samedi 10 juillet 2010

Le blocus de Gaza allégé mais toujours contrôlé par Israël

publié le vendredi 9 juillet 2010
Karim Lebhour

 
Sous la pression de la communauté internationale depuis le raid sur la flottille pour Gaza, Israël a accepté d’établir la liste des produits spécifiquement interdits. Sur le fond, le blocus de Gaza reste en place.
Israël allège le blocus sur les marchandises imposé depuis quatre ans à la bande de Gaza. Sous la pression de la communauté internationale depuis le raid sur la flottille pour Gaza, l’État hébreu a accepté d’établir la liste des produits spécifiquement interdits, tout le reste devant être autorisé. Jusqu’à présent, seule une centaine de produits étaient autorisés à l’importation dans l’enclave palestinienne dirigée par le Hamas
Quelle est la liste des produits interdits par Israël ?
La liste « noire » établie par Israël comprend les armes et les munitions mais aussi une série de produits civils qualifiés de « double usage », c’est-à-dire pouvant être utilisés à des fins militaires. Cela concerne environ 3 000 produits, parmi lesquels les conduits et tuyaux métalliques (pouvant servir à la construction de roquettes) ou certains engrais (qui entrent dans la composition d’explosifs).
Les matériaux de construction figurent sur une liste nécessitant une autorisation spéciale. Ainsi, ciment, acier, gravier, asphalte ou bois ne pourront entrer à Gaza que dans le cadre de projets de construction approuvés par Israël et mis en œuvre par la communauté internationale.
Cette restriction est contestée par les organisations humanitaires car ce sont les produits dont Gaza a le plus besoin pour commencer la reconstruction du territoire. D’autant que le ciment et les matériaux nécessaires au Hamas pour ses besoins militaires sont facilement accessibles par les tunnels de contrebande, à un coût prohibitif pour la grande majorité des habitants de Gaza.
Cet allègement aura-t-il des conséquences sur la vie quotidienne des Gazaouis ?
L’assouplissement du blocus commercial va permettre de mettre fin à certaines absurdités qui voyaient depuis quatre ans l’interdiction à Gaza du chocolat, des instruments de musique ou des jouets pour enfants.
Déjà, le volume de marchandises vers Gaza a sensiblement augmenté ces derniers jours, passant de 80 à 150 camions par jour. Concrètement, ces produits passaient de toute façon déjà par les tunnels avec l’Égypte. Au lieu de passer clandestinement, tous ces produits de la vie quotidienne pourront désormais être importés légalement, à un prix plus abordable.
Cette légalisation devrait au passage porter un coup sévère à l’économie des tunnels, dont on signale déjà une baisse d’activité, et soulager les entrepreneurs du territoire, même s’il n’est pas encore certain que les usines de Gaza pourront importer librement les matières premières dont elles ont besoin.
Sur le fond, le blocus de Gaza reste en place. « La rhétorique change, mais la pratique reste la même. Israël continue d’imposer à la bande de Gaza des restrictions qui n’ont rien à voir avec la sécurité », commente Sari Bashi, de l’ONG israélienne Gisha. L’organisation observe que les restrictions de sortie du territoire pour les personnes et l’interdiction de se rendre en Cisjordanie demeurent, tout comme l’impossibilité d’exporter des biens produits à Gaza.
Le blocus maritime, lui aussi, est maintenu. Les pêcheurs de Gaza, obligés de vendre du poisson acheté en Égypte ou élevé dans des piscines en plastique, restent confinés à moins de 3 milles nautiques des côtes.
Cet allégement du blocus est-il une victoire pour le Hamas ?
Le Hamas, qui dénonce une « manœuvre destinée à tromper l’opinion publique », peut se targuer d’avoir obtenu une brèche dans le blocus sans avoir eu à faire de concessions. Le recul au moins partiel d’Israël marque l’échec de la stratégie d’isolement du mouvement islamiste par le moyen d’une « punition collective » des habitants de Gaza.
En revanche, le Hamas va subir une pression de plus en plus forte de la communauté internationale qui souhaite le retour de l’Autorité palestinienne de Ramallah dans la gestion des points de passage avec la bande de Gaza. Une condition jusqu’ici refusée par les islamistes, et qui bloque toute tentative de réconciliation avec leurs rivaux du Fatah.