clinton. Elle les invite à « agir », à faire « progresser l’initiative de paix arabe avec des actes, et pas seulement des discours », et à cesser de menacer de la retirer quand il y a une « difficulté ». Voilà donc une première : la représentante qualifiée de l’hyperpuissance américaine constate, comme le font les populations de notre aire soumise, que les chefs d’Etat arabes aiment cultiver l’inaction.
Mais la « concordance de vues » entre Mme Clinton et les opinions arabes ne va pas plus loin, les deux ne demandant pas le même type d’action.
En réalité, le discours « franc » de Mme Clinton énonce un changement de la politique étasunienne. Depuis des décennies, ce que l’Empire exigeait - et obtenait - des Etats arabes, c’était de ne rien faire, de l’inaction. Et de s’en remettre à la diplomatie américaine pour résoudre le confit du Proche-Orient. Les Etats arabes et l’OLP, en entrant dans la supercherie d’Oslo, ont fait de la paix une « option stratégique » qui justifiait leur inaction. Depuis la conclusion des accords d’Oslo, la colonisation israélienne s’est étendue et la purification ethnique s’est accentuée.
Et alors qu’Israël a mené deux guerres ouvertes, contre le Liban et Ghaza, les dirigeants arabes ont continué à défendre leur « option stratégique » et donc à ne pas bouger le petit doigt. On a donc laissé le Liban et Ghaza se faire massacrer. La grande Egypte a décidé de créer un mur d’acier pour interdire aux Palestiniens de Ghaza de faire passer des marchandises par les tunnels.
Aujourd’hui, l’administration américaine n’exige plus de « l’inaction », elle veut de l’action. Eriger le tunnel d’acier en est une qu’elle a chaleureusement applaudie. Mais elle veut plus : que les avions d’El Al puissent utiliser l’espace aérien des Etats arabes, que l’on normalise sans attendre un Etat palestinien et sans doute que tous les « services » du monde arabe collaborent avec le Mossad. Et que Dubaï détruise les enregistrements des caméras de surveillance quand les agents israéliens viennent tuer.
Il y avait, ce jeudi, de l’impatience dans le propos de Mme Hillary Clinton. Elle veut un engagement plus poussé des Etats arabes qui ne doivent pas s’offusquer pour des petites broutilles israéliennes, comme l’expulsion annoncée de milliers de Palestiniens de Cisjordanie et la judaïsation au pas de charge d’El-Qods. Sur ces questions, Mme Clinton n’attend pas d’eux des actes, mais le silence !
Gageons qu’il n’y aura pas beaucoup de dirigeants arabes pour dire à la représentante de l’Empire qu’elle en fait trop. Sur l’Iran, les Etats-Unis sont autrement plus sérieux et essaient d’organiser une sainte alliance pour sanctionner, voire faire la guerre. Et ils demanderont, encore, aux Etats arabes de se mobiliser et « d’agir » contre la menace perse, alors que les territoires palestiniens se réduisent à une peau de chagrin.
La « rue arabe », silencieuse, observe ces bouffonneries et n’attend rien des dirigeants.

17 avril 2010 - Le Quotidien d’Oran - Editorial

70% de Gaza dans l’obscurité totale

dimanche 18 avril 2010 - 06h:57
The Palestine Telegraph
Walid Saad Sayel, ingénieur, a déclaré dans un communiqué de presse aujourd’hui : « La privation d’électricité pour les deux tiers de la population de Gaza est catastrophique, tous doivent prendre leurs responsabilités pour sauver les habitants de Gaza parce que sont des êtres humains avant tout, surtout quand leurs besoins en électricité sont aussi importants que leurs besoins en eau et en air. Nous sommes face à une catastrophe humanitaire grave dont seul Dieu peut connaître les conséquences ».
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Pour l’occupant israélien, tous les moyens sont bons pour rendre infernale la vie des 1,5 million habitants du ghetto de Gaza.
Sayel a expliqué que la compagnie d’électricité palestinienne faisait son maximum dans d’intenses négociations avec toutes les parties impliquées afin de surmonter les obstacles et remettre en route la centrale électrique de Gaza.
