mercredi 19 octobre 2011

Échange de prisonniers, symétrie et siège de Gaza par Israël

publié le mercredi 19 octobre 2011
Michel Warschawski – Alternative Information Center

 
Pour des milliers de familles palestiniennes qui bientôt vont retrouver leurs êtres chers, je suis heureux, et pour la famille Shalit, je suis aussi heureux. Cependant, au-delà du bonheur de cette libération, il n’existe aucune symétrie
Dans deux jours, nous pourrons célébrer le retour dans leur foyer de 1037 prisonniers politiques palestiniens et du soldat israélien Gilad Shalit. Pour des milliers de familles palestiniennes qui bientôt vont retrouver leurs êtres chers, je suis heureux, et pour la famille Shalit, je suis aussi heureux. Cependant, au-delà du bonheur de cette libération, il n’existe aucune symétrie : les prisonniers politiques palestiniens, femmes et hommes, qui seront libérés sont tous des combattants de la liberté ayant accompli tout leur devoir politique et moral dans la lutte contre l’occupation coloniale israélienne. Gilad Shalit, en revanche, était un soldat, et un soldat de l’armée d’occupation coloniale d’Israël qui viole le droit international quotidiennement et commet régulièrement des crimes de guerre. Comme des centaines d’Israéliens l’ont fait avant lui, Shalit aurait dû refuser de participer à cette guerre, et il ne l’a pas fait.
Ceux qu’en Israël on surnomme les « ravisseurs » de Gilad Shalit ont fait effectivement un prisonnier de guerre et, d’après tous les témoignages que nous avons, il a été traité comme tel. Les prisonniers politiques palestiniens, quant à eux, n’osent même pas rêver de recevoir un traitement similaire à celui de Shalit.
Tout comme on n’abandonne pas un soldat blessé sur un champ de bataille, l’État a l’obligation de faire tout ce qui est en son pouvoir pour récupérer ses prisonniers de guerre, quel qu’en soit le prix. Il n’y a en cela aucun « humanisme juif de vraiment spécial » - comme déclaré par les médias israéliens, et alimenté par le cabinet de Benjamin Netanyahu, mais un acte ordinaire et accepté dans une situation de guerre. Ce qui n’est pas habituel, et qui est en réalité scandaleux, ce sont les atermoiements délibérés qui ont caractérisé les responsables au gouvernement du dossier Shalit. L’accord avait déjà été conclu avec l’aide d’un négociateur allemand et des gouvernements égyptien et turc il y a trois ans, mais le gouvernement israélien avait choisi de l’ignorer et avait fantasmé sur une opération commando, laquelle opération aurait sans aucun doute entraîné la mort du soldat.
Il est facile d’imaginer que si le soldat en captivité avait été un enfant de Netanyahu ou de Lieberman, le gouvernement aurait bougé bien plus rapidement et accepté l’accord mis alors sur la table. Non, le gouvernement n’a pas fait preuve du moindre « humanisme juif », mais en réalité d’un véritable manque d’humanité. Seuls, la détermination tranquille de la famille Shalit et le soutien qu’elle avait dans l’opinion ont fait bouger ce gouvernement immoral et sans pitié.
Autre chose encore : un gouvernement qui a transformé la dignité nationale en un substitut pour sa politique se doit maintenant de se dispenser de toutes ses déclarations arrogantes, comme dans les cas de la Turquie et de l’Égypte. Là aussi, il a ravalé sa fierté et fait exactement le contraire de ce qu’il avait promis : libérer « les terroristes qui avaient du sang sur les mains », pendant que le ratio liberté (1 contre 1037) est encore plus élevé que celui de 3 à 1050, dans l’échange du prisonnier Rajub en 1985.
Une question reste posée : qu’en est-il de la fin du siège de Gaza par Israël ? On dit que cela fait partie de l’accord avec le Hamas, mais Netanyahu n’a aucun mal à violer les accords ; d’ores et déjà, il est évident que ce ne sont pas toutes les femmes emprisonnées qui seront libérées, malgré la promesse israélienne. En outre, le prétexte avancé pour le siège de Gaza était la captivité de Gilad Shalit. Quel nouveau prétexte Israël va-t-il trouver maintenant ?
16 octobre 2011
Traduit de l’hébreu en anglais par AIC
Traduction de l’anglais : JPP pour l’AFPS
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