jeudi 9 décembre 2010

Colonies : l’impuissance américaine face à Israël

publié le mercredi 8 décembre 2010
al Ahram

 
Les Etats-Unis ont informé l’Autorité palestinienne de l’échec de leurs efforts pour obtenir d’Israël un nouveau moratoire sur la colonisation dans les territoires occupés, ont déploré les responsables palestiniens avertis justement de cet état des lieux alors que certains responsables américains, dont la secrétaire d’Etat Hillary Clinton, tentent de se dérober.
A cet égard, confirmant ceci de manière indirecte, un responsable du bureau du premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a renvoyé à la presse en guise de réponse un passage du discours que ce dernier avait prononcé la veille au Parlement. « Nous travaillons étroitement avec les Etats-Unis depuis plusieurs semaines pour trouver une voie afin de reprendre les négociations et c’est un objectif commun », a déclaré Netanyahu, sans évoquer un gel des colonies et en tentant d’imputer à l’Autorité palestinienne la responsabilité du blocage des négociations.
Réponse palestinienne : nous n’avons pas besoin qu’on nous donne une réponse puisque la réponse du gouvernement de Netanyahu a été l’annonce de la construction de 625 logements dans la colonie de Pisgat Zeev, de 130 autres dans la colonie de Gilo et avant cela d’une liaison ferroviaire entre la colonie d’Ariel et Tel-Aviv [1].
D’ailleurs, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbass, avait réaffirmé mercredi qu’il envisageait des alternatives aux négociations de paix en cas de persistance du désaccord sur la colonisation. « Si c’est accepté (le moratoire), nous sommes prêts, sinon nous annoncerons que cette option est terminée et nous nous tournerons vers d’autres », a-t-il indiqué. La Ligue arabe a avalisé le 8 octobre la position palestinienne, mais avait accepté d’attendre, pour se prononcer définitivement, le résultat de la médiation américaine. M. Abbass avait exposé lors de cette réunion arabe plusieurs alternatives aux négociations, à commencer par la présentation d’une demande de reconnaissance d’un Etat palestinien par les Nations-Unies faute d’être parvenu à un accord avec Israël .
Rien à attendre donc ? On se souvient d’ailleurs de cette phrase-clé de l’idéologie de Netanyahu : pas d’Etat palestinien entre le Jourdain et la Méditerranée. Une paix est donc plus ou moins illusoire sans de très fortes pressions américaines ; mais Washington est bien loin d’avoir la volonté de le faire [2].
[1] voir aussi l’Afp, relayée par Canoe Info :

Les Palestiniens accusent Israël d’être responsable de l’échec

Le gouvernement israélien de Benjamin Netanyahu a rejeté la paix en refusant de décréter un nouveau gel de la colonisation, a déclaré à l’AFP un responsable palestinien après l’annonce de l’échec de Washington de relancer les négociations de paix.
« En refusant de donner une réponse claire aux Etats-Unis, Israël a refusé de geler la colonisation et de donner une chance à la paix dans la région », a regretté ce responsable sous couvert de l’anonymat.
Les États-Unis ont annoncé mardi qu’ils avaient abandonné l’idée d’obtenir un gel de la colonisation israélienne en Cisjordanie afin de relancer les négociations au Proche-Orient.
Cet aveu marque un échec cinglant de la stratégie proche-orientale de l’administration Obama après des semaines de vains efforts pour redémarrer les négociations de paix bloquées depuis septembre en raison du contentieux sur la colonisation juive.
Les États-Unis avaient déjà informé jeudi l’Autorité palestinienne du président Mahmoud Abbas de l’échec de leurs efforts pour obtenir d’Israël un nouveau moratoire sur la colonisation dans les Territoires occupés.
« L’administration américaine nous a informés qu’Israël n’avait pas accepté un moratoire sur la colonisation », avait alors déclaré à l’AFP un haut responsable palestinien sous couvert de l’anonymat.
Le président Abbas, en visite officielle en Grèce, a reçu la réponse formelle des États-Unis, sous forme de lettre, dans la nuit de mardi à mercredi, a confirmé à l’AFP le porte-parole de M. Abbas, Nabil Abou Roudeina, lors d’un entretien téléphonique d’Athènes.
« Le président Abbas a dit à la partie américaine que la direction palestinienne et ses frères arabes allaient étudier la réponse officielle (américaine) avant de faire part de la position palestinienne », a expliqué M. Abou Roudeina.
Pour reprendre les négociations de paix, les Palestiniens exigent un gel de la colonisation en Cisjordanie occupée mais également à Jérusalem-Est annexée.
Le mois dernier, lors d’un entretien marathon avec la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton, chargée du dossier, M. Netanyahu avait accepté d’envisager un nouveau gel de 90 jours sur les constructions dans les implantations juives de Cisjordanie en échange d’une généreuse enveloppe de garanties sécuritaires et diplomatiques, dont des avions de chasse américains.
Mais le Premier ministre israélien a refusé de soumettre cette proposition au vote de son cabinet de sécurité tant qu’il n’aurait pas reçu une confirmation écrite des engagements américains.
Israël n’a jamais reçu cette lettre
Côté israélien, les médias, qui prennent acte de l’échec américain, assurent qu’« Israël et les États-Unis vont tenter de trouver d’autres moyens pour faire avancer le processus de paix ».
L’émissaire de M. Netanyahu, l’avocat Yitzhak Molcho, qui est à Washington, va s’efforcer dans les prochains jours de trouver avec des responsables de l’administration américaine « une autre voie » pour relancer les pourparlers avec les Palestiniens, a précisé la radio publique.
Selon le département d’État américain, les négociateurs israéliens et palestiniens sont attendus la semaine prochaine à Washington.
Cette annonce n’a pas été confirmée de source palestinienne. http://fr.canoe.ca/infos/internatio...
[2] voir aussi le Dr Hicham Mourad, dans al Ahram :

