jeudi 14 avril 2011

L’université Carleton d’Ottawa se rapproche du désinvestissement

jeudi 14 avril 2011 - 06h:54
Les étudiants contre l’apartheid israélien
Avec le rassemblement devant le Conseil des gouverneurs, l’université Carleton à Ottawa se rapproche du désinvestissement des sociétés qui violent le droit international en Palestine.
Les membres du Conseil des gouverneurs de l’université Carleton doivent annuler leur réunion, le 29 mars 2011
Le 29 mars 2011, étudiants, professeurs, employés, associés et anciens associés de la communauté de l’université ont fait une avancée importante vers le désinvestissement de l’université Carleton à Ottawa, la capitale du Canada.
Dans un premier temps, l’organisation des Étudiants contre l’apartheid israélien (la SAIA) a lancé, en janvier 2010 sur le campus, une campagne pour le désinvestissement des fonds de pension. La campagne, dirigée par des étudiants, se fonde sur l’appel de juillet 2005 de la société civile palestinienne pour « imposer des initiatives d’envergure de boycotts et désinvestissements contre Israël... jusqu’à ce que cet État se conforme pleinement aux préceptes du droit international. »
Après plus d’un an de tentatives infructueuses pour rencontrer la Commission des fonds de pension de Carleton, la SAIA a déposé une demande officielle pour présenter notre motion au Conseil des gouverneurs de l’université - la plus haute instance décisionnelle de l’université ; motion qui demande notre désinvestissement de quatre sociétés qui se font les complices des violations du droit international en Palestine : BAE Systems, Northrop Grumman, Motorola et Tesco Supermarkets. Ces sociétés fabriquent de l’armement et des composants d’armement qui sont utilisés par l’armée israélienne contre les Palestiniens, et aident également à l’expansion des colonies illégales en Cisjordanie (sur le fond, voir : Carleton). La motion de la SAIA appelle aussi l’université Carleton à s’engager dans une politique contraignante d’investissements socialement responsables, en totale concertation avec la communauté de Carleton.
Pour essayer de réduire au silence les étudiants qui ont lancé la motion, le Conseil des gouverneurs a interdit à la SAIA de présenter sa motion lors de sa réunion. Il a fait savoir aux étudiants que la réunion apparemment publique allait être fermée à toute personne extérieure, sauf à une petite liste de cinq noms représentant les « deux opinions » qui sera autorisée par les gouverneurs, ajoutant que l’étage de l’immeuble où la réunion doit se tenir sera fermé par des agents de la sécurité postés à toutes les entrées.
(PNG) Et pourtant, ces tentatives de l’administration de l’université pour museler la longue liste de ceux qui participent à la campagne de désinvestissement - et qui comprend plus de 2000 signataires de lettres et de pétitions, tant d’étudiants des 1er et 2è cycle que du 3e cycle, des associations et plus de 25 clubs d’étudiants, des syndicats de salariés universitaires et des centres de services universitaires - ces tentatives se sont retournées contre leurs auteurs. Alors que nous étions à l’une des semaines universitaires les plus chargées de l’année, plus de 400 partisans du désinvestissement se sont rassemblés devant chaque entrée de l’immeuble pour protester contre le processus illégitime de prise de décision, et faire entendre un message commun : « Conseil des gouverneurs, nous ne vous lâcherons pas, nous ne vous lâcherons pas tant que vous n’aurez pas cédé ! ».
Dans une démonstration enthousiaste de solidarité, les étudiants et leurs amis se sont engagés pour une diversité de manifestations créatives, allant du sit-in jusqu’à danser la salsa et la dabké pour le désinvestissement ; ils ont bloqué avec succès plusieurs membres du Conseil à l’entrée de leur réunion. Finalement, les manifestants sont devenus bien trop mobilisés et bien trop énergiques pour que le Conseil continue de les ignorer. Ils ont annoncé à la foule des manifestants qu’ils annulaient leur réunion. Les membres du Conseil des gouverneurs qui avaient carrément marché sur les pieds des étudiants pour monter à l’étage de la réunion sont alors ressortis de l’immeuble dans une « marche de la honte » organisée par la masse des manifestants ravis.
Les partisans du désinvestissement ont ensuite tenu une assemblée générale de circonstance, présidée par des étudiants, dans le hall même de l’immeuble et ce, pour voter : pour se départir de l’occupation militaire israélienne ; pour ouvrir un Centre pour les victimes d’agression sexuelle sur le campus ; pour supprimer les frais pédagogiques ; et pour installer un nouveau Conseil des gouverneurs, représentatif et démocratiquement élu. Alors que cette assemblée générale n’était en fait qu’un exercice symbolique et que le désinvestissement véritable était encore à venir à Carleton, nous avons été convaincus que l’administration de l’université allait finir par céder à la pression des étudiants quand nous avons décidé d’insuffler pour l’année prochaine une plus grande dynamique encore à la campagne.
Le soutien et le dévouement sans précédent de nos amis à ce rassemblement n’ont pas simplement illustré le rejet unanime de la communauté universitaire de cette pratique d’investir l’argent de la scolarité des étudiants dans le financement d’une guerre et d’une occupation illégales, mais ils ont montré encore que la campagne de désinvestissement de la SAIA est devenue maintenant un mouvement à l’échelle du campus. Nos alliés ont fait de cette campagne leur campagne ; par exemple, Inés Barreda-Castañón, membre de l’organisation humanitaire des étudiants d’Amérique latine (HOLAS), a déclaré lors du rassemblement : « L’argent pour notre scolarité s’en va financer la guerre, financer la capitalisation et financer l’assassinat. Tout ça va au-delà de la SAIA et de la Palestine. HOLAS restera toujours là... c’est une question humanitaire, nous serons là. »
Faire cesser les investissements immoraux de Carleton s’intègre aussi dans un combat plus large contre les tentatives répétées de l’université pour faire taire le corps étudiant et pour faire appliquer des processus décisionnels non démocratiques. Il n’est pas surprenant que c’est à cette réunion, celle-là même à laquelle le public été empêché d’assister, que le Conseil des gouverneurs a annoncé une augmentation des frais de scolarité des étudiants. Le porte-parole de la SAIA, Reem Buhaisi, l’a dit au rassemblement : « Il s’agit de reconquérir notre espace, il s’agit de nos frais de scolarité, il s’agit de nous faire respecter et entendre par ceux qui disent promouvoir ce que nous demandons ».
Les actions de la SAIA pour dénoncer les manques incroyables de Carleton aux principes d’éthique et de responsabilisation ont publiquement fait honte à l’administration de l’université, qui n’aimerait rien tant que de voir la question du désinvestissement aller au diable. Mais, alors que la foule se dispersait après le rassemblement, la SAIA et nos amis ont été particulièrement clairs, le mouvement de désinvestissement des sociétés qui violent le droit international en Palestine occupée, ne fera que grandir, et jusqu’à ce que nos exigences soient satisfaites :

« Nous reviendrons ! ».

10 avril 2011 - Les étudiants contre l’apartheid israélien - Université Carleton
Carleton - Traduction : JPP
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