Elise Barthet  
Il  l’a dit et répété : s’il ne s’oppose pas ouvertement à l’initiative, le  Quai d’Orsay met clairement en garde les ressortissants français  décidés à embarquer à bord de la flottille contre "les risques  sécuritaires liés à une telle entreprise". "En mer, tout peut arriver,  insiste le ministère. C’est très dangereux". L’assaut lancé en 2010 par  les commandos israéliens contre la première flottille s’était soldé par  la mort de neuf passagers turcs.
"Il faut comprendre que la  situation a évolué à Gaza depuis l’an passé. Certes, l’allègement du  blocus annoncé par Israël en juin 2010 n’est pas suffisant, mais il va  dans le bon sens", estime le Quai d’Orsay. Tout en appelant l’Etat  hébreu à autoriser "l’ensemble des exportations de biens commerciaux et  la libéralisation des conditions de circulation des personnes de et vers  la bande de Gaza", Paris estime que l’acheminement par voie terrestre  reste le moyen le plus sûr pour faire parvenir l’aide humanitaire aux  Gazaouis.
PROTECTION CONSULAIRE
Malgré tout, les autorités ont assuré aux passagers de  la flottille qu’ils pourront bénéficier d’une protection consulaire et  de l’assistance des services du ministère à l’étranger."Cela s’applique à  tous nos ressortissants sans discrimination, explique le Quai d’Orsay.  Le problème, c’est que nous ne pouvons pas toujours en user comme nous  le souhaiterions." En d’autres termes, en cas d’arraisonnement des  bateaux et de détention en Israël, la réaction des diplomates "dépendra  nécessairement de l’attitude des autorités locales et du comportement  des militants". Dans ces conditions, aucun dispositif spécifique ne peut  être prévu pour parer à d’éventuelles difficultés.
Pourtant, l’an passé, c’est précisément la question du  rapatriement des passagers de la flottille qui avait posé problème et  grippé les relations entre les militants français et les autorités.  Thomas Sommer-Houdeville, l’un des membres de l’expédition, s’était  vivement ému de la réaction de Paris après l’assaut des commandos  israéliens. "Très franchement, expliquait-il dans un chat au Monde.fr,  on s’est senti abandonnés (...) Ceux qui nous ont sauvés, moi et mes  deux copains, ce sont les Grecs". Un témoignage évidemment mal reçu par  le Quai d’Orsay, qui ne s’était pas privé de répliquer.
"UN BOUT DE TERRITOIRE FRANÇAIS EN MÉDITERRANÉE"
Les échanges entre les deux parties sont aujourd’hui  plus courtois. Le comité de coordination de la campagne française a  rencontré à plusieurs reprises des représentants du ministère des  affaires étrangères. "Nous leur avons exposé nos objectifs et ils nous  ont recommandé de ne pas y aller. Pour eux, la flottille reste une  réponse inappropriée à une situation inacceptable", explique Claude  Léostic, membre du comité de coordination de la campagne "Un bateau  français pour Gaza".
Seulement, "nous ne sommes plus dans la même configuration qu’en 2010", estime la vice-présidente de l’Association France-Palestine  Solidarité. "Les Français engagés sur la première flottille n’étaient  pas très nombreux. Ils portaient un espoir. Cette fois, le mouvement  incarne une volonté profonde de la société civile française de voir changer les choses. Nous sommes l’émanation des milliers de personnes qui ont soutenu notre campagne."
Par ailleurs, cette année, la délégation française a  affrété deux bateaux, dont un navire qui devrait appareiller sous peu  d’un port français. Pour les militants, le symbole est fort.  "L’embarcation qui voguera sous pavillon hexagonal (le "Dignité-Al  Karama a quitté les côtes corses samedi, ndlr) sera un bout de  territoire français en Méditerranée. Le gouvernement devra en tenir  compte", affirme Claude Léostic.
Elise Barthet
Le 27 juin 2011
 
 
