jeudi 8 juillet 2010

Frustration

L’envoyé spécial américain au Proche-Orient, George Mitchell, qui vient d’achever sa vingtième navette dans la région, est « frustré ». Raison : l’attitude du premier ministre israélien Benyamin Netanyahu vis-à-vis des négociations indirectes avec les Palestiniens, qui, à ce jour, n’ont abouti à rien. Le mot a été « lâché » par un haut responsable de l’Administration américaine, qui, pour expliquer les raisons de la frustration de Mitchell, a avancé le manque de « sérieux » de Netanyahu dans ces négociations.
Ce dernier n’a effectivement donné de réponse à aucune des demandes ou interrogations posées par l’Autorité palestinienne sur les questions de fond ou de statut final, qui devraient paver la voie à des négociations directes entre les deux parties. Le gouvernement israélien a, jusqu’ici, refusé de donner des réponses claires à des questions fondamentales, telles : est-il prêt à reprendre les négociations du point où elles ont été interrompues, fin 2008 ? Accepterait-il les frontières de juin 1967 comme base à des discussions sur les frontières du futur Etat palestinien ?
Tel-Aviv a également évité de donner la moindre indication sur ses intentions quant au plan avancé par l’Autorité palestinienne et transmis par Mitchell. Il est fondé sur les lignes de 1967 comme base aux frontières du futur Etat palestinien, tout en acceptant des échanges territoriaux permettant à l’Etat hébreu de garder les grands blocs de colonies en Cisjordanie. Tout en revendiquant Jérusalem-Est comme capitale du futur Etat palestinien, le plan prévoit qu’Israël y maintient le contrôle du quartier juif et du Mur des lamentations. Les idées palestiniennes proposent enfin la création d’un passage sûr entre la Cisjordanie et la bande de Gaza, pour assurer la continuité géographique des deux territoires, et le déploiement d’une force de l’Otan sur les frontières et les points de passage de la Palestine pour garantir l’application du volet sécuritaire d’un accord de paix.
Durant les trois séries de négociations de proximité, entamées le 9 mai dernier, Netanyahu a éludé toutes ces questions importantes, préférant se concentrer sur des sujets secondaires, comme ceux de l’eau, des rapports économiques entre Israéliens et Palestiniens et du développement d’une « culture de paix » dans le futur Etat palestinien, jetant le doute sur un possible aboutissement des pourparlers, qui doivent s’achever en septembre, date de la fin du moratoire israélien sur la construction dans les colonies de la Cisjordanie.
Curieusement, le premier ministre israélien, tout en s’abstenant de donner la moindre indication sur ses intentions concernant les questions du statut final, réclame des négociations « directes » avec les Palestiniens. Tout semble indiquer que Netanyahu cherche par là à engager d’interminables négociations, qui feraient croire à tort à l’existence d’un processus de paix et qui, par conséquent, réduiraient les pressions internationales sur Israël, alors qu’en même temps, ce dernier poursuivrait sa politique de colonisation et du fait accompli sur le terrain.
Dr Hicham Mourad
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