lundi 31 août 2009

Difficile reprise des négociations sur le processus de paix israélo-palestinien

publié le dimanche 30 août 2009

Sylvain Cypel et Laurent Zecchini
Personne, à Washington comme à Tel-Aviv, ne s’attendait à ce que la rencontre à Londres, entre George Mitchell, l’émissaire américain pour le Proche- Orient, et Benyamin Nétanyahou, premier ministre israélien, soit suffisante pour aplanir un différend qui est l’un des plus graves dans les relations américano-israéliennes depuis une dizaine d’années.

Des médias israéliens font état, mercredi 26 août, de progrès liés à une intervention allemande dans les négociations indirectes entre Israël et le Hamas pour libérer le soldat Gilad Shalit, enlevé en 2006 près de la bande de Gaza. Les journaux notent à ce propos la visite en Egypte d’un dirigeant du Hamas, Mahmoud Zahar. Selon la radio publique israélienne, un haut responsable allemand s’est rendu aussi en Israël et en Egypte. L’Allemagne avait joué les intermédiaires en 2004 et avait obtenu la libération par le Hezbollah libanais d’un homme d’affaires israélien et les restes de trois soldats, en échange de la libération par Israël de 400 prisonniers arabes. En 2008, elle avait aussi joué un rôle dans les négociations qui ont permis la restitution des corps de deux soldats israéliens contre des prisonniers libanais.

Le communiqué commun rendu public, mercredi 26 août, à l’issue de quatre heures de discussions, ne dit rien de leur principale pomme de discorde, la question du gel de la colonisation juive dans les Territoires palestiniens occupés, considéré par le président américain Barack Obama comme le préalable indispensable à une relance du processus de paix israélo-palestinien.

MM. Nétanyahou et Mitchell ont estimé "nécessaire de commencer des négociations constructives entre Israël et les Palestiniens pour avancer vers un accord de paix régional". Ils ont ensuite appelé "toutes les parties à prendre les mesures permettant de faire progresser la paix".

Le premier ministre israélien a cependant fait état de "certains progrès". Selon le quotidien israélien Haaretz, les Américains auraient accepté que la partie est de Jérusalem soit exclue du gel de la colonisation. Si tel est le cas, il s’agirait d’une concession importante, et d’une mauvaise nouvelle pour les Palestiniens, qui ont toujours affirmé leur volonté de faire de Jérusalem-Est la capitale d’un futur Etat indépendant. Jérusalem, a insisté le chef du gouvernement israélien, est la "capitale indivisible et éternelle" d’Israël, "nous n’acceptons aucune restriction à notre souveraineté".

Dans l’esprit de M. Nétanyahou, c’est au tour des Palestiniens de faire un "geste", lui-même estimant avoir fait une concession en acceptant de suspendre les appels d’offres publics pour la construction de logements en Cisjordanie jusqu’au début 2010.

Pour les Américains comme pour les Palestiniens, celle-ci est très insuffisante. Toutes les parties savent que mettre un terme aux projets publics de construction laisserait 60 % des nouveaux logements en dehors de tout accord, car la construction de milliers de logements a déjà été autorisée, et que ce "gel" ne concernerait pas les projets privés.

"JARDINS D’ENFANTS"

Le premier ministre israélien s’est fait l’avocat des colons qui, a-t-il expliqué, doivent pouvoir mener "une vie normale" : ils ont besoin de "jardins d’enfants et de maisons pour leurs familles". Cette référence à une "vie normale" représente un glissement sémantique : jusque-là, les responsables israéliens parlaient de "croissance naturelle", c’est-à-dire démographique. Pour les Palestiniens et plusieurs organisations non gouvernementales, l’une ou l’autre appellation ne vise rien d’autre qu’une colonisation déguisée.

En échange d’une concession américaine sur Jérusalem-Est, M. Nétanyahou aurait accepté d’allonger de six à neuf mois (l’administration Obama demande un an) la période du gel de la colonisation en Cisjordanie, mais il exige des garanties permettant à Israël de reprendre la colonisation si les négociations échouent.

