vendredi 14 octobre 2011

L’accord sur les prisonniers entre Israël et le Hamas peut-il avoir un effet dynamique ?

13/10/11
Bichara Khader
Directeur du Centre d’études et de recherches sur le monde arabe contemporain (Cermac), à l’Université catholique de Louvain
« Le moment choisi pour ce marché est intéressant. Il a été conclu entre un premier ministre israélien isolé sur le plan international, qui fait face à une fronde sociale à l’intérieur de son pays, et un Hamas au pouvoir à Gaza, affaibli par le « printemps arabe » et par l’initiative diplomatique de reconnaissance de l’État palestinien lancée aux Nations unies par son concurrent, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.
Les négociations entre Israël et le Hamas durent depuis plusieurs années. Elles étaient sur le point d’aboutir en 2009, mais elles avaient achoppé sur des détails techniques. Le changement de climat à l’intérieur du monde arabe et l’intervention de la nouvelle diplomatie égyptienne, mais aussi des émissaires allemands, qatariens et autres, ont rendu ce marché possible.
Cependant, je ne crois pas que cela constitue une dynamique positive à l’avenir, car plusieurs milliers de Palestiniens demeurent toujours dans les prisons israéliennes. L’image de Mahmoud Abbas, un peu ternie auprès des Palestiniens, s’est largement améliorée depuis sa prestation aux États-Unis. Mais l’accord de libération des prisonniers pourrait faire grimper la popularité du Hamas.

La libération de Marwan Barghouti comme clé de compréhension

Dans la perspective des élections palestiniennes, le mouvement islamique peut revenir dans l’équation politique. Avec un Hamas revigoré et un Mahmoud Abbas qui se satisfait d’une victoire éphémère, aux effets finalement extrêmement problématiques et aléatoires, le jeu demeure ouvert dans la perspective des élections présidentielle et parlementaires, prévues prochainement.
Il sera intéressant de voir si Marwan Barghouti, figure de proue du Fatah, le parti de Mahmoud Abbas, fait partie des prisonniers libérés. Si tel est le cas, alors je subodore une volonté américaine de prévoir, dès à présent, une alternative à Mahmoud Abbas dans la personne d’un dirigeant palestinien à la fois populaire et favorable à la solution de deux États.
S’il n’est pas sur la liste, cela voudra dire que ce sont essentiellement des détenus proches du Hamas qui seront en majorité libérés. Ce qui renforcera le Hamas et le camp de ceux qui estiment que la résistance est payante. Dans ce cas, le premier ministre israélien Netanyahou aura contribué à renforcer indirectement le Hamas et à rendre la situation palestinienne plus volatile. »
Recueilli par Agnès ROTIVEL 
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