Il a également demandé à la communauté internationale et aux institutions de défense des droits de l’homme des Nations Unies, d’intervenir immédiatement et de faire pression sur l’Union européenne afin qu’elle reprenne son financement du carburant nécessaire à la centrale. Il demande également, afin d’éviter une catastrophe humanitaire, qu’Israël n’empêche pas la satisfaction des besoins de base des habitants.
Sayel a également appelé toutes les institutions internationales, les organisations humanitaires, les pays arabes et l’OCI [Organisation de la Conférence Islamique] de tout faire pour résoudre la crise de la production d’électricité dans Gaza, les avertissant des conséquences d’une fermeture complète de la centrale en raison de l’épuisement du combustible nécessaire.
L’administration de la centrale électrique a déclaré vendredi que quatre générateurs fermaient en raison du manque de carburant, bien que la centrale soit en état de fonctionner en pleine capacité de production.
Sayel a mis en garde sur les conditions de vie difficiles des habitants de la bande de Gaza en raison des continuelles coupures dans la fourniture d’électricité, suite à l’interdiction israélienne de laisser entrer le carburant necessaire et suffisant au fonctionnement de la seule centrale dans le territoire assiégé.
Cette situation pourrait conduire à une grave crise humanitaire dans la bande de Gaza, surtout à cause des difficultés vécues par les habitants de Gaza depuis 2006, année où Israël a bombardé la centrale électrique.
10 avril 2010 - The Palestine Telegraph - Vous pouvez consulter cet article à : http://www.paltelegraph.com/palesti...
Traduction : Info-Palestine.net

 http://info-palestine.net/article.php3?id_article=8553

Votez le désinvestissement : vous ne serez pas seuls

dimanche 18 avril 2010 - 07h:56
Judith Butler
The Nation 
Lutter contre la peur au nom de la justice sociale fait partie d’une longue et vénérable tradition juive ; elle n’est pas nationaliste, c’est vrai, et cette lutte est engagée non seulement pour ma liberté, mais pour l’ensemble de nos libertés.
Note de l’éditeur : le texte qui suit est celui du discours du Professeur Judith Butler, prononcé le mardi 13 avril devant les étudiants de l’université de Berkeley, Californie.
Le 18 mars, le conseil des étudiants de Berkeley avait voté à 16 contre 4 en faveur du désinvestissement des fonds de leur université dans les entreprises General Electric et United Technologies car celles-ci contribuent à infliger des souffrances à des civils par leur participation à l’occupation illégale israélienne, et même à l’agression contre Gaza. Une semaine plus tard, le président du conseil y opposait son veto. Les opposants à cette proposition engagèrent ensuite une campagne féroce de désinformation ; les membres du conseil des étudiants furent inondés de lettres, et Alan Dershowitz put alors venir sur le campus.
Pour plus d’informations sur le projet de résolution : http://salsa.democracyinaction.org/....
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J’ai appris, quand j’étais petite fille juive, dans ma synagogue, qu’il faut impérativement réagir contre toute injustice sociale.
Commençons en partant de l’idée qu’il est très difficile d’entendre le débat qui est le nôtre ici. On entend quelqu’un dire une chose, et on craint qu’il n’ait dit autre chose. Il est difficile de croire les mots, ou même de savoir ce que les mots veulent dire vraiment. C’est donc le signe qu’il existe une certaine crainte dans la salle et aussi, une certaine suspicion quant aux intentions des orateurs, et une crainte de ce qu’impliquent tant les mots que les actes. Bien sûr, ce soir vous n’avez pas besoin que je vous fasse un cours de rhétorique, mais peut-être que, si vous avez un instant, nous pourrions faire une pause et nous pencher sur ce qui est réellement en jeu dans ce vote, et sur ce qui ne l’est pas. Permettez-moi de me présenter d’abord. Je suis juive et je fais partie du corps des enseignants d’ici, à Berkeley, je suis membre aussi du conseil consultatif de la Voix juive pour la Paix, de la commission exécutive U.S. de la Faculté pour la Paix palestino-israélienne - une organisation internationale -, membre du Tribunal Russel pour les droits humains en Palestine, et membre du conseil d’administration du Théâtre de la Liberté de Jénine. Je travaille à un livre qui étudie les critiques juives contre la violence d’Etat, la vision des juifs de la cohabitation, et l’importance de la « mémoire » dans les traditions philosophiques et poétiques juives et palestiniennes.