La rencontre de Londres n’est qu’un jalon dans un long processus. Des discussions doivent reprendre la semaine prochaine à New York entre M. Mitchell et le ministre israélien de la défense Ehoud Barak, ainsi qu’Isaac Molho, un avocat qui est l’homme de confiance de M. Nétanyahou. Le processus de paix reprend ainsi lentement, puisque la perspective d’une rencontre entre Barack Obama, Benyamin Nétanyahou et Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, semble se confirmer [1].

Cette rencontre pourrait se tenir fin septembre, à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies.

[1] et selon le Guardian relayé par Courrier international le 26.08.2009,

Barack Obama avance ses pions au Proche-Orient

"Obama est près de sceller un accord israélo-palestinien qui lui permettra d’annoncer la reprise des négociations de paix au Proche-Orient avant la fin septembre", écrit le quotidien britannique, citant des sources des gouvernements américain, palestinien, israélien et européens. Pour obtenir d’Israël le gel partiel de la colonisation dans les territoires palestiniens, Washington mettrait dans la balance de plus lourdes sanctions contre le programme nucléaire iranien. Benyamin Nétanyahou est actuellement en visite à Londres. http://www.courrierinternational.co... ,

le Figaro du 26 août

Sarkozy, Obama et le Proche-Orient

Jusqu’à présent, Barack Obama a choisi la discrétion pour négocier un gel total par Israël de la colonisation en Cisjordanie. Renouvelées encore hier lors d’une rencontre avec le premier ministre Benyamin Nétanyahou, à Londres, les efforts du représentant spécial américain, George Mitchell, ne semblent pas prêts d’aboutir. Le chef du gouvernement israélien exige que la construction puisse continuer pour accueillir la croissance démographique «  naturelle  » des implantation juives dans le territoire conquis en 1967.

Cette affaire est loin d’être nouvelle mais le calendrier est en train de la propulser sur le devant des préoccupations internationales. Obama a de plus en plus besoin de montrer qu’il peut obtenir un résultat diplomatique à la hauteur des espoirs qu’il a suscités. Ayant exigé publiquement un gel total de la colonisation, toute rebuffade de la part de Nétanyahou serait, pour lui, un échec et serait considérée, dans le monde arabe, comme la preuve qu’au-delà des bonnes paroles, rien n’a véritablement changé dans la politique des États-Unis.

Le chef du gouvernement israélien temporise. Moyennant quelques concessions, comme son acceptation tardive du principe des deux États, il espère trouver au Congrès suffisamment de représentants et sénateurs pour prendre le parti d’Israël dans son bras de fer avec la Maison-Blanche.

Pour le moment ce n’est pas le cas. La raison en est que l’électorat juif américain est plutôt démocrate et que la colonisation n’est pas quelque chose de vital pour la survie de l’État d’Israël. On peut, comme l’a fait hier Nicolas Sarkozy, exiger un «  gel précis et total  » de la construction dans les implantations sans mettre en question la sécurité de l’État juif. C’est d’ailleurs un point que le Président de la république a souligné tout en affirmant qu’«  il n’y aura pas de paix avec la poursuite de la colonisation  ».

Les propos très fermes du chef de l’État à l’égard de l’Iran, plus fermes que ceux que l’on entend à Washington, seront appréciés en Israël et donnent encore plus de poids à son intervention dans le débat sur la colonisation.

Pour Washington, il y a là un coup de pouce qui arrive a point nommé, au moment où la Maison-Blanche envisage de taper du poing sur la table pour arracher à Nétanyahou des concessions avant les rendez-vous diplomatique de septembre à l’ONU et au G-20. Obtenir un gel des colonies permettrait dans un mois au président américain de présenter au monde sa vision des négociations de paix et de se faire entendre dans le monde arabe.

Obama aura aussi relevé les propos très déterminés de Nicolas Sarkozy sur l’Afghanistan. Là encore, il y a la volonté de la part de la France d’être aux côtés des États-Unis dans un moment difficile. Cela suffira-t-il pour que Nicolas Sarkozy engrange des succès au G-20 de Pittsburgh sur la régulation financière, l’encadrement des bonus ou le climat, ou encore pour relancer l’Union pour la Méditerranée  ? Ce n’est pas sûr.

http://blog.lefigaro.fr/geopolitiqu... et l’Orient le Jour du 29 août :

publié par le Monde