mardi 15 novembre 2011

Israël réprime ses propres sujets

15-11-2011 
Le camp ultra-nationaliste en Israël intensifie son offensive législative tous azimuts contre les institutions classées à gauche, notamment les ONG, sans se soucier des craintes pour la démocratie que cette campagne suscite en Israël et à l'étranger.  
Dimanche, l'extrême droite a marqué un nouveau point en obtenant le feu vert du gouvernement à deux propositions de loi controversées ciblant le financement d'ONG israéliennes hostiles à l'occupation et à la colonisation des Territoires palestiniens.  
Lundi soir, la Knesset (Parlement) a approuvé par 52 voix contre 35 et 2 abstentions un projet de loi du gouvernement modifiant la composition de la commission de désignation des juges à la Cour suprême. Ce texte doit permettre la nomination au sein de la Cour d'un juge connu pour ses opinions de droite.  
La semaine prochaine, le gouvernement est censé examiner une autre proposition de loi accordant un droit de veto aux parlementaires, en majorité de droite, à la désignation des juges de la Cour suprême, institution qui est la bête noire de l'extrême droite et des ultra-orthodoxes religieux.  
Dans le même esprit, des députés qui dénoncent le comportement jugé "antinational" de certains journalistes proposent d'aggraver la législation sur la diffamation.  
"Il s'agit ni plus ni moins d'instaurer une dictature de la majorité par cette triple offensive" qui vise les ONG, le pouvoir législatif et la liberté de la presse, a estimé lundi un commentateur de la radio publique, Moshé Negbi.  
"Ils ne veulent pas de la démocratie", titre à la Une le quotidien à grand tirage Yédiot Aharonot.  
"Ils en ont assez des règles du jeu de la démocratie occidentale. Elle n'a jamais été à leur goût. Maintenant, ils sont décidés à la détruire", accuse son journaliste vedette Nahum Barnéa.  
Les propositions de loi sur les ONG prévoient de limiter leur financement par des Etats ou des institutions internationales qui cherchent "à influencer la politique diplomatique et sécuritaire d'Israël", et de les taxer de façon draconienne.  
Si elles entraient en vigueur, ces deux lois permettraient de limiter les activités d'ONG marquées à gauche, qui reçoivent notamment des subventions de l'Union européenne.  
En revanche, elles ne porteraient pas atteinte à des ONG de droite ou d'extrême droite qui financent la colonisation grâce à l'appui d'organismes privés juifs ou fondamentalistes chrétiens, en particulier américains.  
Cette initiative fait fi des protestations d'associations de défense des droits de l'Homme, de juristes, d'une grande partie des députés de la Knesset --où la loi doit encore être examinée-- et de la communauté internationale.  
M. Netanyahu et dix ministres ont voté pour, et cinq contre. Mais au sein même de la coalition de droite, plusieurs ministres et députés ont réitéré leur hostilité à ces projets de loi.   
Même le conseiller de M. Netanyahu sur les questions de sécurité nationale, Yaakov Amidror, considéré pourtant comme un "faucon", a fait part de son opposition compte tenu des réactions négatives en Europe.
"Cette vague de lois menace les fondements de la démocratie à l'heure où Israël fait valoir son caractère démocratique de par le monde", a averti lundi le président de la Knesset, Réuven Rivlin.  
La chef l'opposition, Tzipi Livni, à la tête du parti centriste Kadima, a dénoncé l'offensive anti-ONG du gouvernement, estimant qu'elle "traduisait une tendance du gouvernement à étouffer toute critique interne et à confondre patriotisme et ultranationalisme".  
Cet été, déjà, l'extrême droite était parvenue à faire adopter une loi interdisant en Israël d'appeler au boycottage des colonies.
Dans la pratique, cette loi n'est pas appliquée, mais elle permet de poursuivre des artistes qui afficheraient leur refus de se produire dans des colonies, des professeurs qui refuseraient publiquement d'y donner des conférences, et des associations qui exhorteraient à ne pas consommer leurs produits.
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