samedi 3 octobre 2009

Mubarak et Abbas vont-ils finir par se rebiffer ?

vendredi 2 octobre 2009 - 05h:27

Abdel Bari Atwan


Les prétendus « Arabes modérés » ont essuyé deux revers ces derniers jours : le premier, quand le Président Obama a laissé tomber sa demande d’un gel de l’activité israélienne dans les colonies comme condition préalable à la reprise du processus de paix ; le second, quand le ministre de la culture égyptien, Farouk Hosni, n’a pas obtenu le poste de président de l’UNESCO.

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Mubarak et Obama

Les gouvernements qui sont sages et qui respectent leurs peuples souhaiteront comprendre ce qui sous-tend ces problèmes et l’ingratitude occidentale qui les a suscités. Ils en tireront aussi les leçons et élaboreront une nouvelle stratégie afin de rectifier leurs erreurs et adapter leur disposition d’esprit ; ils adopteront de nouveaux plans d’action qui ne se baseront pas sur un désir de vengeance, mais par lesquels ils chercheront à trouver le moyen de servir les intérêts nationaux et pan-arabes avec habilité et efficacité.

L’expérience, tant avec le camp arabe « modéré » qu’avec « l’opposition » (c’est ainsi qu’on les appelle de nos jours), n’est absolument pas encourageante et a montré que les chances de changement sont au mieux limitées, sinon totalement inexistantes.

Nous ne croyons absolument pas que le Président palestinien Mahmoud Abbas - qui a été forcé par le Président Barack Obama des USA de serrer la main du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, et de son Ministre des affaires étrangères, Avigdor Lieberman, et a été invité à de nouvelles négociations sans qu’il soit question de geler les colonies - que donc Mahmoud Abbas retournera à Ramallah pour commencer à préparer une nouvelle Intifada, à l’instar de son prédécesseur, feu Yasser Arafat, au retour de Camp David quand il s’est rendu compte que la paix selon les USA signifiait renoncer à Jérusalem et au droit au retour des réfugiés palestiniens.

Nous ne nous attendons pas à ce que le Président Hosni Moubarak change de position ou mette en péril sa relation étroite avec Netanyahu, même si ce dernier avait promis personnellement qu’Israël soutiendrait Faruq Hosni lors de l’élection à l’UNESCO et arrêterait la violente campagne juive contre lui. La suite a montré que les hauts fonctionnaires du gouvernement israélien n’ont jamais cessé de manœuvrer contre l’élection du candidat égyptien, l’accusant d’antisémitisme et exigeant son élimination de toutes les manières possibles.

Les présidents palestinien et égyptien se soucient trop de garder le pouvoir pour prendre une mesure risquant de fâcher le maître de la Maison-Blanche et ses alliés européens. Abbas enverra ses négociateurs à Washington pour rencontrer leurs homologues israéliens en réponse à l’invitation des USA comme s’il ne s’était pas rendu compte que l’administration d’Obama avait reculé sur la question des colonies. Le second président, Moubarak, continuera à recevoir Netanyahu et Barak et s’emploiera à renforcer sa relation étroite avec la troïka européenne qui l’a poignardé dans le dos et a voté pour la candidate bulgare, à savoir Sarkozy (France), Berlusconi (Italie), et Zapatero (Espagne).

Ces deux présidents oublient pratiquement la dignité nationale quand ils traitent avec les dirigeants israéliens et occidentaux. Comment expliquer autrement la rencontre et la poignée de main du Président Abbas avec Netanyahu et Lieberman, sans parler de Barak, alors qu’à deux reprises il a absolument refusé de serrer la main de Khaled Meshal, président du bureau politique du mouvement islamique de résistance (Hamas), pendant ses visites à Damas - au cours de la première, il a rencontré tous les chefs des mouvements de résistance à l’exception de Meshal.

