mercredi 26 janvier 2011

Prisonniers du Hamas, des collaborateurs d’Israël se sont vendus à bas prix

26/01/2011
Mahmoud se mord les doigts d'avoir accepté de l'argent d'un officier israélien pour son mariage. Condamné à la perpétuité, il purge sa peine comme des dizaines d'autres, pour collaboration avec Israël, dans une prison du Hamas à Gaza. À l'image de cet homme de 24 ans rencontré par l'AFP dans un centre de rééducation, plusieurs dizaines de Palestiniens sont emprisonnés par le Hamas à Gaza, reconnus coupables d'avoir renseigné Israël sur les groupes armés du territoire. Nombre d'entre eux, affirme le Hamas, se sont laissé acheter à vil prix, pour quelques centaines de shekels (200 à 300 dollars).
« Je marchais près de chez moi dans le nord de la bande de Gaza, à côté de la frontière avec Israël, quand les forces spéciales (israéliennes) m'ont arrêté pour m'interroger », raconte Mahmoud, accroupi dans un coin de sa cellule. « L'officier du renseignement m'a demandé ce que je faisais là, je lui ai dit que j'étais déprimé parce qu'un mois avant mon mariage, je n'avais pas l'argent nécessaire. Il m'a dit : Travaille pour nous et nous te donnerons l'argent », poursuit-il. « Il m'a donné 1 000 shekels (environ 270 dollars) et une carte SIM Orange israélienne et m'a dit qu'ils me poseraient quelques questions, et qu'en échange des réponses ils me donneraient la même somme à chaque fois et m'aideraient à payer mon mariage », ajoute le jeune homme, les yeux rivés au sol, en avouant avoir accepté le marché. « Comme convenu, il m'a appelé un mois après mon mariage et m'a demandé de surveiller deux de mes voisins qui appartenaient aux Brigades Ezzeddine al-Qassam », la branche militaire du Hamas. « J'ai essayé de lui mentir mais il savait tout et s'en rendait toujours compte. » Démasqué par un cousin auquel il s'était confié, salarié des autorités du Hamas, il a été arrêté en 2008 après environ un an de collaboration pour Israël, précise-t-il. « J'ai tout avoué. »
Chadi, 21 ans, qui purge la première de ses sept années de prison, explique avoir été recruté dans des circonstances similaires après avoir été arrêté par les forces israéliennes près de la frontière. « J'ai accepté parce que j'avais peur et besoin d'argent, affirme-t-il, l'officier m'a donné 500 shekels et une puce de téléphone portable israélien. » « Il demandait des informations sur les endroits d'où étaient tirées les roquettes et les noms des auteurs de ces tirs », témoigne le jeune homme barbu, ancien militant du Hamas. « J'avais beaucoup d'amis au Hamas et dans les Brigades al-Qassam. L'officier m'interrogeait sur eux et il savait toujours si je mentais. » « Alors que j'étais en route pour le retrouver à la frontière, j'ai rencontré un groupe de combattants d'al-Qassam qui s'apprêtaient à tirer des roquettes. Ils m'ont soupçonné et m'ont remis au responsable du Hamas dans le secteur et j'ai tout dit », confesse-t-il.
Selon le directeur de l'établissement, Nasser Souleimane, une quarantaine de Palestiniens sont détenus pour des faits similaires à Gaza. « Nous nous sommes aperçus que le ressort économique était le principal moyen de pression exercé sur les collaborateurs, en particulier en raison du blocus », a déclaré le porte-parole du ministère de l'Intérieur du Hamas, Ihab al-Ghoussein, faisant état de sommes de quelques centaines de shekels. Le Hamas assure qu'il traquera impitoyablement les collaborateurs présumés d'Israël. Un Palestinien reconnu coupable de collaboration a ainsi été condamné à mort et deux autres à des peines de prison en décembre par un tribunal militaire relevant des autorités du Hamas.