jeudi 21 avril 2011

Flottille de la liberté pour Gaza, l’internationalisme en actes

publié le mercredi 20 avril 2011
Tout est à nous !
L’attaque de la Flottille par Israël en mai 2010, "loin d’intimider le mouvement de solidarité, ... a renforcé sa détermination et contribué à son élargissement".
Il y a bientôt un an, la première flottille de la liberté était attaquée dans les eaux internationales, au large de Gaza. L’armée israélienne a, lors de cet acte de piraterie, tué neuf militants, dont quatre à bout portant et en a blessé plus de 50, dont 30 grièvement. Le gouvernement israélien en choisissant délibérément la répression sanglante, a voulu envoyer un signal fort au mouvement de solidarité et a tenté de lui donner un coup d’arrêt. Cette flottille brisait un silence international confortable autour de l’enfermement de 1, 5 million de Palestiniens dans la petite bande de Gaza. Il fallait de son point de vue arrêter cette dynamique avant qu’elle n’aille trop loin. Faire taire le mouvement international qui, par la campagne BDS ou par ces flottilles, met en œuvre une solidarité directe et cherche à isoler sur la scène internationale cet État. Pour Israël, cette attaque n’a pas eu l’effet escompté. Au contraire, sa violence a suscité une indignation internationale et, loin d’intimider le mouvement de solidarité, elle a renforcé sa détermination et contribué à son élargissement.
Le mouvement de solidarité a aujourd’hui des modes d’action efficaces. La campagne «  Boycott, désinvestissement, sanctions » et la flottille en font partie. Dans les deux cas, il s’agit d’une résistance active. Dans les deux cas, il s’agit d’un mouvement international coordonné, fonctionnant selon son propre agenda.
Le mouvement BDS s’inscrit aujourd’hui dans la durée et organise un mouvement de masse, construisant une campagne ciblant l’État israélien pour ce qu’il est, c’est-à-dire un État d’apartheid avec lequel on ne peut se compromettre, qu’il faut isoler pour lui imposer le respect du droit. La flottille est une action spectaculaire, qui rompt le silence et apporte une solidarité concrète aux Palestiniens de Gaza. Les deux existent parce que les États se rendent complices de l’oppression quotidienne vécue par le peuple palestinien.
Ces deux campagnes existent parce que le mouvement de solidarité ne se résigne pas et est à l’offensive.
Au mois de mai prochain, un an après, une nouvelle flottille sera en Méditerranée. Toujours déterminée, et bien plus forte  : aux six bateaux, grecs, irlandais, turcs, suédois et étatsuniens, de la première flottille de la liberté, se joindront des bateaux venus d’Espagne, d’Écosse, de Norvège, d’Italie, d’Afrique du Sud, d’Indonésie, d’Inde, de France... entre autres  ! Le message est simple  : la solidarité internationale s’exprime en actes, nous refusons d’être complices de nos États. Nous exigeons la levée totale du blocus qui enferme les Palestiniens de Gaza depuis cinq ans. Nous rappellerons au monde entier que les discours creux du «  processus de paix  » cachent blocus, occupation, colonisation et massacres. Et si cette seconde flottille ne suffit pas, nous serons encore plus nombreux et déterminés la prochaine fois.
Un bateau pour Gaza, une vague de mobilisations en France
Au lendemain de la première flottille de la liberté, plus de quatre-vingts organisations, ONG, partis politiques, syndicats et associations se sont regroupés dans une coalition autour du projet de bateau français, afin de revendiquer la levée totale du blocus, terrestre et maritime. Nous sommes aujourd’hui à mi-chemin de cette campagne. Elle a déjà fait la démonstration de la force du mouvement de solidarité en France. Près de 1 400 actions ont été organisées dans toutes les villes et villages de France  : sur les marchés, dans les cinémas, dans les salles des fêtes, la campagne bat son plein. En organisant des festivals, des concerts ou des rassemblements publics, le mouvement de solidarité a permis la levée de plus de 300 000 euros depuis mi-janvier, tout en mobilisant largement autour de la revendication de la levée du blocus.