Allons plus loin et demandons innocemment les raisons pour lesquelles le Président Hosni Moubarak n’a pas reçu son homologue syrien, ni ne lui a serré la main et ne s’est pas rendu à Damas, alors qu’il a reçu Netanyahu deux fois en quatre mois : la première à Charm el-Cheikh, la seconde fois, il y a 10 jours, au Caire, où il l’a invité à une rupture de jeûne pour le Ramadan, comme si le premier ministre israélien était l’un de ceux qui prêchent le paradis.

Nous souhaitons que le Président Mubarak se rende juste compte combien profondément son pays a été blessé par les résultats humiliants de la compétition et de la décision de l’UNESCO qui a suivi. Il avait personnellement mis tout son poids derrière Husni et il a agi comme s’il contrôlait sa campagne électorale en plaçant sa candidature en premier point de l’ordre du jour de ses entretiens avec Netanyahu et avec le président français lors de sa visite récente à Paris, quand les journaux français avaient signalé que le but principal de la visite était d’obtenir le soutien de la France au candidat égyptien.

Nous ne demandons pas que le président égyptien envoie son armée contre Israël, qu’il boycotte les Etats-Unis, ou tourne le dos aux pays européens qui l’ont laissé tomber, lui et son candidat, en lui préférant un candidat européen qui a franchement reconnu sa nostalgie du communisme et dont le pays a quitté le Pacte de Varsovie il y a très peu d’années.

Nous voulons que le Président Mubarak exige de son allié, le Président Abbas, qu’il ne retourne pas à la table des négociations avec Israël sans un arrêt complet de l’activité colonisatrice, avec des références très précises à la levée du blocus imposé aux fils de la bande de Gaza et à la conduite d’une initiative arabe de réconciliation qui mette en ordre la maison arabe et impose que soit respectée l’initiative arabe pour la paix.

Si cette demande est impossible en raison du refus par Mubarak de tout type de confrontation ou de désaccord, sauf quand cela concerne précisément ceux qui s’opposent à lui, les frères [musulmans], ceux qui meurent de faim dans la bande de Gaza, et les frères dans le Halayib soudanais, nous proposons qu’il ordonne au moins à ses forces dans le Sinaï de ne pas prendre pour cible et tuer les immigrés africains s’infiltrant en l’Israël, et qu’il cesse de jouer le rôle du gardien de frontière, laissant ce business inhumain aux Israéliens de l’autre côté.

L’administration d’Obama qui néglige les Arabes et cède totalement et d’une manière honteuse à la pression de Netanyahu sur le gel des colonies, ne peut pas sponsoriser de négociations fructueuses traitant des questions liées au statut final telles que Jérusalem, les réfugiés, les frontières, et l’Etat palestinien indépendant. Obama a très bien réalisé qu’un désaccord avec Netanyahu serait pour lui et son administration très coûteux en raison de ses répercussions intérieures ; aucun dommage, naturellement, n’est à craindre lorsqu’on irrite les Arabes et leurs gouvernements, et cela pourrait même avoir des effets positifs pour la simple raison que les dirigeants arabes ont décidé d’être les outils des projets américains dans leur région, sans la moindre discussion.

Netanyahu a non seulement brisé la volonté d’Obama et de son administration mais il s’est également avéré être plus influent en Amérique que le président américain lui-même. Sa prochaine étape sera de casser la volonté des Nations Unies et de les forcer à annuler le rapport qui condamne les crimes de guerre israéliens dans la bande de Gaza et exige que ces responsables soient traduits devant la cour internationale de la Haye.

Notre malheur à nous Arabes, se résume à un dirigeant qui a paralysé le rôle de l’Egypte et a donc paralysé la région arabe, et à un président palestinien dont le rapport avec la Palestine, sa cause, ses martyres, ses prisonniers, son peuple est devenu vague et formel. Par conséquent les coups continueront à tomber l’un après l’autre sur cette nation.

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25 septembre 2009 - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.bariatwan.com/index.asp?...
Traduction : Anne-Marie Goossens et Claude Zurbach