04 février 2011
Janie GosselinLa Presse
(Jérusalem) L'Autorité palestinienne a annoncé hier l'interdiction de manifestations liées aux soulèvements en Égypte et en Tunisie, invoquant la «non-ingérence dans les affaires de pays frères».
Plus tôt dans la journée, une centaine de personnes s'étaient réunies à Ramallah pour manifester leur soutien aux opposants du régime d'Hosni Moubarak. Les policiers avaient rapidement mis un terme à la manifestation, selon Associated Press.
Le nombre de manifestants reste marginal en comparaison des centaines de milliers d'Égyptiens descendus dans les rues au cours des derniers jours. Mais les troubles en Égypte pourraient néanmoins avoir des impacts en Cisjordanie. Et les Palestiniens pourraient en bénéficier, croient certains analystes. Mardi dernier, l'Autorité palestinienne a annoncé la tenue d'élections, qui auront lieu «dès que possible». Le dernier scrutin, prévu pour juillet 2010, avait été annulé, causant la grogne parmi la population.
«Les troubles en Égypte pourraient rendre l'Autorité palestinienne plus démocratique, parce que ses dirigeants craignent un soulèvement populaire», souligne Gabriel Ben-Dor, directeur des études sur la sécurité nationale à l'Université d'Haïfa. «Mais on ne sait pas ce que ça voudra dire», ajoute-t-il, faisant allusion aux votes récoltés par le Hamas en 2006. Le mouvement islamiste, qui contrôle la bande de Gaza, s'est d'ailleurs prononcé contre la tenue d'élections générales.
Processus de paix
Les risques d'instabilité en Égypte seront probablement abordés à la réunion du Quartet des médiateurs pour la paix au Proche-Orient, qui aura lieu demain à Munich pour étudier les moyens de relancer le processus de paix.
«La nouvelle situation en Égypte pourrait amener à un changement dans les pouvoirs mondiaux qui forcera Israël à faire des compromis», a dit à Reuters le négociateur palestinien Nabil Shaath. Selon lui, une Égypte plus forte «aidera assurément notre pouvoir de négociation».
Mais un changement de donne pourrait aussi avoir l'effet contraire.
Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a exprimé cette semaine ses craintes de voir des radicaux prendre le pouvoir au Caire. Le traité de paix conclu en 1979 entre les deux pays risquerait alors de voler en éclats. Si tel est le cas, Israël pourrait hésiter à faire des concessions avec ses interlocuteurs palestiniens, avertissent certains experts.
«La tendance des gens est d'interpréter les événements de manière à renforcer leurs propres points de vue, prévient Mark Heller, chercheur affilié à l'Université de Tel-Aviv. Les gens hésitants à voir un changement diront: «Regardez, nous vous avions dit qu'il n'y avait pas de stabilité et qu'on ne peut être sûr que les traités tiennent une fois les signataires partis».»
Et la Jordanie...
Une chose est sûre: les dirigeants israéliens comme palestiniens continueront à suivre de près la situation en Égypte. Et celle des autres pays de la région, où des tensions se font sentir. Des manifestations en Jordanie ont amené le roi Abdallah II à nommer un nouveau premier ministre mardi. La Jordanie est le seul autre pays arabe à avoir signé un accord de paix avec Israël.
«Il y a beaucoup d'inquiétudes en ce qui concerne la Jordanie, note M. Heller. Les effets de soulèvements là-bas seraient beaucoup plus directs qu'en Égypte, puisqu'il y a beaucoup plus de liens avec la Cisjordanie.»
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