mercredi 28 avril 2010

Le Pentagone accuse la Syrie et l’Iran de livrer au Hezbollah des missiles de plus en plus sophistiqués

28/04/2010
L'affaire de la livraison présumée par la Syrie de missiles Scud ou d'armes sophistiquées au Hezbollah est depuis quelques jours au centre d'un vaste branle-bas politico-diplomatique qui se manifeste dans plus d'une capitale étrangère. Parallèlement aux contacts téléphoniques que le Premier ministre Saad Hariri a entrepris il y a quarante-huit heures avec plusieurs dirigeants européens, au lendemain de ses entretiens, samedi, à Beyrouth, avec le chef de la diplomatie égyptienne Ahmad Aboul-Gheit, l'escalade, pour l'heure verbale, enregistrée au sujet de l'armement croissant du Hezbollah a été au centre d'une réunion impromptue que M. Hariri a tenue à Charm el-Cheikh avec le président Hosni Moubarak. Dans le même temps, l'Union européenne lançait un appel à la retenue, tandis que M. Aboul-Gheit adressait à la secrétaire d'État Hilary Clinton un message dans lequel il exprime sa crainte d'une dégradation de la situation. Et d'une manière concomitante, le conseiller du président américain pour les Affaires de sécurité nationale et de lutte contre le terrorisme, John Brennan, tenait une série de réunions à Beyrouth, s'entretenant notamment avec le président Michel Sleiman.
Mais la mise en garde la plus ferme est venue hier de Washington, plus précisément du Pentagone, au terme de la réunion que le secrétaire à la Défense, Robert Gates, a tenue en soirée avec le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak.
Au cours d'un point de presse en présence de son homologue israélien, M. Gates a ainsi accusé la Syrie et l'Iran de livrer au Hezbollah des roquettes et des missiles de plus en plus sophistiqués. « La Syrie et l'Iran fournissent au Hezbollah des roquettes et des missiles aux capacités de plus en plus importantes, a-t-il déclaré. Nous sommes arrivés à un point où le Hezbollah a beaucoup plus de roquettes et de missiles que la plupart des gouvernements dans le monde, c'est évidemment déstabilisateur pour toute la région, et nous surveillons très attentivement la situation », a ajouté M. Gates. Il n'a toutefois pas confirmé l'existence de livraisons de missiles Scud au Hezbollah par Damas.
M. Barak a de son côté déclaré que « les Syriens ne cessent de soutenir le Hezbollah de manière très dommageable » et que ces derniers « fournissent au Hezbollah des systèmes d'armement susceptibles de perturber le fragile équilibre au Liban ». « Nous ne comptons pas provoquer de choc au Liban ou vis-à-vis de la Syrie », mais « nous regardons de près ces développements », a-t-il souligné, sans évoquer non plus nommément la livraison de missiles Scud.
M. Barak a par ailleurs salué les efforts de Washington pour obtenir de nouvelles sanctions à l'encontre de Téhéran. « Je pense que les États-Unis font la bonne chose », a-t-il assuré, en estimant que « l'heure est aux sanctions et à la diplomatie ». « Mais le temps nous dira si (les sanctions) sont vraiment efficaces », a-t-il conclu.
Alors que les relations israélo-américaines se sont tendues ces dernières semaines, en raison de la politique de colonisation juive à Jérusalem-Est, M. Gates a cru bon de souligner que les liens des deux pays en matière de sécurité étaient « inébranlables » et « plus forts que jamais ». M. Barak a quant à lui assuré que les rapports entre Israël et Washington étaient « indestructibles ».
De passage plus tôt au département d'État américain, M. Barak avait aussi remercié l'administration Obama pour son « approche lucide de ce qui doit être fait au Proche-Orient pour nous pousser tous ensemble vers la paix ».
La chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, a de son côté fait part de sa satisfaction hier après un entretien « très constructif » avec le ministre israélien de la Défense.

Feltman et Brennan
Pour en revenir à l'affaire des armes livrées au Hezbollah, le secrétaire d'État adjoint américain pour les Affaires du Proche-Orient, Jeffrey Feltman, a souligné, dans une interview à la chaîne satellitaire al-Jazira, que la livraison d'armes au Hezbollah est « une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité ». « Nous avons exprimé notre inquiétude directement aux Syriens au sujet de ces missiles, d'autant que cette question menace la paix et la stabilité dans la région, a déclaré M. Feltman. Nous pensons que la Syrie a fourni au Hezbollah des armes très sophistiquées, ce qui ne favorise pas la stabilité dans la région. »
Réaffirmant la nécessité d'aboutir à « une paix globale dans la région », M. Feltman a relevé « certains progrès positifs dans les relations américano-syriennes », se prononçant pour l'envoi de l'ambassadeur US à Damas « afin de souligner que notre objectif est la paix globale ». « Il existe certains points positifs (dans les rapports avec Damas), mais le problème réside dans la relation de la Syrie avec le Hezbollah et Hamas, et son appui au Hezbollah, en contradiction avec les résolutions du Conseil de sécurité ».
Mettant l'accent sur l'appui de Washington à l'indépendance du Liban, M. Feltman a déclaré que cet appui « n'est pas en contradiction avec l'établissement d'une relation positive avec la Syrie, dans le cadre de l'indépendance totale des deux pays ».
Notons par ailleurs que selon des sources diplomatiques citées par al-Markaziya, la visite à Beyrouth du conseiller du président US pour les Affaires de sécurité nationale et de lutte contre le terrorisme, M. Brennan, est liée au dossier du nucléaire iranien et au problème des livraisons accrues d'armes au Hezbollah, parallèlement à l'implantation de groupuscules terroristes dans certains camps palestiniens. L'ensemble de ce dossier a été évoqué par le président Sleiman avec M. Brennan.
Signalons enfin que l'Union européenne a appelé hier toutes les parties à « éviter toute provocation », après la polémique au sujet des missiles Scud que possèderait le Hezbollah. « L'UE s'inquiète des déclarations publiques qui ont été échangées récemment par diverses parties », a souligné la haute représentante aux Affaires étrangères, Catherine Ashton. Elles « vont à l'encontre des efforts de l'UE et de ses partenaires-clés » en faveur du processus de paix au Proche-Orient, souligne Mme Ashton. « L'UE appelle toutes les parties à éviter toute provocation et à avancer en direction d'une paix durable », a-t-elle déclaré.