C’est maintenant la dernière ligne droite pour la campagne.
Il s’agit tout d’abord de renforcer le soutien financier à la flottille  : toutes celles et ceux qui ont apporté leur soutien pour envoyer un bateau français pour Gaza sont invités à proposer un nom pour ce bateau qui les représentera et à lui permettre de parcourir les derniers kilomètres qui le séparent de la bande de Gaza. Il s’agit aussi dans les semaines à venir de favoriser l’engagement des milliers de participantEs aux mobilisations qui ont rythmé les dernières semaines, en ouvrant les collectifs, en proposant des actions locales afin de construire la visibilité médiatique de la campagne et le rapport de forces nécessaire pour imposer au gouvernement un départ de France du bateau. Enfin, avant même que les bateaux soient en mer, nous aurons à déjouer toutes les tentatives israéliennes, de pressions politiques, médiatiques voire de sabotages, visant à laisser les bateaux à cale sèche. Au-delà des initiatives locales, des événements politiques nationaux, meeting, concert, participation à la manifestation contre le G8 au Havre le 21 mai, rythmeront la campagne ces prochaines semaines. Avant de nombreux rassemblements pour accompagner le départ du bateau.
Gaza de nouveau bombardé  !
Un très mauvais poisson d’avril «  made in Israël  ». Le 1er avril dernier, il était possible d’entendre sur une chaîne israélienne que la construction d’une île artificielle en mer Méditerranée était à l’étude et permettrait à Israël de se débarrasser «  définitivement de la bande de Gaza  » en abandonnant sa tutelle sur les échanges commerciaux du territoire «  tout en maintenant son blocus en pleine mer pour empêcher la contrebande d’armes  ». Cet «  humour  » nauséabond fait échos aux déclarations très sérieuses que faisait l’ancien Premier ministre israélien Itzhak Rabin de voir sombrer Gaza dans la Méditerranée. Ce «  hoax  » est aussi en phase, malheureusement, avec la réalité vécue par les Palestiniens de Gaza aujourd’hui, une nouvelle fois soumis aux bombardements et aux assassinats. La volonté d’Israël de se «  débarrasser de Gaza  » est de nouveau à l’œuvre, et ce n’est pas un poisson d’avril. Après cinq années de blocus établi par Israël et le régime militaire égyptien, avec la complicité active des États-Unis et de l’Union européenne, après le massacre de l’hiver 2009, les bombardements à l’encontre de la population gazaouie ont repris. Depuis deux semaines, plus de vingt Palestiniens, dont de nombreux enfants pour certains jouant au foot sur un terrain vague, sont décédés, des maisons ont été détruites, deux écoles et des tunnels ont été visés. Cette stratégie de la tension touche également la Cisjordanie qui a connu dans la dernière semaine de mars plus de 50 incursions militaires, avec à la clef des dizaines d’arrestations et des destructions d’infrastructures (puits, routes...), tandis que la mairie de Jérusalem autorisait la construction de 942 nouveaux logements dans Jérusalem-Est.
Ainsi Israël répond au vent d’espoir pour les Palestiniens porté par les révolutions au Maghreb et au Machrek, ainsi qu’aux mouvements des jeunes Palestiniens réclamant l’unité contre l’occupant. Déstabilisé sur la scène internationale par les mouvements sociaux s’emparant de la campagne BDS et de la prochaine flottille, inquiet de la tournure que pourraient prendre les processus révolutionnaires dans la région quant à leurs intérêts, Israël envoie un signal, qui consiste comme toujours à imposer sa force, à chercher à détruire la société palestinienne et à annihiler les possibilités de révoltes. Israël s’inquiète de la 2e flottille et de la campagne BDS  : Il y a de quoi  !
Israël a engagé, le 23 mars dernier, une campagne de propagande et de pressions politiques dont le but est d’empêcher le départ fin mai de la deuxième flottille de la liberté. Ainsi, le bras droit du dirigeant d’extrême droite Lieberman, le vice-ministre des Affaires étrangères, a réuni les ambassadeurs en poste en Israël afin de leur demander leur aide pour stopper notre flottille. Quelques jours plus tard, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, s’adressait au secrétaire général de l’ONU pour lui demander d’empêcher la réalisation de la campagne.
