mercredi 10 mars 2010

Le choix « paix ou apartheid » n’est (hélas) pas la seule option, pour Israël

mardi 9 mars 2010 - 07h:56
Alan Hart
Le débat en train de prendre de l’ampleur autour de l’avenir d’Israël offre deux scénarios. Mais il en existe un troisième qui, apparemment, ne saurait être débattu publiquement. C’est donc précisément ce que nous allons faire...
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Alan Hart
Parmi les plus récents contributeurs à ce que j’appellerai le débat à deux scénarios, nous ne trouvons rien de moins qu’un Ehud Barak, ministre israélien de la Défense. Lors d’un discours prononcé dans le cadre de la conférence sur la sécurité nationale d’Herzliya, puis, à nouveau, aux Etats-Unis, il a mis en garde contre le fait que s’il ne parvenait pas à une paix avec les Palestiniens, Israël deviendrait un pays d’apartheid.
Quand l’ex-président américain Carter a utilisé ce mot commençant par un « A », initialement dans le titre de son livre : La Palestine : la paix, et pas l’Apartheid, il fut traîné dans la boue par l’Anti-Defamation League (ADLp, un des chiens d’attaque institutionnalisés les plus vicieux en Amérique. Celle-ci déclara : « Le recours à ce terme incendiaire d’apartheid pour parler d’Israël et de sa politique est inacceptable et honteux. L’apartheid, ce système raciste abhorré en Afrique du Sud n’a rien à voir avec la politique israélienne. Non seulement la politique israélienne n’est pas raciste, mais la situation dans les territoires (occupés) ne résulte en rien d’une quelconque intention israélienne d’opprimer ou de réprimer les Palestiniens : cette situation est le résultat du rejet d’Israël par les Palestiniens et du recours à la terreur et à la violence à l’encontre de l’Etat juif ».
A la lumière d’une telle attaque (peu importe le fait qu’elle était mêlée à un délire de propagande sioniste), il doit être dit que Barak avait fait montre d’un certain degré de courage politique en s’alignant apparemment sur la position de Carter sur cette question.
A la conférence d’Herzliya, il y eu de nombreuses communications faisant état de préoccupation au sujet des critiques croissantes, dans le monde entier, à l’encontre d’Israël. Barak a lui-même fait allusion au risque qu’Israël perde sa légitimité dans le cas où un accord de paix avec les Palestiniens ne se dégageait pas. Il a en effet déclaré : « Le pendule de la légitimité est appelé à dériver de plus en plus vers l’autre pôle ».
Son avertissement, le voici : « Aussi longtemps qu’il n’y aura, à l’Ouest du Jourdain, que l’unique entité politique appelée Israël, celle-ci sera appelée à être soit non-juive, soit non-démocratique... Si ce bloc constitué de millions de Palestiniens ne peuvent voter, nous aurons un Etat d’apartheid ».
Ce que Barak voulait dire, avec une concision dont il a le secret, est évident pour les détracteurs d’Israël (dont votre serviteur) depuis des années. S’il continue à occuper la Cisjordanie, Israël disposera du choix de donner (ou non) le droit de vote à tous les Arabes placés sous son contrôle.
Donner à tous le droit de vote n’est pas une option, parce qu’avec le temps, les Palestiniens arabes seront plus nombreux que les juifs d’Israël et leur vote pourrait signifier la fin de l’existence de l’Etat sioniste.
Mais donner à tous les Arabes le droit de vote n’est pas non plus une option. Pourquoi ? Pour bien d’autres raisons que la simple affirmation qu’Israël deviendrait un Etat d’apartheid. A un certain moment, un tel Etat serait inacceptable pour le reste du monde, tant pour ses gouvernements que pour leurs peuples, dont, probablement, la plupart des juifs vivant dans le monde entier. Et viendrait le temps où un Israël d’apartheid serait formellement déclaré paria par la communauté internationale et soumis à des sanctions comme l’Afrique du sud avait fini par l’être.
Un Israël d’apartheid aurait alors le choix entre mettre un terme à son occupation et se retirer à l’intérieur de ses frontières d’avant juin 1967, préférablement avec une clause prévoyant la transformation de Jérusalem en ville ouverte, indivisible et capitale de deux Etats, l’un étant Israël et l’autre la Palestine, ou dire au monde entier d’aller se faire foutre. (Au passage, il convient de noter que la véritable division, dans l’Etat sioniste, au niveau des dirigeants, a toujours opposé ceux (représentés par Moshe Sharett) qui pensaient que ce que pensaient les Gentils avait une importance à ceux, très nombreux et représentés par Ben-Gourion, qui pensaient que ce que pensaient les Gentils n’avait strictement aucune importance).
Un examen rationnel des options entre « paix ou apartheid » aboutirait à la conclusion que dans le meilleur intérêt de toutes les parties concernées, Israël devrait faire la paix sur la base de son retrait de tous les territoires qu’il a conquis lors de sa guerre de 1967, en échange d’une paix totale et définitive non seulement avec les Palestiniens, mais avec l’ensemble du monde arabe et, plus largement, avec l’ensemble du monde musulman. Une telle paix, de fait, est possible (toutefois la question de savoir pour combien de temps est une bonne question). En effet, en dépit des assertions du contraire par le sionisme, la vérité, c’est que le Hamas pourrait vivre avec un Israël à l’intérieur de ses frontières pré-1967 et que, plus important encore, le Hezbollah et l’Iran pourraient accepter tout ce que les Palestiniens auraient accepté, et non seulement ils pourraient l’accepter, mais ils l’accepteraient effectivement.
Le problème, c’est que le sionisme est si outrancièrement arrogant, si insupportablement confit dans son prétendu bon droit, tellement congénitalement incapable de tout débat rationnel. Ses dirigeants et ses partisans sont aujourd’hui les victimes de leur propre propagande à un point qui les rend insensibles à tout raisonnement rationnel.
Plus effrayant que tout : le fait que les dirigeants du sionisme vivant en Israël savent bien qu’il existe une troisième option. J’appelle cette option : l’Epuration Ethnique Finale des Palestiniens.
Dans la troisième édition de mon ouvrage « Zionism : The Real Enemy of the Jews » [Le sionisme : Le véritable ennemi des juifs], à paraître bientôt, j’imagine que ce processus pourrait commencer par le « transfert » des Arabes israéliens, et puis qu’une fois cela accompli, un prétexte serait créé afin de chasser les Palestiniens de la Cisjordanie occupée vers la Jordanie ou n’importe où. Quel serait alors le sort de ceux qui vivent dans la bande de Gaza ? Ceux qui ne s’enfuiraient pas seraient condamnés à pourrir sur place.
Le scénario que j’ai évoqué dans le paragraphe précédent est presque trop terrible pour que l’on puisse y réfléchir, mais il risque de se produire si le président Obama ou son successeur devait ne pas avoir le courage ou la capacité (ou les deux) d’exiger d’Israël qu’il soit sérieux en matière de paix, en des termes acceptables pour la quasi-totalité des Palestiniens et pour la plupart des autres Arabes et musulmans, dans le monde entier.
* Alan Hart, écrivain, est un ancien correspondant en chef pour le Moyen-Orient de la chaîne Independent Television News [1] et actuel présentateur de l’émission Panorama de la BBC, spécialisé dans le Moyen-Orient. Il a écrit plusieurs livres, dont Zionism : The Real Enemy of the Jews.
Voici l’adresse de son site : http://www.alanhart.net/
4 mars 2010 - Information Clearing House - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.informationclearinghouse...
Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
http://info-palestine.net/article.php3?id_article=8296