-Quel est le but de cette mission «Bienvenue en Palestine» ?
Il s’agit de répondre à un appel d’associations palestiniennes, dont de  nombreux comités de résistance populaire contre le Mur, les vols de  terre palestinienne, les expulsions de familles palestiniennes, la  destruction de villages entiers du Néguev.
Nos amis palestiniens nous ont dit : «Ce que vous faites en direction  de Ghaza est très bien. Mais la situation en Cisjordanie et à Jérusalem  est au moins aussi grave, avec non seulement des morts et des blessés  tous les jours, mais avec une colonisation galopante. Et pendant que les  projecteurs sont exclusivement tournés vers Ghaza, Israël en profite  pour mettre les bouchées doubles et nous chasser de nos terres, de nos  maisons, nous interdire l’accès à Jérusalem-Est, raser des villages  palestiniens sous prétexte de reboisement. Nous avons besoin de vous,  nous aussi».Et nous avons décidé de répondre présents à cet appel, afin  d’alerter l’opinion publique internationale, puisque nos gouvernements  ne font rien pour empêcher ce nettoyage ethnique. Nous allons montrer  aux Palestiniens qu’ils ne sont pas seuls, qu’ils ont raison de  continuer à résister.
-Comment est née l’idée de cette mission ?
Cette mission est née de l’expérience de ces comités populaires qui  invitent internationaux et opposants israéliens à les rejoindre dans  leur résistance non violente. Et ils ont choisi la date du 9 juillet  pour commencer ce séjour, parce que le 9 juin 2004, la Cour  internationale de justice de La Haye a jugé que le Mur est illégal, de  même que les colonies. Et un an plus tard, le 9 juillet 2005, voyant que  ce jugement n’était absolument pas pris en compte par les grandes  puissances ni par l’ONU, la société civile palestinienne a lancé un  appel à la société civile internationale pour lui demander d’agir. Et  pour beaucoup d’entre nous, ce n’est pas la première fois que nous nous  engageons concrètement pour la 
Palestine 
-Qui sont les participants ?
Nous sommes déjà plus de 500 personnes, âgées de 9 à 85 ans, de tous  les milieux, de plusieurs pays européens ainsi que des Etats-Unis. Des  gens normaux, avec des passeports valides, et ne transportant rien de  dangereux. Nous prenons une semaine sur nos vacances pour souligner que  la liberté de circulation est un droit et pour dire notre soutien à la  résistance extraordinaire du peuple palestinien. Nous avons tous été  marqués par les exemples récents des révolutions en Tunisie et en  Egypte, qui ont montré, de manière éclatante, que seule l’action  collective et déterminée peut faire bouger les lignes.
-Que fera la mission sur place ?
Du 9 au 16 juillet au soir, les participants à la mission se mêleront à  la vie des Palestiniens qui nous invitent, qui nous hébergeront et qui  nous montreront les privations de liberté dont ils souffrent, mais aussi  comment ils s’organisent pour résister aux agressions de l’armée  israélienne, des colons, et pour rester solidaires. Nous visiterons des  villes comme Jérusalem-Est, Bethléem et Hébron, mais aussi des villages  et des camps de réfugiés. Ce sont les Palestiniens qui s’occupent de ce  programme et de tous ses aspects logistiques de cette mission.
-N’avez-vous pas peur d’être refoulés à l’aéroport de Tel- Aviv ?
Je ne sais pas comment on s’y prend pour refouler plus de 500 personnes dans un aéroport.
Mais ce que nous savons, c’est qu’il est temps de refuser les pratiques  illégales, discriminatoires, humiliantes des autorités israéliennes à  l’aéroport de Tel-Aviv. Il y a, chaque jour, plusieurs personnes qui se  font refouler de manière parfaitement arbitraire, des dizaines d’autres  qui subissent des interrogatoires sans aucun rapport avec la sécurité,  et cela uniquement parce qu’ils sont suspectés d’avoir des sympathies  pour les Palestiniens.
Et si vous avez un nom à consonance arabe, c’est le barrage à coup sûr :  «Prénoms des grands-parents? Prénoms des arrière-grands-parents ?  Quelle est votre adresse e-mail ! Déshabillez-vous ! Signez cet  engagement à ne pas mettre les pieds dans les territoires palestiniens  au risque de passer deux ans de prison en Israël !» Et cela peut durer 7  à 8 heures, avec des policiers qui se relaient pour vous reposer ces  mêmes questions. L’objectif est, bien entendu, de dissuader un maximum  de gens dans le monde de venir apporter le moindre soutien, y compris  moral, aux Palestiniens. Mais jusqu’à quand pouvons-nous tolérer cela ?  Les territoires palestiniens sont occupés illégalement depuis plus de 40  ans.
Ils n’appartiennent pas à Israël. De quel droit nous empêcher d’y  entrer ? Si Israël n’avait pas détruit l’unique aéroport palestinien  construit avec les subventions européennes, c’est à dire avec notre  argent, nous n’aurions pas besoin de passer par Tel Aviv. Et si nous  sommes bloqués le vendredi 8 juillet, lors de notre arrivée à l’aéroport  Ben Gourion, nous comptons sur vous les médias pour protester, pour  faire entendre votre voix.
-Peut-on dire que cette mission est le pendant aérien de la flottille ?
Oui, en quelque sorte, mais c’est plus simple de prendre un billet  d’avion que d’acheter des bateaux, de les équiper et de prendre la mer.  Le trait commun, c’est qu’il s’agit, dans les deux cas, d’une initiative  de la société civile face à la non- assistance à un peuple en danger de  la part de nos dirigeants.Il n’y a pas de blocus affiché concernant la  Cisjordanie. C’est beaucoup plus sournois, mais cela revient au même. Il  n’y a pas plus de liberté de circulation. Les Palestiniens sont  emprisonnés entre des check points, des colonies et dans les prisons de  l’occupant.
Rémi Yacine
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