Il n’y a pas UNE voix juive
Ce que je veux vous dire d’abord, c’est qu’on pourrait à peine faire une table de juifs dans ce pays - même en Europe et surtout en Israël - sans qu’il n’y ait un désaccord énorme entre eux sur le statut de l’occupation, de l’agression militaire israélienne et de l’avenir du sionisme, sur le binationalisme et la citoyenneté dans les territoires appelés Israël et Palestine. Il n’y a pas UNE voix juive, et ces dernières années on a même pu constater que les divergences grandissaient parmi nous, on le voit bien d’ailleurs avec la multiplication des organisations juives qui ne sont pas d’accord avec l’occupation, et qui critiquent et s’opposent activement à la politique militaire et à l’agression. Rien qu’aux U.S.A. et en Israël, vous avez : Voix juive pour la paix, Juifs américains pour une juste paix, Juifs contre l’occupation, Boycott de l’intérieur, New Profile, Les Anarchistes contre le mur, Les Femmes en noir, Qui profite ?, B’Tselem, Zochrot (Se souvenir), Black Laundry, Juifs pour une Palestine libre (zone Bay), Pas le temps de célébrer, et d’autres encore. La naissance de J Street témoigne d’un effort important pour créer une voix alternative à l’AIPAC, et bien que J Street se soit opposé au projet de résolution qui vous est soumis, la jeune génération de cette organisation a vivement contesté le choix de sa direction. Vous le voyez, même là il y a des fissures, des divisions et des désaccords.
Donc, si quelqu’un dit que c’est offenser les « juifs » que de s’opposer à l’occupation, vous devez alors rechercher combien il y a de juifs déjà contre l’occupation, et savoir si vous voulez être avec, ou contre eux. Si quelqu’un vous dit que les « juifs » s’expriment d’une seule voix sur cette question, vous pourrez rechercher où est l’erreur quand on imagine les juifs comme une force unique, une opinion unique, unanime. Car ce n’est pas vrai. Les organisateurs de la table ronde de lundi soir, à Hillel, ont fait en sorte qu’il n’y ait pas de voix discordantes. Et même maintenant, alors que les manifestations en Israël augmentent en nombre et en volume contre les saisies illégales des terres palestiniennes, il se forme une coalition qui monte avec tous ceux qui veulent s’opposer aux joug militaire injuste, à la confiscation illégale des terres, et qui sont attachés aux normes du droit international, même quand les nations refusent de respecter ces normes.
Se taire devant l’injustice est criminel
J’ai appris, quand j’étais petite fille juive, dans ma synagogue - qui n’était pas un bastion du radicalisme - qu’il faut impérativement réagir contre toute injustice sociale. On m’a dit d’avoir le courage de m’exprimer pour m’y opposer, de parler fort, même quand certains vous accusent de créer des fissures dans l’entente générale, même quand ils menacent de vous censurer et de vous punir. La pire injustice, ai-je appris, c’est de rester silencieux face à une injustice criminelle. Et cette tradition de l’éthique sociale juive a été capitale pour combattre le nazisme, le fascisme et toute forme de discrimination, et son importance devint essentielle dans la lutte pour l’élaboration des droits des réfugiés après la Seconde Guerre mondiale. Bien sûr, il n’existe pas d’analogies strictes entre le Seconde Guerre mondiale et la situation contemporaine, et il n’existe pas d’analogies strictes entre l’Afrique du Sud et Israël. Mais il existe un cadre général de réflexion sur la cohabitation, sur le droit de vivre libérés de toute agression militaire extérieure, sur les droits des réfugiés, et ceci constitue la base de nombreuses lois internationales que les juifs et les non-juifs ont voulu adopter afin de vivre dans un monde plus juste, non pas juste pour simplement telle ou telle nation, mais pour toutes les populations, sans distinction de nationalité et de citoyenneté. Si certains d’entre nous espèrent qu’Israël se conforme au droit international, c’est précisément pour qu’un peuple puisse vivre parmi les autres peuples, dans la paix et la liberté. Ce n’est pas délégitimer Israël que d’exiger qu’il se conforme au droit international. En effet, cette conformité au droit international est la meilleure façon d’obtenir une légitimité, le respect et une place durable parmi les peuples du monde.
