Stephanie Westbrook
Mondoweiss
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          Car il n’y a rien de vert dans l’occupation et la colonisation,  rien d’écologique dans la violation des droits et de la dignité des  hommes.         
                    
 Les Palestiniens eurent leur  cérémonie aussi : 
250 oliviers arrachés par les colons à Qaryut, 300 à Mihmas...
250 oliviers arrachés par les colons à Qaryut, 300 à Mihmas...
Le 22 avril, Journée mondiale de la Terre, dans 14  villes israéliennes, des maisons, des bureaux et des édifices publics  éteignirent leurs lumières pendant une heure pour « amener  à prendre conscience de la nécessité vitale de réduire la consommation  d’énergie ». Pour ces commémorations de la Journée de la Terre, il y  eut des tableaux de prairies, d’éoliennes et d’arcs-en-ciel, projetés  sur les murs de la Vieille Ville de Jérusalem, la cérémonie du Green  Globes Award louant « cette exceptionnelle contribution à  la promotion de l’environnement », et il y eut même un concert,  place Rabin à Tel-Aviv, alimenté par des générateurs qui ont fonctionné à  l’huile végétale et aussi par 48 bénévoles à vélo qui ont pédalé sans  arrêt pour produire l’électricité.
Le côté ironique n’a pas échappé au million et demi  d’habitants de la bande de Gaza qui vivent avec des pannes d’électricité  quotidiennes durant des heures et cela depuis près de trois ans, à  cause du siège israélien sur leur territoire côtier. Le coordinateur  israélien des activités gouvernementales dans les Territoires (le COGAT)  rapporte que plus de 100 millions de litres de combustibles ont été  autorisés à entrer dans la bande de Gaza en 2009, sauf que Gisha (ONG  israélienne) fait remarquer que cela ne correspond qu’à 57% des besoins.  A l’approche de l’été qui est une période de consommation de pointe, il  y a un besoin urgent de pièces de rechange et d’outils pour réparer les  turbines. Plus de 50 camions chargés de matériel électrique attendent,  en ce moment, l’autorisation des autorités israéliennes pour entrer dans  Gaza.
Les coupures incessantes d’électricité ont conduit de  nombreuses familles de la bande de Gaza à avoir recours à des  générateurs de qualité inférieure utilisant des combustibles eux-mêmes  de mauvaise qualité (générateurs et combustibles venant d’Egypte par les  tunnels), provoquant ainsi une forte augmentation des accidents  entraînant des blessures et des morts. Selon l’OCHA (Bureau de  coordination des affaires humanitaires des Nations unies), au cours des  trois premiers mois de 2010, ce sont 17 personnes qui sont mortes dans  des accidents liés aux générateurs, notamment dans des incendies ou par  intoxications au monoxyde de carbone.
Le maire de la ville de Ra’anana, dans le centre  d’Israël, ville qui réserve 48% de son territoire à des parcs, a promis  de planter des milliers d’arbres dans le cadre de son projet de  développement durable de la ville. Les agriculteurs palestiniens du  village de Qaryut en Cisjordanie, près de Naplouse, ont eu eux aussi  leur cérémonie de plantations d’arbres pour commémorer la Journée de la  Terre, mais pour trouver 250 jeunes oliviers déracinés par les colons  israéliens de la colonie de Givat Hayovel. 300 autres furent arrachés  dans la nuit du 13 avril, à l’extérieur du village palestinien de  Mihmas, par des colons de l’avant-poste voisin de Migron. Le Centre de  recherche de la Terre palestinien estime que plus de 12 000 oliviers ont  été déracinés dans toute la Cisjordanie en 2009, les autorités  israéliennes en étant responsables à 60%, qui défrichent les terres pour  les colonies et la construction du mur, et les colons pour les 40%  restant.
La Journée de la Terre, à Gaza, a fait venir des  bulldozers blindés israéliens, escortés par des chars d’assaut, qui ont  procédé au défoncement de champs de blé, de seigle et de lentilles  d’hiver à Al Faraheen, près de Khan Younis, dans la zone tampon imposée  par Israël, anéantissant ainsi les moyens de subsistance de toute une  famille palestinienne, parce que, comme Max Ajl, qui a filmé toute cette  scène honteuse (voir vidéo ci-dessous), l’a expliqué, « Ils  le pouvaient ».
Mais ce n’est pas tout ce qui a été déterré dans Gaza.  Le Service de l’action antimines des Nations Unies (UNMAS) a découvert  et récupéré 345 engins de guerre non explosés, dont 60 obus au phosphore  blanc qui restaient de l’agression israélienne contre Gaza (décembre  2008/janvier 2009). Environ la moitié a été trouvée sous les décombres  des immeubles détruits.
