jeudi 5 août 2010

Israël veut mener campagne, Paris n’attend pas pour répliquer...

05/08/2010
La France refuse que quiconque lui reproche son aide militaire à l'armée.
Le quotidien israélien Haaretz, citant un « grand » responsable israélien, a affirmé hier que l'État hébreu entend désormais mener une campagne diplomatique tous azimuts afin de faire pression sur les États-Unis et la France pour qu'ils s'arrêtent de livrer des armes à la troupe libanaise. « De nombreux pays font cela afin que l'armée libanaise puisse s'opposer au Hezbollah, sauf qu'elle les utilise contre les soldats israéliens », écrit Haaretz, précisant que les USA ont déjà transféré 400 millions de dollars au Liban afin qu'il se dote d'armes en tous genres. Il convient de signaler que le quotidien israélien Maariv, qui cite des sources politiques à Jérusalem, tient le Hezbollah pour « responsable » de l'incident de Adaïssé en raison de « la pléthore des éléments du Hezbollah dans les rangs de l'armée ».
À cette campagne relayée par Haaretz, le quotidien saoudien al-Watan a rétorqué hier que l'armée libanaise « n'est pas la gardienne des frontières d'Israël. Ce message, l'État hébreu l'a reçu cinq sur cinq en lettres de sang : l'armée libanaise ne se comportera pas en faux témoin face aux exactions commises contre le territoire libanais et la souveraineté du Liban ». Quant au quotidien al-Riyad, également saoudien, il s'est posé la question suivante : l'incident de Adaïssé est-il le prélude à une frappe de bien plus grande envergure contre le Hezbollah ? Et Robert Fisk, dans le britannique The Independent, s'est demandé si un arbre pourrait provoquer une nouvelle guerre en plein cœur du P-O.
Mais la réponse la plus musclée est arrivée de la France. La porte-parole adjointe du Quai d'Orsay, Christine Fages, a déclaré hier que l'accord de coopération franco-libanais signé en 2008 « fournit un cadre de soutien par la France des forces armées libanaises dans l'exercice de leurs missions », rappelant au passage que la France demeure profondément attachée à l'indépendance, à la souveraineté, à l'intégrité territoriale et à la stabilité du Liban.
« Toute décision d'exportation d'armements français, quelle que soit sa destination, relève de la même procédure, extrêmement rigoureuse, sur la base du contrôle exercé par la Commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG) et dans le respect des engagements internationaux de la France », a-t-elle ajouté.
Selon une source proche du Quai d'Orsay rapportée par notre correspondant à Paris, Élie Masboungi, la France entend assumer pleinement ses responsabilités à l'égard de son aide militaire au Liban et ne permettra à aucune tierce partie de lui reprocher quoi que ce soit à ce sujet. Tout en réaffirmant le soutien, maintes fois répété, de la France au Liban et à la Finul, cette source constate que « contrairement aux États-Unis », la France « fait confiance à l'armée libanaise et n'a jamais douté de l'utilisation adéquate de tout matériel militaire livré au Liban ».
Le soutien à la Finul et les appels au self control
Quoi qu'il en soit, les grandes capitales sont désormais convaincues, après l'incident de Adaïssé, que le patron des Nations unies, Ban Ki-moon, avait bien raison, rapport après rapport, de qualifier à chaque fois la situation le long de la ligne bleue de « fragile » et « pouvant exploser à n'importe quel moment ».
Selon notre correspondant au palais Bustros, Khalil Fleyhane, l'un des conseillers les plus importants de la Maison-Blanche, Dan Shapiro, a fait part à l'ambassadeur du Liban aux Nations unies Antoine Chédid (actuellement en vacances à Beyrouth) que Washington « s'attend à ce que le Liban fasse primer raison et sagesse, et qu'il doit se contrôler ».
Le même message a d'ailleurs été transmis au Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu. Sauf que des sources officielles libanaises déplorent vertement qu'Israël ait fait la sourde oreille : son entêtement à déraciner ce fameux arbre de la discorde est une preuve flagrante. Ces sources se sont en outre étonnées de ce qu'elles ont appelé « le parti pris de la Finul en faveur de l'État hébreu » après que la force onusienne eut martelé que l'arbre se trouvait bien en zone israélienne.
La réponse aux nombreuses critiques libanaises (très médiatisées ou plus discrètes) de la Finul et de son « inertie » avant-hier mardi est également venue de Paris.
« La France réitère son soutien à la force onusienne qui remplit avec détermination le difficile mandat confié par le Conseil de sécurité des Nations unies en accord avec les autorités libanaises », a ainsi répondu Christine Fages. « La Finul contribue au renforcement de l'indépendance, de la souveraineté, de l'intégrité territoriale et de la stabilité du Liban, ainsi qu'à la paix dans la région », a-t-elle ajouté.
Il n'empêche : les grandes capitales européennes, à l'instar de Moscou qui ne cache pas son « extrême inquiétude », craignent une escalade entre le Liban et Israël. « Il est indispensable que les parties, en collaboration avec la Finul, prennent toutes les mesures nécessaires pour établir la paix et la sécurité dans la zone frontalière », a ainsi déclaré le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué, pendant que Madrid, Rome et Berlin appelaient les deux parties à un self control maximal. L'Espagne, tout comme la Jordanie, a pris contact avec les deux parties pour les exhorter à beaucoup plus de retenue, pendant que Koweït et Dubaï condamnaient vertement « l'agression israélienne ».
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