lundi 3 octobre 2011

Des Palestiniens mécontents de l'émissaire Tony Blair

02/10/11
par Nidal al-Mughrabi
GAZA (Reuters) - Des dirigeants palestiniens commencent à exprimer à haute voix un ressentiment à l'égard de Tony Blair, l'émissaire du "Quartet" international pour la paix au Proche-Orient, qu'ils accusent de partialité en faveur d'Israël.
Les propos officieux par lesquels ils laissent entendre que l'ancien Premier ministre britannique devrait être remplacé coïncident avec une initiative palestinienne visant à faire reconnaître un Etat de Palestine aux Nations unies, envers et contre une vive opposition d'Israël et de son allié américain.
Bien qu'aucune requête n'ait été présentée au Quartet pour qu'il choisisse un autre émissaire, certains responsables palestiniens ont déclaré ce week-end à des journalistes qu'ils étaient las des préjugés pro-israéliens qu'ils prêtent à Blair.
Bassam al Salhe, responsable de l'Organisation de libération de la Pa lestine (OLP), a déclaré dimanche voir en Tony Blair un "associé du gouvernement israélien" plus qu'un émissaire neutre du Quartet composé des Etats-Unis, de l'UE, de la Russie et de l'Onu.
Il a fait état d'une tendance croissante des dirigeants palestiniens à boycotter Tony Blair en contestant sa crédibilité.
Israël a fait savoir dimanche qu'il acceptait l'appel du Quartet en faveur d'une reprise des négociations de paix avec les Palestiniens, qui maintient pour leur part que l'Etat juif doit au préalable mettre fin aux constructions de nouveaux logements en Cisjordanie occupée.
S'adressant samedi à des journalistes, le responsable palestinien Nabil Chaath a estimé que Tony Blair était aujourd'hui "de peu d'utilité".
Le principal négociateur palestinien, Saeb Erekat, a toutefois souligné qu'aucune initiative en cours ne visait à boycotter Tony Blair ni à réclamer son remplacement.
"COMME UN DIPLOMATE ISRAÉLIEN"
Un porte-parole de Blair a dit que les démarches diplomatiques se poursuivaient sans changement et qu'il n'avait connaissance d'aucune plainte formelle concernant le travail de l'émissaire. Tony Blair représente le Quartet depuis 2007.
"D'après les échanges qu'a eus Tony Blair ces derniers jours avec de hauts responsables palestiniens, cela se passe comme d'habitude, a-t-il dit. Nous nous concentrons sur (...) la reprise de pourparlers directs entre les parties. Le représentant du Quartet a pour tâche d'assurer l'interaction avec les deux parties."
Le Quartet, créé en 2002, a joué un rôle d'appoint mais subordonné à celui de Washington dans les efforts de médiation censés aboutir à un règlement négocié du conflit, qui dure depuis 63 ans.
Des commentateurs pales tiniens ont cependant estimé la semaine dernière que les Etats-Unis ne pouvaient plus prétendre au rôle d'"honnête courtier" du fait que Barack Obama avait mis en garde le président Mahmoud Abbas contre la tentation de prendre des "raccourcis" vers la reconnaissance d'un Etat palestinien.
Les Palestiniens font valoir qu'ils ont patienté dix-huit ans au fil de pourparlers qui se sont révélés vains et en marge desquels Israël avait continué à construire des implantations sur des terres qu'ils revendiquent pour un futur Etat, tandis que les grandes puissances ne faisaient rien pour s'y opposer.
"Tony Blair est devenu indésirable. Il n'a aucune crédibilité et ne fait qu'affaiblir le Quartet", a dit Saleh par téléphone à Reuters.
"Blair a dénaturé sa tâche, qui exige de sa part qu'il reste neutre. Il n'est pas neutre.
"On ne trouve personne parmi les dirigeants (palestiniens) qui ne mette en cause la crédibilité de Blair."
Nabil Chaath a aussi exprimé une nette déception. "Nous pensions que (Blair) enrichirait grandement ce poste et serait d'un soutien réel aux Palestiniens", a-t-il dit. Mais au fil du temps, son rôle s'est réduit à "demander aux Israéliens d'enlever une barricade ici ou là (en Cisjordanie".
"Ces derniers temps, (...) il s'exprime comme un diplomate israélien. Son principal souci est de ne pas irriter les Israéliens, aussi se contente-t-il de vendre leurs programmes, leurs projets, et si c'est en cela que consiste son action, il sera de peu d'utilité pour nous", a ajouté Nabil Chaath.
Avec Ali Saouafta à Ramallah, Philippe Bas-Rabérin pour le service français
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