Défaillance

On le pressentait depuis des mois. C’est désormais officiel : les Etats-Unis ont échoué dans leurs efforts pour obtenir d’Israël un nouveau moratoire sur la colonisation dans les territoires occupés. Du coup, c’est tout le processus de paix palestino-israélien qui se trouve en ruine.
L’administration américaine se démenait depuis l’expiration, fin septembre, du moratoire israélien sur la construction dans les colonies de peuplement juif, pour obtenir un nouvel arrêt de 90 jours de la colonisation en Cisjordanie, afin de permettre la reprise des négociations palestino-israéliennes. Ce gel limité ne concernait pas Jérusalem-Est, malgré les exigences palestiniennes d’un arrêt total dans l’ensemble des territoires occupés. Les dirigeants israéliens ont toujours fait savoir que la construction de logements dans les quartiers juifs de colonisation à Jérusalem-Est allait se poursuivre, quitte à défier le président américain Barack Obama et la communauté internationale.
Poussant le défi, l’Etat hébreu a décidé la semaine dernière, avant même l’annonce jeudi par les Etats-Unis de l’échec de leur mission, d’autoriser la construction de 130 nouveaux logements dans le quartier de colonisation juive de Gilo, à Jérusalem-Est. Le programme porte sur 625 habitations à Pisgat Zeev, un secteur urbain qui jouxte Jérusalem-Est, la partie arabe de la ville annexée en 1967. Le projet a été approuvé par une commission du ministère israélien de l’Intérieur. Avec 50 000 habitants, Pisgat Zeev, fondé il y a vingt-cinq ans, est l’un des principaux quartiers juifs de la partie arabe de la ville sainte que les Palestiniens aspirent à en faire la capitale de leur futur Etat.
Alors que ces plans de construction compromettent sa politique au Proche-Orient, le locataire de la Maison Blanche s’est contenté de critiquer Israël en des termes très édulcorés. Il a ainsi estimé que l’action israélienne « n’aide pas » les négociations de paix. Cette douce critique a été rayée d’un trait par le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, qui a eu l’insolence de nier tout lien entre la politique de construction à Jérusalem et le processus de paix ! Mais sur quoi porte au juste ce dernier ? La terre, notamment à Jérusalem, n’est-elle pas le cœur même des pourparlers ?
L’arrogance du dirigeant israélien peut s’expliquer par la faiblesse de la politique américaine. Alors que l’arrivée au pouvoir du président Obama, début 2009, a soulevé de larges espoirs pour une politique nouvelle vis-à-vis de l’Etat juif, l’optimisme a progressivement cédé la place à l’inquiétude et l’amertume. Le retrait et la défaillance de la politique américaine face à Israël étaient bien visibles dans l’offre sans précédent de récompenses faites récemment à Tel-Aviv pour qu’il accepte une reconduction d’à peine trois mois du gel des colonies. Washington avait ainsi proposé tout un paquet de garanties politiques et d’armes sophistiquées et ultramodernes. En vain. Les dirigeants israéliens ont en effet compris qu’ils peuvent s’abstenir de faire la moindre concession, car les Etats-Unis ne peuvent ou ne veulent exercer davantage de pressions et qu’ils préfèrent plutôt la carotte au bâton. Avec le résultat que l’on connaît.
ajout de notes : CL, Afps