mercredi 16 mars 2011

Abdallah Abu Rahmah, organisateur de manifestations à Bil’in, est sorti de prison avec un jour de retard sur la date prévue de sa libération.

publié le mardi 15 mars 2011
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Abu Rahmah a été relâché ce soir (14 mars) , après avoir purgé une peine de 16 mois infligée par la Cour d’Appel Militaire israélienne, pour avoir organisé des manifestations. Abu Rahmah a été accueilli à la sortie de la prison par sa famille, ses amis, ceux qui le soutiennent. Il a promis qu’il continuerait à se battre.
Avec beaucoup de retard, Abu Rahmah, qui était supposé être libéré dès hier, a pu finalement quitté la Prison Militaire d’Ofer ce soir. Il a été accueilli par des centaines de personnes qui l’attendaient à la sortie de la prison.
Abu Rahmah, qui durant son procès a été déclaré par l’UE défenseur des droits humains et par Amnesty international prisonnier d’opinion, a juré de continuer de lutter contre l’occupation, en dépit de l’ emprisonnement injuste qu’il a subi, auquel s’ajoute une peine de six mois de prison avec sursis. Il a déclaré :’J’ai été libéré, mais ce n’est pas pour rentrer chez moi et rester à ne rien faire. De fait, en m’emprisonnant ils m’ont réduit au silence assez longtemps ! Notre cause est juste, il s’agit de faire tout ce que nous pouvons pour faire triompher la liberté et l’égalité, et je compte bien continuer à me battre dans ce but, comme je l’ai fait auparavant.
Contexte
Abu Rahmah, coordinateur du Comité Populaire de Bil’in Contre le Mur et les Colonies, a été arrêté hier par des soldats qui ont fait irruption dans sa maison au milieu de la nuit, et a été traduit en justice par un tribunal militaire israélien au motif, fallacieux, qu’il aurait lancé des pierres et qu’il possédait des armes. Ces deux dernières charges n’ont finalement pas été retenues par l’accusation, mais Abu Rahmah a été jugé coupable d’incitation au désordre et d’organisation de manifestations illégales.
Cas exemplaire de la perversité du système de justice militaire israélien en Cisjordanie, appareil à réduire au silence tout désaccord politique pourtant légitime, la condamnation d’Abu Rahmah a fait l’objet d’une vive critique.de la part de la communauté internationale. Après que les diplomates de l’UE eurent assisté à toutes les audiences dans l’affaire Abu Rahmah, Catherine Ashton, ministre des affaires étrangères de l’UE, a fait état de sa profonde préoccupation « que le possible emprisonnement de Mr Abu Rahmah ait pour but de l’empêcher lui, et d’autres Palestiniens, d’exercer leur droit légitime de protester ». A la déclaration de Mme Ashton a suivi celle du Parlement Espagnol.
L’Archevêque Desmond Tutu, militant de renom d’Afrique du Sud pour les droits humains, s’est adressé à Israël dans le but de lui faire annuler la condamnation d’Abu Rahmah, au nom des Sages, un conseil de personnalités internationales connus pour leur qualité d’ anciens hommes d’état, de militants pour la paix, de défenseurs des droits humains, rassemblés par Nelson Mandela. Des membres des Sages, parmi eux, Desmond Tutu, ont rencontré Abu Rahmah lors de leur venue à Bil’in, avant son arrestation.
L’organisation pour les droits humains Amnesty Internationale a assimilé la condamnation d’Abou Rahmah à une atteinte au droit à la liberté d’expression, et l‘a déclaré prisonnier d’opinion. Human Rights Watch a également dénoncé cette condamnation, réduisant toute cette mise en scène à « un procès injuste ».
Les organisations pour les droits humains israéliennes ont aussi critiqué l’accusation - parmi elles, B’Tselem- qui soulève la question de la légitimité de témoignages de mineurs utilisés pour condamner Abu Rahmah,et aussi l’Association pour les Droits Civiques en Israël (ACRI), qui souligne l’impossibilité pour les Palestiniens d’organiser des manifestations en Cisjordanie.
Contexte judiciaire
Abu Rahmah, coordinateur du Comité Populaire de Bil’in contre le Mur et les Colonies, a été acquitté de deux des charges portées contre lui- lancer de pierres, et possession d’armes, une accusation ridicule nourrie par le ressentiment. D’après l’acte d’accusation, Abu Rahmah aurait ramassé des grenades lacrymogènes et des douilles de balles tirées contre les manifestants, dans le but les exhiber pour montrer la violence utilisée contre les manifestants. Cette accusation absurde montre clairement la volonté du parquet militaire d’utiliser les procédures juridiques comme outil pour faire taire et diffamer des contestataires désarmés.
La Cour cependant a bien jugé Abu Rahmah coupable selon deux des articles les plus draconiens du code militaire en ce qui concerne la censure de la liberté d’expression : l’incitation, l’organisation de manifestations illégales et le fait d’y participer. Elle a procédé ainsi, s’appuyant sur les seuls témoignages de mineurs arrêtés en pleine nuit sans qu’ils puissent user de leur droit à être assister par un avocat, et malgré l’évidence d’incohérences notables lors de leur interrogatoire
La Cour n’a pas non plus été dissuadée par le fait que l’accusation a été dans l’incapacité de fournir des preuves concrètes impliquant Abu Rahmah de quelque façon, alors que toutes les manifestations à Bil’in sont systématiquement filmées par l’armée.