lundi 21 novembre 2011

Qui gagnera les élections palestiniennes d’après la réconciliation ?

[ 20/11/2011 - 21:51 ] 
Palestine – CPI
En dix jours, beaucoup de choses pourraient changer, beaucoup d’événements pourraient se produire. S’il n’y a pas de surprises de dernière minute, à la fin de la semaine prochaine, un accord historique sera signé entre Khaled Mechaal, président du bureau politique du mouvement islamique du Hamas, et Mahmoud Abbas, président de l’autorité palestinienne, un accord concernant les élections législatives et présidentielles qui auront lieu en mai 2012 (six ans après les précédentes élections législatives et sept ans après l’élection d’Abbas). Les deux hommes se rencontreroent sous l’égide du service égyptien des renseignements. Les contacts, jusque-là secrets, ont pris place dans la capitale égyptienne, sous l’égide de la même personne qui était derrière la réussite de la transaction de Gilad Shalit : Nader Al-Asser, ancien consul égyptien en "Israël".
L’accord de principe a déjà été signé par Azzam Al-Ahmed, représentant du Fatah, et Moussa Abou Marzouq, vice-président du bureau politique du mouvement du Hamas, qui s’étaient discrètement rendus au Caire, récemment. Hier, Al-Ahmed a déclaré que les élections auraient lieu dans le courant du mois de mai et qu’il y aurait un gouvernement d’experts, non présidé par Salam Fayyad. En effet, c’était la volonté insistante d’Abbas à ce que Fayyad préside le gouvernement provisoire jusqu’aux élections qui mettait des bâtons dans les roues de l’accord. Mais à cause d’agissements du gouvernement israélien, Abbas a commencé, depuis quelques mois, à comprendre qu’il était insensé de préférer Fayyad.
En fait, Abbas insistait sur Fayyad afin que les Etats-Unis continuent à donner des fonds, ainsi que la communauté internationale et "Israël". Maintenant, il a compris que le gouvernement israélien ne se précipite pas à transférer l’argent des taxes appartenant aux Palestiniens. Et parallèlement, le Congres américain rendrait difficile l’arrivée d’aides financières à l’autorité palestinienne, à cause de son orientation vers les Nations Unies. Abbas a alors compris qu’il n’avait rien à perdre en laissant tomber Fayyad.
En outre, Abbas ne s’attend pas à grande chose du gouvernement israélien actuel ; il ne lui reste que la réconciliation entre les deux mouvements. Il n’est pas impossible qu’une raison personnelle ait influencé la décision d’Abbas ; quasiment toute personne qui a récemment rencontré Abbas l’a entendu dire qu’il n’entrerait pas en compétition, dans les prochaines élections présidentielles ; il préférerait se concentrer sur sa vie privée. Et pour ce qui est du Hamas, il avait jusqu’à maintenant peur des élections ; mais maintenant, plusieurs voix croient que le mouvement gagnera aux élections prochaines pour diverses raisons :
Premièrement : la transaction de Shalit a renforcé la position du Hamas.
Deuxièmement : le printemps arabe, qui devient de plus en plus un printemps islamique. La victoire du parti An-Nahda en Tunisie et la victoire très possible des Frères Musulmans en Egypte auraient des effets positifs sur le Hamas.
Troisièmement : le mouvement de la résistance islamique Hamas sait qu’actuellement, le mouvement du Fatah n’a pas de candidat avec la même popularité que celle d’Abbas. Il sera même logique que le Hamas remporte les élections présidentielles.
Toutefois, plusieurs questions resteront actuellement ouvertes. On ne sait pas trop qui remplacera Fayyad. Quelques noms sont proposés, dont celui du milliardaire palestinien Monib Al-Masri et Mohammed Mustapha, ancien conseiller économique d’Abbas.
Cette fois, le nouveau premier ministre ne pourrait rester dans son poste plus de six mois ou forcer le gouvernement israélien à transférer l’argent à la caisse de l’autorité. La question gênante est de savoir qui pourrait remplacer Abbas, s’il ne voulait pas se présenter. C’est une question épineuse pour le mouvement du Fatah, car le seul homme qui pourrait assurer la victoire du Fatah contre le Hamas serait Marwan Al-Barghouthi, condamné à cinq perpétuités dans les prisons israéliennes.
Notons enfin que même si Mechaal et Abbas arrivent à un accord sur les élections en mai prochain, à un accord sur la personne du premier ministre, on ne parle d’une réelle réconciliation, car la route est longue et escarpée. Admettons que les deux mouvements arrivent au mois de mai et aux élections en paix, il n’est pas sûr que la victoire d’un de ces mouvements fasse disparaître les éléments essentiels de la division palestinienne : le Hamas ne désarmera pas ses hommes dans la bande de Gaza ; le Fatah ne se hâtera pas de laisser tomber les services de sécurité et la mainmise exclusive sur la Cisjordanie. Après quatre ans et demi de division, il n’est pas certain que les élections puissent faire disparaître les haines et les séquelles qui se sont accrues au fil du temps.
Article écrit par Avi Yamskharov, dans le journal hébreu Haaretz, le 18 novembre 2011, traduit et résumé par le département français du Centre Palestinien d’Information (CPI)