Bien sûr, on pourrait débattre des formes politiques qu’Israël et la Palestine doivent prendre pour que le droit international soit respecté. Mais ce n’est pas la question qui vous est posée ce soir. Le temps ne nous manque pas pour examiner cette question, et je vous invite à vous joindre à moi pour le faire d’une façon lucide dans l’avenir. Mais pensez à ceci attentivement : le projet de résolution que avez devant vous ne vous demande pas de prendre position sur Israël. Je sais, c’est ce qu’il paraît faire depuis la discussion qui a porté sur cela. Mais le projet pose en fait deux questions qu’il est très important d’examiner. La première est simplement celle-ci : il y a deux entreprises qui non seulement ont investi dans l’occupation israélienne du territoire et du peuple palestiniens, mais encore qui profitent de cette occupation, et qui sont soutenues en partie par des fonds investis par l’université de Californie. Ces entreprises sont General Electric et United Technologies. Elles construisent des avions destinés à bombarder et à tuer, et qui ont bombardé et tué des civils, comme cela fut amplement démontré par Amnesty International et Human Rights Watch. Il vous est demandé de vous prononcer en faveur de votre désinvestissement de ces deux entreprises. PAS de retirer les fonds de toutes les entreprises qui travaillent avec Israël. Pas de vous résoudre à désinvestir de chez des hommes d’affaires ou des citoyens israéliens sur la base de leur citoyenneté ou de leur appartenance nationale. Ce qui vous est demandé, c’est seulement que vous appeliez au désinvestissement de ces entreprises-là, précisément, qui fabriquent des armes de guerre qui tuent des civils. C’est ça la vérité.
Désinvestissement : quel que soit le criminel, quelle que soit la victime
Si les journaux ou d’autres veulent tenir des propos incendiaires et dire qu’il s’agit là d’une attaque contre Israël, ou d’une attaque contre les juifs, ou d’une montée de l’antisémitisme, ou qu’il s’agit d’un acte affichant une insensibilité à l’égard des sentiments de certains de nos étudiants, alors, tel que je le vois, vous n’avez réellement qu’une seule réaction à avoir. Allons-nous nous laisser intimider et abandonner une position qui est juste ? Il est absolument immoral que des conseils universitaires investissent dans des entreprises quand elles tirent profit du meurtre de civils sous une occupation militaire prolongée manifestement illégale au regard du droit international. Le meurtre de civils est un crime de guerre. En votant oui, vous dites que vous ne voulez pas que l’argent de votre université soit investi dans des crimes de guerre, et que vous défendez ce principe quel que soit l’auteur des crimes de guerre et quelles qu’en soient les victimes.
Naturellement, vous devez clairement vous demander si vous appliqueriez les mêmes règles à n’importe quelle autre occupation ou situation militaire destructrice où sont commis des crimes de guerre. Et je note que le projet qui vous est présenté s’engage à élaborer une politique de désinvestissement de toute entreprise mêlée à des crimes de guerre. De sorte que le projet contient en lui-même une revendication universelle et une trajectoire universaliste. Il recommande explicitement « une politique de désinvestissements supplémentaires afin de maintenir les investissements de l’université hors des entreprises qui apportent leur soutien à des crimes de guerre à travers le monde, comme ceux qui furent commis au Maroc, au Congo, et en d’autres lieux comme précisés par les résolutions des Nations unies, et d’autres organisations importantes des droits de l’homme. » Ce n’est pas Israël qui est ciblé. En l’occurrence, c’est l’occupation qui est visée, et il y a de nombreux Israéliens à dire qu’Israël doit être distingué de son occupation illégale. C’est manifestement en cela que cet appel au désinvestissement est un appel sélectif : il n’appelle pas à se désinvestir de toutes les entreprises israéliennes ; au contraire, il appelle au désinvestissement de ces deux entreprises dont on connaît parfaitement les liens avec les crimes de guerre.