Ils s’inquiètent de voir vingt bateaux en pleine mer Méditerranée, déterminés à naviguer jusqu’à Gaza pour rompre le blocus, tout comme ils s’inquiètent de la dynamique que connaît la campagne BDS. Ainsi, une nouvelle unité a été créée au sein des renseignements militaires afin de surveiller et contrôler les groupes de gauche impliqués dans ces campagnes. Elle a également pour objectif de collecter toutes les informations concernant les groupes qui s’efforcent de poursuivre en justice les criminels de guerre israéliens, et «  examinera  » selon le journal Haaretz, «  les liens éventuels entre ces groupes et des groupes terroristes  ». Lorsqu’on connaît la propension d’Israël à définir toutes organisations palestiniennes résistantes comme «  terroristes  », nous pouvons être certains de voir fleurir dans les semaines qui viennent des campagnes de propagande contre tous les mouvements de solidarité avec la lutte du peuple palestinien.
Ces annonces prouvent que le gouvernement israélien est aux abois et se retrouve sur la défensive. Elles font suite à la décision du gouvernement Lieberman-­Netanyahou de criminaliser celles et ceux qui, en Israël, appellent au BDS, à la décision de la Knesset (Parlement) de supprimer certains droits de la députée Hanen Zouabi à la suite de sa participation à la première flottille, tout comme elles s’inscrivent dans les tentatives en France de criminaliser, ici aussi, les militantEs du BDS. Toutes ces tentatives pour museler, à l’intérieur comme à l’extérieur, toutes critiques et mises en cause sont certes à prendre au sérieux, et nous invitent à la solidarité totale avec les déjà ou futurEs inculpéEs, ici ou là-bas. Mais elles renforcent aussi notre détermination, démontrant que nos actions font mal, qu’elles tapent fort et juste, en acculant cet État à dévoiler le masque de «  la première démocratie  » du Moyen-Orient pour laisser apparaître le visage du régime d’apartheid qu’il construit.
A Paris, le 19e se met à l’eau
Dimanche 3 avril, le collectif un Bateau pour Gaza du 19e arrondissement de Paris faisait sa première sortie. Après plusieurs diffusions de tracts au cours des semaines précédentes, s’accompagnant de collectes d’argent afin de contribuer à l’achat du bateau, le collectif organisait un après-midi d’interventions festives et politiques au cœur du quartier. Aux côtés des militantEs du NPA, du PG, du PC, d’EÉ-les Verts, de la CGT ou de la LDH, etc., des habitantEs du quartier se sont impliquéEs dans la préparation et la réalisation de cette initiative. Prises de parole, discussions autour du buffet et musique ont rythmé cet après-midi qui a permis à de nombreux habitantEs du quartier de prendre connaissance de la campagne, d’échanger autour de la Palestine et des révolutions en cours de l’autre côté de la Méditerranée.
Cette initiative à également permis de faire la promotion de la projection du film Gaza Strophe diffusé par le collectif deux jours plus tard. Ce documentaire, plusieurs fois primé dans des festivals, fait prendre la mesure de la catastrophe vécue par les Palestiniens de Gaza au cours de l’opération «  plomb durci  » et, au-delà, du fait du blocus et des bombardements quotidiens. Film très dérangeant visiblement, puisque de nombreuses pressions ont été exercées contre France Télévision pour empêcher sa diffusion, tandis que la projection à Versailles a été déprogrammée et qu’un débat a été annulé le 16 mars à Ris-Orangis. Les nervis de Ligue de défense juive, ont tenté d’empêcher sans y parvenir du fait de l’intervention du projectionniste, la diffusion du film dans un cinéma parisien le 3 avril. Dans le 19e, près de 100 personnes ont assisté à la projection malgré, une fois encore, la présence dans les alentours de membres de cette milice. Ces premières initiatives ont rencontré un écho certain, et encourage le collectif nouvellement créé à poursuivre les actions et les initiatives dans les semaines à venir.