samedi 23 janvier 2010

La relance du processus de paix israélo-palestinien dans l’impasse

23/01/2010
Un soldat israélien menace de frapper une Palestinienne manifestant à Nabi Saleh, en Cisjordanie occupée, contre la colonisation. Ammar Awad/Reuters
Un soldat israélien menace de frapper une Palestinienne manifestant à Nabi Saleh, en Cisjordanie occupée, contre la colonisation. Ammar Awad/Reuters
Certains analystes arabes prédisent que l'émissaire américain pourrait démissionner dès son retour de sa frustrante mission en cours.
Après le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, la veille à Jérusalem, le représentant spécial de Barack Obama au Proche-Orient, George Mitchell, a rencontré hier à Ramallah le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. L'ex-sénateur démocrate américain, artisan des accords de paix dits du Vendredi saint en Irlande du Nord, en 1998, effectue là sa première mission au Proche-Orient de l'année, mais la douzième depuis qu'il a été nommé par le président américain il y a un an, et sans doute la plus difficile. Sa rencontre avec M. Abbas a pris fin sur un constat de désaccord dans un climat de scepticisme général quant à une relance du processus de paix.
« Nous voulons reprendre les négociations sur la base d'une délimitation des frontières d'un État palestinien sur toutes les terres palestiniennes occupées depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, et d'un arrêt total de toutes les activités de colonisation », a déclaré le négociateur palestinien Saëb Erakat aux journalistes à l'issue de trois heures d'entretien. « La partie américaine veut maintenant reprendre les discussions sans demander un gel complet des colonies », a constaté M. Erakat, soulignant que le président américain restait toutefois engagé dans le règlement du conflit israélo-palestinien. M. Mitchell n'a fait aucun commentaire.
Dans une interview publiée jeudi par l'hebdomadaire Time, le président Obama a lui-même reconnu avoir mal évalué les possibilités de paix au Proche-Orient. « Je pense que nous avons surestimé nos possibilités de les convaincre (Israéliens et Palestiniens) » d'engager des négociations de paix, a-t-il avoué candidement. « C'est un problème inextricable », a-t-il estimé, en renvoyant Israéliens et Palestiniens dos à dos. « C'est vraiment très dur (...) et si nous avions anticipé plus tôt certains de ces problèmes politiques de la part des deux camps, nous n'aurions pas suscité des attentes si fortes », a confié le président américain au magazine.
Côté israélien, l'heure est aussi au pessimisme sur une reprise rapide des négociations de paix suspendues il y a un peu plus d'un an. « Les chances d'une reprise du processus de paix sont minces », a déclaré un ministre israélien au quotidien Haaretz, estimant sous le couvert de l'anonymat que la mission Mitchell est vouée à l'échec.
Par ailleurs, plusieurs médias arabes ne donnent pas cher de l'avenir de George Mitchell comme émissaire de paix américain au Proche-Orient. Certains analystes arabes prédisent même que l'ancien sénateur du Maine, âgé de 76 ans, pourrait démissionner dès son retour de sa frustrante mission en cours, estimant avoir donné le meilleur de lui-même durant la première année de mandat d'Obama. Rien ne confirme encore ces spéculations, mais beaucoup misent sur un retour de l'ancien médiateur américain au Proche-Orient Dennis Ross, un diplomate chevronné de 61 ans qui connaît le dossier sur le bout des doigts.
Pour l'analyste palestinien George Giacaman, de l'université palestinienne de Bir Zeït, l'interview d'Obama à Time « marque un tournant ». « S'il reconnaît maintenant que le processus rencontre des difficultés et qu'il a péché par optimisme, cela augure mal de l'avenir. » Même si le président américain s'est dit résolu, dans cette interview, à poursuivre ses efforts de paix au Proche-Orient, le bilan qu'il en dresse, selon Giacaman, s'interprète au mieux comme « une manifestation d'exaspération » et au pire comme le prélude à « l'abandon de tout processus politique crédible ».
Shimon Shiffer, chroniqueur au journal israélien Yediot Ahronot, assure, lui, que Netanyahu s'attendait à l'échec d'Obama, faute de connaissance des positions fondamentales des Arabes, mais surtout parce qu'il a cru, à tort, pouvoir faire pression sur Israël au sujet de la colonisation en échange d'un engagement à défendre l'État juif contre la menace iranienne. Selon des sources palestiniennes, George Mitchell doit revoir aujourd'hui Benjamin Netanyahu.