Le lancement des pourparlers indirects entre Palestiniens et Israéliens semble imminent. Mais l’intransigeance d’Israël sur les questions-clés limite les espoirs d’une réelle reprise.
Véritable chassé-croisé diplomatique. Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, en Egypte lundi dernier, suivi ce mercredi par le président palestinien, Mahmoud Abbass, et l’émissaire américain Georges Mitchell à nouveau dans la région vendredi prochain. A cela s’ajoute une réunion du comité de suivi du processus de paix de la Ligue arabe, tenue cette semaine au Caire. Les efforts diplomatiques se multiplient pour relancer le processus de paix, au point mort depuis la guerre contre Gaza, fin 2008. Des efforts qui semblent porter leurs fruits sur un seul point : les deux parties vont probablement reprendre très prochainement des négociations indirectes, via les Américains. De là à pronostiquer une véritable relance du processus de paix avec des avancées concrètes, il reste des pas à franchir.
La défiance est encore grande entre les deux parties, notamment en raison de la position israélienne concernant la colonisation. Les deux parties se préparent donc à des discussions difficiles, d’autant plus que chacune part avec des vues diamétralement opposées. Pour les Israéliens, l’essentiel est de discuter du sacro-saint principe de la « sécurité d’Israël » et des moyens de le garantir. Alors que les Palestiniens souhaitent, en cas de reprise du dialogue, aborder les questions-clés, à savoir les frontières, Jérusalem, le droit de retour ou encore la colonisation. Or, pour évoquer ces questions hautement délicates, il faut d’abord une réelle volonté de parvenir à un règlement, avec pour objectif ultime la création d’un Etat palestinien sur la base des frontières de 1967. Et, de nombreux doutes subsistent sur les intentions de l’actuel gouvernement israélien.
La colonisation encore et toujours
En effet, malgré le ton optimiste de ces derniers jours, c’est la suspicion qui règne en ce qui concerne la question de la colonisation, à l’origine du retard enregistré dans le lancement des négociations dites « de proximité ». Peu d’analystes accordent la moindre chance à ces discussions. Israël se refuse catégoriquement à stopper la colonisation à Jérusalem-Est, dont l’annexion par Israël en 1967 n’est pas reconnue par la communauté internationale, un gel toujours exigé par les Palestiniens. La dernière tentative américaine de relancer le dialogue, début mars, a d’ailleurs échoué en raison de l’annonce d’un projet controversé de construire 1 600 nouveaux logements dans un quartier juif de Jérusalem-Est. Et le négociateur palestinien Saeb Erakat a été clair à ce sujet. « S’ils construisent un seul des 1 600 logements, nous n’irons pas aux pourparlers », avait-il averti. Auparavant, les Palestiniens avaient déclaré avoir obtenu des garanties, qu’ils n’avaient pas précisées, de la part des Etats-Unis. De son côté, la Ligue arabe, qui a annoncé samedi qu’elle était favorable à l’ouverture de négociations indirectes, a dit que la garantie essentielle donnée par Washington aux Palestiniens pour qu’ils participent à des pourparlers est l’arrêt du fameux projet de colonisation. « Nous avions décidé, le 2 mars, de soutenir les pourparlers indirects et puis Israël a pris des décisions auxquelles nous étions opposés. Les Américains sont revenus vers nous et ont dit que cela ne se reproduirait pas », a déclaré Hicham Youssef, chef de cabinet du secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa. M. Youssef n’a pas dit si les garanties américaines étaient valables uniquement tant que dureraient les pourparlers, ne précisant pas non plus si elles portaient sur d’autres sujets. De son côté, M. Moussa a déclaré à la presse dimanche « penser, à la lumière des discussions, que la décision de construire 1 600 logements a été arrêtée ».
Pourtant, les Arabes ont clairement exprimé leurs doutes sur le sérieux d’Israël. Après les « nouveaux engagements » donnés par le président américain Barack Obama à M. Abbas, « et bien que nous ne soyons pas convaincus du sérieux d’Israël dans la recherche de la paix, le comité de suivi réaffirme (sa position) convenue le 2 mars 2010 concernant la durée des négociations indirectes », affirme le communiqué publié samedi au Caire. Un scepticisme fondé, à l’en juger des déclarations israéliennes. Plusieurs ministres israéliens ont répété dimanche que le gouvernement de droite de M. Netanyahu continuerait de bâtir à Jérusalem-Est. « Sur le terrain, on n’empêchera pas la vie de continuer, car c’est une question de principe, voire de morale, qui est en jeu », a assuré dimanche le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon, un « faucon » du gouvernement, à propos de Jérusalem. Inutile donc de trop se réjouir des développements de cette semaine. Quand bien même la reprise des négociations aurait lieu, cela ne signifierait en aucun cas une garantie de succès.
Abir Taleb