Alors, créons un précédent pour une politique plus solide d’investissements éthiques applicable à toutes les entreprises dans lesquelles les conseils d’universités investissent. C’est le début d’une séquence que les deux côtés à ce différend manifestement veulent. Israël n’est pas ciblé en tant que nation qu’il faut boycotter - notons d’ailleurs qu’Israël en tant qu’Etat n’est pas boycotté par la présente résolution. Mais l’occupation par Israël n’est pas pour autant dispensée des règles internationales. Si vous voulez dire que l’interprétation historique de la genèse d’Israël lui permet d’avoir une position exceptionnelle dans le monde, alors vous vous trouvez en désaccord avec ceux des premiers penseurs sionistes, Martin Buber et Judah Magnes entre autres, qui pensaient qu’Israël devait non seulement vivre à égalité avec les autres nations, mais devait aussi se montrer exemplaire quant aux principes d’égalité et de justice sociale, dans ses actes et dans sa politique. Rien dans l’histoire d’Israël ou celle du peuple juif n’autorise les crimes de guerre, et rien n’exige que nous réservions, le cas échéant, notre jugement sur les crimes de guerre. Nous pouvons débattre longuement de l’occupation, mais je ne suis pas sûre que nous pourrions en trouver la justification dans le droit international, ni de la privation de millions de personnes de leur droit à l’autodétermination, ni de l’absence de toute protection contre les harcèlements policiers et militaires et contre les destructions. Mais, encore une fois, nous pouvons avoir cette discussion, et nous n’avons pas besoin de la clore pour comprendre le choix spécifique que nous avons à faire. Vous n’êtes pas tenus de donner une opinion définitive sur l’occupation pour admettre qu’investir dans des entreprises qui commettent des crimes de guerre est une erreur complète et en le disant, vous rejoindrez les juifs, les musulmans, les hindous, les chrétiens et tant d’autres populations de diverses traditions religieuses et laïques qui pensent que la gouvernance, la justice et la paix exigent d’être conforme avec le droit international et les droits de l’homme et de s’opposer aux crimes de guerre. Ce que vous dites, c’est que vous refusez que notre argent parte dans des bombes, des hélicoptères et du matériel militaire qui anéantissent la vie de civils. Vous ne le voulez pas dans ce contexte, et vous ne le voulez dans aucun contexte.
Les juifs et le droit international
Une partie de moi-même aimerait faire une plaisanterie : où en seraient les droits de l’homme internationaux sans les juifs ! Nous avons contribué à l’élaboration de ces droits, à Nuremberg et aussi à Jérusalem, alors à quoi ça rime que certains vous disent que ce serait faire preuve d’insensibilité à l’égard des juifs que de se manifester en faveur du droit international et des droits de l’homme ? C’est un mensonge - et c’est une opinion monstrueuse à l’égard de ce que signifie être juif. Elle déshonore les traditions profondes de justice sociale apparues avec la lutte contre le fascisme et avec toutes celles contre le racisme : elle réduit à néant la tradition de Ta’ayush (Vivre ensemble), la relation éthique avec les non-juifs qui est la substance de l’éthique juive, et elle efface aussi la valeur qui est donnée à la vie, quelles que soient la religion ou la race de ceux qui vivent. Vous n’avez pas besoin de démontrer que la lutte contre cette occupation est la même que la lutte historique menée contre l’apartheid pour savoir que chaque lutte a sa propre dignité et sa propre valeur absolue, et que l’oppression, dans cette myriade de formes, n’a pas à être absolument identique pour être tout autant une faute. Entre nous, l’occupation et l’apartheid constituent deux versions différentes du colonialisme de peuplement, mais nul besoin pour nous d’une totale compréhension de cette convergence et divergence pour régler la question qui nous est posée aujourd’hui. Rien dans le projet qui vous est soumis ne dépend d’un caractère continu dans cette analogie. En votant pour cette résolution, vous vous mettez du côté des juifs progressistes, où qu’ils soient, et du côté des grands principes de la justice sociale, ce qui signifie que vous vous mettez du côté de ceux qui ne se contentent pas de défendre leur propre communauté, mais toute l’humanité, et qui le font, en partie, tant en raison des valeurs religieuses que non religieuses qui sont les leurs.
