mardi 3 août 2010

Israël craint que la Turquie trahisse des secrets militaires

03/08/2010
Le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, craint que la Turquie, en froid avec Israël depuis l'abordage sanglant d'un convoi d'aide à Gaza il y a deux mois qui a coûté la vie à neuf de ses ressortissants, trahisse des secrets militaires israéliens, a rapporté hier Radio Israël. La station se fait l'écho de propos tenus à huis clos par le leader travailliste à des militants de son parti de centre gauche le 25 juillet dans un kibboutz proche de Jérusalem.
Si Ehud Barak considère toujours la Turquie comme une « amie et alliée stratégique » qui s'est avérée fiable jusque-là, il a qualifié d'« ami de l'Iran » le nouveau chef de son Agence nationale de renseignements (MIT), Hakan Fidan. Ses propos dénotent la méfiance d'Israël devant l'inflexion de la stratégie diplomatique régionale d'Ankara et traduisent des doutes quant à la volonté, ou la capacité, de l'État hébreu de recoller les pots cassés avec la Turquie après l'affaire de la flottille pour Gaza.
Avant que le ciel ne s'obscurcisse entre les deux vis-à-vis de Méditerranée orientale, la Turquie était la puissance musulmane la plus proche d'Israël, les deux pays fondant principalement leur relation sur une coopération étroite en matière de renseignement militaire. « Un certain nombre de secrets » d'Israël ont été partagés avec la Turquie et « l'idée qu'ils puissent devenir accessibles aux Iraniens dans les prochains mois est, dirons-nous, assez perturbante », a confié Ehud Barak aux militants travaillistes.
Un participant à la rencontre a confirmé hier à Reuters la teneur de ces propos, dont un responsable du ministère de la Défense a précisé qu'ils avaient été tenus en privé et ne devaient pas être diffusés.
Nommé en mai à la tête du MIT, Hakan Fidan était jusque-là conseiller diplomatique du Premier ministre turc, Tayyip Erdogan, dont le parti au pouvoir plonge ses racines dans un islam politique peu complaisant envers l'État juif. Ce civil, fin connaisseur de l'Iran, a joué un rôle-clé, quoique peu médiatisé, dans les efforts de médiation déployés par Ankara sur le dossier nucléaire, notamment dans le projet de compromis avec Téhéran proposé par la Turquie et le Brésil à des puissances occidentales très réticentes. « Si quelqu'un comme Barak exprime pareilles craintes, cela montre qu'il y a un blocage au niveau des canaux d'échange de renseignements », relève Ali Nihat Ozcan, analyste au centre de réflexions Tepav d'Ankara. « On croit comprendre qu'ils sont fous à l'idée que la Turquie puisse partager avec l'Iran ce qu'elle avait partagé auparavant avec Israël », ajoute-t-il.
De leur côté, les responsables turcs n'ont fait aucun commentaire public sur l'état de leurs relations avec Israël dans ce domaine, mais les médias turcs observent avec méfiance la collaboration prêtée à Israël avec les Kurdes du nord de l'Irak, cousins des séparatistes du PKK de Turquie.
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