Jaffer Mehru - E.I
          Vienne (IPS) : Les prisonnières palestiniennes enfermées en  Israël sont souvent privées de représentation juridique et de soins  médicaux. De plus, elles sont emprisonnées dans des conditions  inhumaines obligées de partager leurs cellules avec des rats.         

Cette  ex-prisonnière ne peut évoquer sans émotion les humiliations subies de  la part des soldats israéliens lors de son enlèvement en Cisjordanie -  Photo : AFP
Selon Fabrizia Falcione, responsable des droits des  femmes pour le Fonds de Développement des Nations Unies pour la Femme  (UNIFEM), faisant dès lors partie de l’ONU Femmes, il est crucial de  dévoiler le visage humain derrière la violation du droit international  et du droit international humanitaire ceci dans le but d’améliorer le  sort des prisonniers politiques palestiniens, y compris celui des femmes  et des enfants.
Depuis 1967, plus de 700 000 Palestiniens, dont environ  10 000 femmes, ont été arrêtés ou détenus dans des prisons et des  centres de détention israéliens. Aujourd’hui, 37 détenues  palestiniennes, sur un total de 7500 prisonniers,  sont toujours  enfermées dans des prisons israéliennes. La raison est essentiellement  politique - la plupart des prisonnières sont des membres du Conseil  législatif palestinien.
Le travail de Madame Falcione consiste notamment à  fournir une aide et une représentation juridique aux femmes détenues, un  soutien psychosocial aux membres des familles de prisonniers et à la  préparation à la libération et la réinsertion des prisonnières. Cette  semaine, Madame Falcione a participé à la première réunion  internationale conduite par l’Organisation des Nations Unies sur la  question des prisonniers politiques palestiniens dans les geôles  israéliennes. Au cours des deux jours de réunion, elle a pris le temps  de parler à IPS sur l’urgence absolue d’adresser spécifiquement les  droits des prisonnières.
Inter Press Service :  Aujourd’hui, quelles sont les préoccupations les plus urgentes  concernant les prisonnières palestiniennes dans les prisons  israéliennes ?
Fabrizia Falcione : La  situation des femmes et des mineurs dans les centres de détention  israéliens est grave. En terme de chiffres, les prisonnières et détenues  politiques palestiniennes dans les prisons israéliennes ont presque  disparu comparées aux centaines de milliers de prisonniers politiques  palestiniens. Mais le sort des femmes en prison est pire que celui des  hommes.
La situation, les conditions et les violations subies  par les femmes dans les prisons en Israël doivent être adressées d’un  point de vue féminin. A l’heure actuelle, le nombre de femmes détenues  est considérablement plus faible que par le passé, mais les femmes et  les filles continuent d’être arrêtées, leurs spécifiques besoins  continuent d’être négligés et leurs droits bafoués.
IPS : Vous mentionnez des problèmes physiques et psychologiques des femmes incarcérées. Que voulez-vous dire ?
FF : Il y a un manque de services médicaux spécifiques pour la prévention et le traitement de maladies dites féminines.
En ce moment, les femmes détenues sont principalement  emprisonnées dans deux établissements israéliens, à Hasharon et à Damon -  les deux étant situés en dehors de la Cisjordanie Occupée et la Bande  de Gaza, ceci en violation de l’Article 76 de la Quatrième Convention de  Genève.
Des anciennes prisonnières dans ces deux prisons, ainsi  que les membres des familles de prisonnières encore en prison, ont  déclaré que les cellules sont infestées de cafards et de rats. Une  ancienne prisonnière, libérée il y a quelques mois, a déclaré “Peu  importe la façon dont je vous décris la cellule, je ne peux pas. C’est  une tombe souterraine”. Il y avait tellement d’insectes, les matelas et  les couvertures étaient humides et sentaient horriblement mauvais. Les  égouts débordaient. Je pouvais à peine faire mes ablutions”.
A part les soins de santé généraux, il n’y a pas de  soutien gynécologique. Les femmes ont besoin de soins médicaux  réguliers, qui est leur droit pendant leur emprisonnement comme le  prévoit le CEDAW (Le Comité pour l’élimination de la discrimination à  l’égard  des femmes). La majorité des prisonnières politiques dans les prisons  israéliennes souffrent de différents problèmes de santé.
IPS : Est-il exact que les femmes enceintes sont enchaînées lors de l’accouchement ?
FF : Oui, c’est exact. Il y  a un manque total de soins médicaux, particulièrement lors de  l’accouchement. Les femmes se plaignent que leurs enfants leur soient  retirés après deux ans. Dans les prisons israéliennes les droits des  prisonnières palestiniennes sont reconnus mais ne sont pas appliqués.
IPS : Et en ce qui concerne les problèmes psychologiques ?
FF : Les femmes portent le  poids de l’atteinte portée à leurs droits culturels et religieux. Une  ancienne prisonnière a déclaré : “Ils ont pris mon jilbab  (longue robe) et m’ont donné un uniforme brun à manches courtes. J’ai  demandé une chemise à manches longues pour porter sous l’uniforme, mais  ils ont refusé. Je me suis déplacée en uniforme à manches courtes entre  les cellules parmis des gardiens... Mais ce qui m’a le plus blessée ont  été leurs insultes.
La vie privée de la femme est violée. Les gardiens  effectuent des fouilles de chambres sans aucune considération pour les  normes religieuses. Quatre fois par jour,  les prisonnières sont  comptées, y compris très tôt le matin. La punition est immédiate si les  prisonnières sont endormies ou ne répondent pas à l’appel.
L’aspect le plus troublant est le déni des droits de  visite des familles. En théorie, deux visites par mois  sont autorisées,  mais sont fortement limitées du fait que les prisons sont en dehors des  Territoires Palestiniens Occupés.
Une visite aller-retour à la prison prend dix heures de  voyage - non seulement en raison de la distance géographique mais aussi  parce que les déplacements des Palestiniens en Israël sont contrôlés. Si  les familles parviennent à faire le voyage, elles sont autorisées à une  visite de 30 minutes - parlant à travers un épais diviseur en verre qui  empêche tout contact physique, même entre une mère et son enfant. Cela  affecte le bien-être non seulement de la mère mais aussi celui des  enfants. La rupture des relations familiales et sociales a un effet  sévère sur l’état psychologique des femmes.
IPS : De quoi ces femmes sont-elles exactement accusées ?
FF : Elles sont nombreuses  à être emprisonnées sans procès pour appartenance à des organisations  interdites par Israël, sous le prétexte de protéger la sécurité  nationale de l’Etat. Les prisonnières politiques palestiniennes sont enfermées dans la  section des femmes avec les condamnés de droit commun dans la prison de  Neve Terza, en violation flagrante de la règle 85 des Nations Unies pour  le traitement des prisonniers qui stipule que : “Les prévenus doivent  être séparés des détenus condamnés”.
Les prisonnières palestiniennes sont constamment  menacées verbalement et physiquement par les prisonnières israéliennes.  En outre, les prisonnières palestiniennes ne peuvent pas utiliser les  stylos et les livres dont disposent les établissements pénitenciers,  elles n’ont également aucun temps pour des loisirs.
11 mars 2011 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à : 
http://electronicintifada.net/v2/ar...Traduction de l’anglais : Christine Rossetti
 
 