Enfin, laissez-moi dire ceci. Vous ressentez peut-être une peur en votant pour cette résolution. J’ai eu peur moi aussi en venant ici ce soir. Vous craignez peut-être de passer pour des antisémites, de ne pouvoir faire face à l’idée qu’on vous prenne pour quelqu’un d’indifférent à la nécessité d’Israël de se défendre, quelqu’un d’indifférent à l’histoire de la souffrance juive. Peut-être serait-il mieux de se rappeler les mots du Primo Levi (écrivain italien, Turin, 1919-1987) qui a survécu à cet internement tyrannique à Auschwitz et qui a eu le courage de s’opposer aux bombardements israéliens sur le sud du Liban au début des années 1980. Il a publiquement critiqué Menachem Begin qui ordonnait le bombardement des centres civils, et il a reçu des lettres qui lui demandaient s’il se souciait de tout le sang juif qui avait coulé. Il écrit :
« Je réponds que ce sang versé me fait mal, tout comme le sang versé de tout autre être humain. Mais il y a encore ces lettres déchirantes. Et j’étais tourmenté par ces lettres parce que je sais qu’Israël a été créé par des gens comme moi, qui ont seulement eu moins de chance que moi. Des hommes avec un numéro d’Auschwitz tatoué sur le bras, sans maison ni patrie, fuyant les horreurs de la Seconde Guerre mondiale, qui ont construit, dans Israël, une maison et une patrie. Je sais tout cela. Mais je sais aussi que c’est l’argument préféré de Begin pour sa défense. Et je nie tout bien-fondé à cette défense. »
Comme l’historien israélien Idith Zertal l’exprime clairement, on ne peut se servir de cette souffrance historique, la plus atroce, pour légitimer un caractère destructeur militaire ; ce serait un usage cruel et retors de l’histoire de la souffrance, pour justifier le malheur de la souffrance des autres.
Lutter contre la peur au nom de la justice sociale fait partie d’une longue et vénérable tradition juive ; elle n’est pas nationaliste, c’est vrai, et cette lutte est engagée non seulement pour ma liberté, mais pour l’ensemble de nos libertés. Alors, rappelons-nous qu’il n’y a pas UN juif, pas même en Israël, et que ceux qui disent cela ne cherchent qu’à vous intimider et à limiter votre force critique. En votant pour cette résolution, vous entrez dans un débat déjà ouvert, crucial pour que se concrétise la justice, une justice qui implique qu’on ait le courage de s’exprimer contre l’injustice, ce que j’ai appris lorsque j’étais enfant mais que chacune et chacun d’entre nous apprend, encore et encore. Je comprends que ce n’est pas facile de s’exprimer ainsi. Mais si vous vous battez contre l’incapacité de s’exprimer pour ce qui est juste, alors vous êtes en plein dans cette lutte contre l’oppression et pour la liberté, une lutte qui sait qu’il n’y a pas de liberté pour un s’il n’y a pas de liberté pour tous. Certains, sûrement, vous accuseront de haïr, mais peut-être ces accusations sont, elles, l’expression de la haine. Il ne s’agit pas de rentrer dans ce cycle de menace et de peur et de haine, c’est le cycle infernal de la guerre elle-même. Il s’agit de quitter le discours de guerre et d’affirmer ce qui est juste. Vous ne serez pas seuls. Vous parlerez à l’unisson des autres, et vous ferez en réalité un pas vers la réalisation de la paix et des principes de non violence et de cohabitation qui, seuls, peuvent servir de fondement à la paix. Vous aurez le soutien d’un mouvement qui grandit, dynamique, intergénérationnel et mondial, en vous exprimant contre l’anéantissement militaire de vies innocentes et contre les profits d’entreprises qui comptent sur ces destructions. Vous serez avec nous, et nous serons, plus que certainement, avec vous. (JPG)

Judith Butler est professeur de rhétorique et de philosophie à l’université Berkeley, Californie, USA.
Elle est signataire notamment de la déclaration « Rompre la loi du retour » israélienne
 ; de la déclaration de Toronto contre l’occupation ;
elle est membre du comité de parrainage du Tribunal Russel.
13 avril 2010 - The Nation - Sous-titrage et traduction : JPP