lundi 22 novembre 2010

"Israël, comme l’Afrique du Sud, est un Etat d’apartheid"

dimanche 21 novembre 2010 - 07h:44
Jon Booth
The MCGill Daily/Tadamon
Les Palestiniens vivant en Israël souffrent à la fois d’une législation discriminatoire et d’une application discriminatoire des lois prétendues neutres. La situation de la Cisjordanie est bien pire encore.
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A Huwara, au sud de Naplouse, l’un des 630 check-points disséminés sur toute la Cisjordanie, rendant toute vie normale impossible.
Le mot apartheid est l’un des éléments du mouvement de solidarité palestinien les plus controversés. Les opposants à la campagne de boycotts, désinvestissements et sanctions (BDS) prétendent que le mot apartheid est une diffamation qu’on utilise seulement dans le but de délégitimer Israël. Nous, à Tadamon ! cependant, nous pensons que ce terme est une qualification juridique juste pour l’Etat israélien, et nous ne reculons pas à utiliser un terme juste même s’il est controversé.
Apartheid est un mot afrikaans. Il fut d’abord utilisé pour décrire le système de séparation et d’oppression raciales dans l’Afrique du Sud dirigée par les Blancs. En 1973, la Convention sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid a donné une définition plus généralement applicable, caractérisant les crimes d’apartheid comme « des actes inhumains (décrits dans le texte) commis en vue d’instituer ou d’entretenir la domination d’un groupe racial d’êtres humains sur n’importe quel autre groupe racial d’êtres humains et d’opprimer systématiquement celui-ci ». Nous pensons qu’Israël est un Etat d’apartheid parce qu’il commet des actes inhumains pour maintenir la domination des Israéliens juifs sur tous les autres groupes, qu’il opprime activement les Palestiniens vivant en Israël et dans les Territoires occupés.
L’apartheid israélien, comme la population palestinienne, est divisée en deux. Il existe des lois discriminatoires et des actions qui ciblent les citoyens palestiniens d’Israël, et il existe un apartheid militaire imposé par la force en Cisjordanie. Les frontières, qui évoluent constamment, de l’ « Israël souverain » contiennent environ un million et demi d’Arabes non juifs. En théorie, le cinquième palestinien de la population d’Israël détient une égalité pleine, mais en réalité, c’est très différent. Les Palestiniens vivant en Israël souffrent à la fois d’une législation discriminatoire et d’une application discriminatoire des lois prétendues neutres. La loi de 1950 sur le Bien des Absents, par exemple, a instrumentalisé le vol de la terre des Palestiniens tout au long des soixante années écoulées. Elle permet au gouvernement israélien de revendiquer la terre en déclarant son propriétaire « absent », une désignation qui s’applique uniquement aux Palestiniens (et notamment à ceux qui furent chassés de leurs terres par l’armée israélienne). Exemple récent d’une loi manifestement discriminatoire : la loi de 2003 sur la Nationalité et l’Entrée en Israël, loi dite provisoire mais reconduite indéfiniment depuis son adoption, qui interdit expressément aux conjoints des Arabes israéliens d’avoir leur résidence en Israël s’ils sont des Territoires occupés, du Liban, de Syrie, d’Iran ou d’Iraq. La liste des lois discriminatoires continue de s’allonger, avec l’objectif de maintenir la domination des Israéliens juifs et l’oppression sur les citoyens palestiniens.
La situation de la Cisjordanie est bien pire encore.
La Cisjordanie n’est pas un territoire contigu sous contrôle palestinien, elle consiste en fait en des îlots de Palestiniens, vivant dans une mer de routes nationales réservées aux seuls Israéliens, de colonies, de check-points et de zones militaires fermées. Il y a plus de 120 colonies juives illégales dans toute la Cisjordanie. Les colons, contrairement aux Palestiniens de Cisjordanie, sont des citoyens israéliens, et Israël a élaboré un gigantesque système d’infrastructures réservées aux colons pour faciliter leurs déplacements vers Israël. Les Palestiniens, par contre, n’ont quasiment aucune liberté de mouvement, et même les distances les plus courtes entre les villes peuvent leur prendre des heures pour les franchir s’ils rencontrent un check-point, ce qui rend toute vie normale en Cisjordanie impossible.
En plus de son occupation brutale, Israël se livre également à un apartheid environnemental, notamment en ce qui concerne le droit à l’eau. Alors que les Palestiniens forment 90 % de la population de la Cisjordanie, ils ne contrôlent que 17% de son eau (de leur eau). Le reste est utilisé par les colons ou dirigé sur Israël. L’eau de la Cisjordanie remplit les piscines des Israéliens et sert à arroser leurs pelouses, tandis que les Palestiniens sont contraints de faire venir l’eau par camion pour leur consommation ou l’irrigation.
L’oppression des Palestiniens en Cisjordanie est méthodique, et atroce.
L’objectif d’Israël, avec toutes ses lois et initiatives, est de maintenir la domination des Israéliens juifs sur tous les Palestiniens.
Je ne suis certainement pas le premier à parler d’Israël comme d’un Etat d’apartheid. En 1961, Hendrik Verwoerd, alors Premier ministre d’Afrique du Sud, qui œuvrait à développer et à mettre en place la politique d’apartheid dans son pays, déclarait : « Israël, comme l’Afrique du Sud, est un Etat d’apartheid ».
Le message aujourd’hui, comme celui d’alors, doit être « Fin à l’apartheid ! ».
Jon Booth, étudiant U2 en économie et histoire (bidisciplinaire), est membre du collectif Tadamon ! Vous pouvez le contacter par courriel à l’adresse : jonathon.booth@mail.mcgill.ca.
Pour plus d’informations sur cette question, vous pouvez consulter le site Tadamon !
Tadamon ! (« solidarité » en arabe) est un collectif montréalais qui travaille en solidarité avec les luttes pour l’autodétermination, l’égalité et la justice, au « Moyen-Orient » et dans les communautés de la diaspora à Montréal et ailleurs.
18 novembre 2010 - The MCGill Daily - traduction : JPP
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