mardi 8 juin 2010

Agression et black-out

Edition du 8 juin 2010
A tous ceux qui refusaient de s’exprimer sur l’agression contre des bateaux humanitaires et croyaient trouver une espèce de sortie, Israël vient d’opposer un niet catégorique. C’est simple, il n’y aura pas d’enquête de quelque nature qu’elle soit, et surtout pas telle que souhaitée par l’ONU, sauf si elle est menée par Israël. Mais comme celui-ci a donné sa version des faits, une telle demande devient sans objet, pour les Israéliens bien entendu, et tous ceux qui soutiennent sa version des faits en accréditant la violence israélienne, même si elle est qualifiée d’excessive ou de disproportionnée.
Une manière de réécrire le droit international, et celui de la mer en particulier, pour qui, toute attaque dans les eaux internationales est considérée comme un crime. Pas question alors de s’interroger sur la réaction des passagers, au demeurant tout à fait normale, sachant qu’ils ont été attaqués et qu’ils avaient le droit de se défendre, ce qu’ils n’ont pu faire, faute de moyens, comme l’ont assuré les pays de départ de la flottille. Ces éléments suffisaient pour douter de l’utilité d’une enquête, sur laquelle, rappelle-t-on, le Conseil de sécurité est demeuré vague, sinon sur un incroyable quiproquo quant à sa composition et l’étendue de ses prérogatives.
Un projet mort-né devrait-on dire, mais cela n’a pas empêché Israël de persister dans son intransigeance, en déclarant son rejet de toute initiative de ce genre. Son ambassadeur aux Etats-Unis a précisé que si le gouvernement israélien discutait avec le président américain, Barack Obama, de « la manière dont sera mise en place une enquête interne », Israël n’avait aucune intention d’accéder à la demande de nombreux pays et d’accepter une enquête indépendante sur le massacre commis le 31 mai par son armée. Cet ambassadeur ne s’est pas contenté d’annoncer seulement ce refus. Il a aussi affirmé que son gouvernement ne présenterait pas ses excuses à son homologue turc, et estimé que l’attaque qui avait mis le monde en émoi n’avait pas tendu les relations d’Israël avec l’Administration américaine. « Pendant tous ces jours de discussions avec l’Administration, je n’ai pas entendu une seule critique ou un propos rancunier », a-t-il assuré.
Forcément attentifs aux réactions israéliennes, les dirigeants turcs, qui ont déclaré que plus rien ne sera comme avant, ont annoncé hier qu’il n’y aura pas de normalisation des relations entre la Turquie et Israël en cas de refus d’une enquête. Le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, a rappelé que « la création de la commission prévue par le droit international et proposée par les Nations unies », est un appel au bon sens en quelque sorte, également lancé par d’autres pays connus pour être proches d’Israël. « S’ils n’acceptent pas cette commission, cela voudra dire qu’ils ont certaines réalités à cacher », a estimé le chef de la diplomatie turque.
Quant à la question de savoir que deviendrait la coopération militaire turco-israélienne, basée sur un accord liant les deux pays depuis 1996, M. Davutoglu a dit que la Turquie « continue d’examiner cette question ». La Turquie a fait savoir vendredi qu’elle allait réduire ses liens économiques et d’industrie de défense avec Israël, mais la coopération bilatérale ne sera pas entièrement gelée. Mais plus globalement, quelle sera la réaction internationale, certains pays se montrant particulièrement contrariés dans leur politique, par l’agression israélienne ?
Par Mohammed Larbi