jeudi 20 janvier 2011

Israël : virage à droite consommé

publié le mardi 18 janvier 2011
Renée-Anne Gutter

 
Ehoud Barak quitte les travaillistes et crée son propre parti, Ha’atzmaout.
Benjamin Netanyahou se frotte les mains : son gouvernement se stabilise. Certes, sa majorité parlementaire va se réduire de 74 députés à 66, sur les 120 que compte la Knesset. Mais elle sera désormais solidement ancrée à droite, homogène sur le plan nationaliste, libérée des incessantes menaces de scission des travaillistes.
Menaces qui fragilisaient le gouvernement et torpillaient, selon M. Netanyahou, toute chance d’accord avec les Palestiniens.
Ceux-ci ne pourront plus tabler sur la chute du gouvernement israélien pour faire avancer leur cause, se félicite-t-on dans l’entourage du Premier ministre. Cela a, en effet, été le coup de tonnerre lundi dans le ciel politique israélien.
Le ministre de la Défense, Ehud Barak, a annoncé qu’il quittait le parti travailliste. Avec quatre autres députés et ministres ex-travaillistes, il a créé une nouvelle formation : Ha’atzmaout ("l’Indépendance"), à vocation centre-droit. Les cinq devraient garder des fonctions substantielles au pouvoir. C’est du moins ce que leur aurait garanti le Premier ministre Netanyahou, à qui ils promettent de rester loyaux.
Mais pour ce qui reste du parti travailliste, c’est la débandade. Ses 13 députés et ministres ne se retrouvent plus qu’à 8. Ces derniers vont à présent quitter la coalition gouvernementale, se disant satisfaits d’être débarrassés du "fardeau" que représentait l’alliance Barak-Netanyahou, et promettant la reconstruction de leur propre parti sur ses bases d’origine, pacifistes et sociodémocrates. Mais les observateurs sont sceptiques. Car le parti reste divisé par des rivalités personnelles, manquant de leader fédérateur et ayant perdu toute crédibilité auprès du public.
La crise secouait déjà le parti travailliste depuis les législatives de février 2009 qui ont porté Benjamin Netanyahou au pouvoir. Non seulement parce que ces législatives avaient infligé un échec cuisant à ce parti fondateur de l’Etat d’Israël, le reléguant en quatrième place de l’éventail politique. Mais parce qu’à la colère de son aile gauche, Ehud Barak s’était empressé d’associer le parti au gouvernement nationaliste de Benjamin Netanyahou et s’est ensuite obstiné à l’y maintenir. La tension au sein du parti a atteint son comble, il y a quinze jours, lorsqu’il s’est avéré que l’administration Obama fulminait contre M. Barak. Elle estime que le chef travailliste l’a dupée durant un an, en faisant croire qu’il pourrait amener M. Netanyahou à faire la paix avec les Palestiniens.
A la surprise générale, c’est finalement M. Barak qui a claqué la porte, consommant son propre virage à droite et assénant, selon tous les commentateurs, le coup de grâce au parti travailliste. Cela ne devrait cependant pas marquer la fin de toute gauche en Israël. La mouvance gauche modérée, centre-gauche, est en train de se réveiller. Et cela, en réaction à diverses initiatives antidémocratiques lancées ces dernières semaines contre la minorité arabe israélienne, contre les pacifistes et contre les défenseurs des Droits de l’homme en Israël.
Samedi dernier, pour la première fois depuis longtemps, des milliers d’Israéliens sont descendus dans la rue à Tel Aviv pour manifester "contre le racisme et le maccarthysme qui envahissent le pa