Alors que le ministère israélien de la Protection de  l’Environnement lançait son programme Côte propre 2010  pendant la Journée de la Terre, quelque part, pas loin, quelque 60  millions de litres d’eaux usées, totalement ou partiellement traitées,  étaient déversés dans la Méditerranée depuis des stations d’épuration  éculées, sous financées et rarement réparées. Les dégâts provoqués par  les frappes aériennes israéliennes et le manque d’électricité et de  pièces de rechange à cause du blocus font qu’il est impossible pour les  stations de répondre aux besoins du million et demi d’habitants de la  bande de Gaza, avec le débordement quotidien qui crée de graves menaces  pour la santé.
En plus du prix Green Globe, le ministère de la  Protection de l’Environnement avait fait, le mois dernier, sa propre  cérémonie de remises de prix aux chefs, soldats et unités des Forces de  défense israéliennes qui « s’étaient surpassés pour  protéger l’environnement, les ressources environnementales et le  paysage. » Le thème de la compétition cette année était l’« eau »,  et il prévoyait des projets liés à la « protection des  sources d’eau » et à « l’économies de l’eau ».
Pour les Palestiniens qui vivent en Cisjordanie, cette  « protection des sources d’eau » a été commentée dans un rapport  d’Amnesty International, Troubled Waters, d’octobre  2009 : « La destruction par l’armée israélienne des  installations d’eau palestiniennes - récupération de l’eau de pluie et  citernes de stockage, bassins pour l’agriculture et canaux pour les  sources - au motif qu’elles avaient été construites sans autorisation de  l’armée israélienne s’accompagne souvent d’autres mesures dans le but  de réduire ou supprimer la présence des Palestiniens sur des zones  précises de Cisjordanie ».
Le rapport d’Amnesty International note également que  pendant des décennies, les colons israéliens ont plutôt « eu un accès quasi illimité à l’approvisionnement en eau  pour développer et irriguer les grandes exploitations agricoles qui  aident à soutenir les colonies israéliennes illégales. » Et ce n’est  nulle part plus évident que dans la vallée du Jourdain où 95% de la  région sont occupés par des colonies, des plantations et des bases  militaires israéliennes, et où « le prélèvement d’eau  par les Israéliens, en Cisjordanie, est le plus élevé ».
L’une de ces entreprises qui soutient l’économie  coloniale illégale est Carmel Agrexco, le plus grand  exportateur en produits frais d’Israël. De son propre aveu,  l’entreprise, qui est pour moitié propriété de l’Etat d’Israël, exporte  70% des produits cultivés dans les colonies de Cisjordanie. L’Europe est  de loin son plus gros marché, même si ses produits sont livrés jusqu’en  Amérique du Nord et en Extrême-Orient. Agrexco se présente comme une  entreprise verte, avec des emballages respectueux de l’environnement et  des produits biologiques, même si l’on peut prétendre que transporter  des poivrons naturels d’Israël vers les Etats-Unis n’est guère  écologique. Même si ce qu’Israël appelle, les « navires  verts », utilisés pour transporter les produits frais vers l’Europe,  sont baptisés Bio-Top et EcoFresh.
Mais il n’y a rien de vert dans l’occupation et la  colonisation, rien d’écologique dans la violation des droits et de la  dignité des hommes. C’est pourquoi une coalition internationale qui  soutient l’appel palestinien aux boycotts des produits israéliens a  braqué les projecteurs sur le retrait des produits Carmel Agrexco des  supermarchés - et des ports - à travers l’Europe.
 La Journée de la Terre, à l’origine, visait à une  mobilisation populaire, une protestation publique pour le changement et  une prise de conscience politique sur ces questions. Dans les  commémorations de la Journée de la Terre en Israël, c’est le système  d’apartheid qui apparaît à travers le blanchiment écologique. 
Vidéo : les bulldozers  israéliens à l’oeuvre à Al Faraheen, près de Khan Younis, dans la bande  de Gaza, filmés par Max Ajl.
Stephanie Westbrook est  citoyenne états-unienne, elle vit à Rome depuis 1991. Elle milite dans  des mouvements pour la paix et la justice sociale, en Italie, et s’est  rendue à Gaza en juin 2009.
Elle peut être jointe à l’adresse : steph@webfabbrica.com.
Pour plus d’informations sur les campagnes de boycott  ciblant Carmel Agrexco en Europe, voir :
Royaume-Uni : http://www.bigcampaign.org/
Italie : http://www.stopagrexcoitalia.org/
France : http://www.coalitioncontreagrexco.com/
Et voir notamment :
Italie : http://www.stopagrexcoitalia.org/
France : http://www.coalitioncontreagrexco.com/
Et voir notamment :
 "Boycott, désinvestissement, sanctions", une campagne  pour la justice » - de Ivar Ekeland, Annick Coupé, Nahla Chahal et  Michèle Sibony
  "Boycott, désinvestissement, sanctions", une campagne  pour la justice » - de Ivar Ekeland, Annick Coupé, Nahla Chahal et  Michèle Sibony Du rapport Goldstone à la campagne contre Agrexco -  d’Alain Gresh
  Du rapport Goldstone à la campagne contre Agrexco -  d’Alain Gresh                24 avril 2010 - Mondoweiss - traduction : JPP
 
 
