dimanche 31 janvier 2010

Vider les villes arabes, une volonté sioniste

[ 31/01/2010 - 00:13 ]
Mohammed Wated

A l’instar de Jaffa, Al-Led et Ar-Ramla, à  l’intérieur d’"Israël", il y a des villes mixtes : des quartiers juifs et des quartiers arabes. Mais les aspects arabes de ces derniers, où habitent quelques 75 mille Arabes, commencent à s’effacer.
Depuis la Nakba (la catastrophe de 1948), "Israël" a démoli environ 22 mille maisons appartenant aux réfugiés arabes. Elle a aussi vendu plus de dix mille maisons à des riches juifs.
Il reste quelques onze mille maisons habitées par des Arabes. Ils payent des loyers annuels au gouvernement israélien, bien qu’elles soient à eux !
Sami Abou Chahada, chercheur dans les affaires de Jaffa, dit que le conflit est aussi politique qu’existentiel. On remarque une immigration négative. Les Arabes quittent Jaffa. Les statistiques disent de leur côté que quelque 13 mille Arabes habitent encore dans la ville. 75% d’entre eux habitent dans des maisons louées par des entreprises publiques. Ces sociétés ont mis la main sur les biens des réfugiés palestiniens et les louent.
Les biens des Arabes et des réfugiés se vendent aux Juifs riches à des prix exorbitants. Un hectare de ces terrains se vend à huit cent mille dollars. Le prix d’un appartement d’une centaine de mètres dépasse un million de dollars.
En parcourant les quartiers arabes, par les allures des maisons, on remarque tout de suite qu’elles sont habitées par des Arabes. Ce sont plutôt des maisons délabrées faites par l’assemblage de morceaux en zinc et en fer blanc, des vestiges d’anciennes maisons encore élevées pour être témoins d’une époque de crimes.
On remarque également de grandes tours, des appartements luxueux consacrés aux Juifs qui s’élèvent sur le terrain des Arabes.
Menace de liquidation
Récemment, deux cents familles arabes sont chassées de leurs maisons, ajoute Abou Chahada, sans leur trouver une alternative. Elles doivent quitter la ville pour aller vers les localités arabes à l’intérieur palestinien. Cinq cents autres familles luttent contre l’établissement officiel israélien qui avait publié des notifications leur ordonnant de quitter leurs maisons pour les démolir.
Abou Chahadda a sonné l’alarme contre la volonté de vider les villes mixtes de leurs habitants arabes. L’existence arabe dans la ville de Jaffa est en voie de disparition, dans la décennie à venir.
De plus, souligne-t-il, les occupants israéliens implantent des centaines de leurs agents avec leurs familles dans les quartiers arabes. Cette implantation laisse ses mauvaises influences sur le tissu social, économique et politique des habitants arabes.
La chance de la ville d’Ar-Ramla n’est pas meilleure. Les vestiges du passé sont témoins de la Nakba. Dans le présent, la ville vit des difficultés et vit dans un souci perpétuel d’un destin incertain, les habitants ayant peur d’être chassés et d’être sans-abris.
Les occupants israéliens ont démoli la maison de la famille de Farida Chaaban. Elle dit qu’il n’y a plus de sécurité. L’avenir est incertain pour les enfants. « Ma famille vit encore le fantôme de la Nakba. Nous sommes arrivés dans la ville d’Ar-Ramla en 1953, après avoir été chassés de la région d’Al-Aghouar. La Nakba n’est pas une histoire à raconter à nos enfants. Elle est toujours présente. Nous vivons toujours la Nakba. Nous avons peur qu’elle soit l’avenir de nos enfants, la Nakba ».
Aujourd’hui, il y a 15 mille Arabes dans la ville, quelque 20% des habitants. Ils vivent dans une peur bleue d’être chassés, de voir leurs maisons se faire détruire. De plus, tous les aspects historiques arabes sont visés par la mairie de la ville.
Bataille de survie
L’architecte Bothaïna Dabitt, responsable du projet des villes mixtes à l’association de Chatil, dit que depuis la Nakba, les Arabes des villes mixtes se battent pour leur survie dans la ville d’Ar-Ramla. En 1948, leur nombre était supérieur à vingt mille. Après la Nakba, il est passé à mille seulement. Ses 63 villages ont été totalement vidés.
Elle ajoute que la plupart des Juifs ont délaissé l’ancien bourg de la ville, ainsi que les quartiers habités par les Arabes. Ils ont installé des murs discriminatoires, séparant les quartiers juifs des Arabes.
Et en ce qui concerne les Arabes de la région du Néguev, environ cinq mille personnes, après avoir été chassés de leurs terres, ont réinstallées avec quelques cinq cent mille familles d’agents de l’occupant.
L’ingénieur affirme que la ville d’Al-Lid est habitée par vingt mille Arabes, 27% du nombre d’habitants. Récemment, 150 de leurs maisons ont été démolies. Il y a aussi cinq cents ordres de démolition de maisons existantes. Le nombre de maisons que l’établissement israélien considère comme illégales atteint 2500 maisons.
Par contre, aucune alternative n’existe pour les familles qui perdent leur domicile.
A Al-Lid, il y a une femme âgée porteuse d’une tenue arabe. Elle porte un de ses petits enfants. Le petit est beaucoup moins lourd que tous ces soucis dont celui d’être chassée. La poussière de la Nakba ne veut pas la quitter, ni ses petits enfants, ni les générations futures. Un train passe et détruit le mur de silence dans le camp de réfugiés. Le train passe, laissant les habitants originaires vivant en marge de la vie et sur les ruines.
Article publié par aljazeera.net, le 26 janvier 2010 Traduit par le Centre Palestinien d’Information (CPI)