vendredi 16 avril 2010

Comment la Shabak se sert des enfants de Palestine


Bilin - 15-04-2010
Par Friends of Freedom and Justice 
Je m’appelle Yasser Awad Yasin. J’ai 27 ans et je suis de Bil’in. Je suis marié et j’ai deux fils et une fille. Avant que l’armée n’envahisse ma maison, la Shabak (les services du renseignement israélien) m’avait téléphoné pour me demander de venir à leur bureau. Je n’y suis pas allé et l’armée a fait un raid sur ma maison.






















Yasser Awad Yasin et sa fille (photo Hamde Aburahma)

Nous dormions, ma femme et mes enfants, lorsqu’ils sont arrivés. Je leur ai demandé ce qu’ils voulaient, parce que je n’avais rien fait. Ils m’ont demandé ma carte d’identité et m’ont dit d’aller le lendemain au bureau du Shabak. Je leur ai demandé pourquoi ils ne m’arrêtaient pas tout de suite, puis les soldats m’ont remis une convocation.
Lorsque j’y suis allé, ils m’ont d’abord fouillé à nu et m’ont demandé si j’avais une arme. Je leur ai répondu que j’avais une poche de nourriture et ils me l’ont prise. Puis ils m’ont emmené au chef de la Shabak, qui m’a dit des tas de choses sur moi et ma famille, pour me faire peur et pour me faire croire qu’il savait tout. Ils m’ont dit qu’ils savaient qu’un de mes fils avait des problèmes rénaux, « Nous voulions donc que tu viennes ici pour t’aider. Tu peux l’envoyer à l’hôpital en Israël et nous pouvons faire le nécessaire pour qu’il reçoive toute l’aide dont il a besoin. Je comprends ta situation parce que j’ai des enfants moi aussi et que je les aime. »
Quand j’ai entendu ça, je lui ai dit que j’avais deux fils malades, pas un. Alors il me demandait quel était le problème avec le second, et je lui ai dit qu’il avait des problèmes cardiaques. Il m’a demandé à quel hôpital il allait, et je lui ai dit à Ramallah. « Pourquoi ne l’envoies-tu pas dans un hôpital israélien, où il aura un meilleur traitement ? Nous pouvons t’aider à organiser ça. » Je savais qu’il me demanderait quelque chose en échange de cette offre. Il m’a dit « Nous pouvons faire tout ce que tu veux si tu nous aides et si tu travailles pour nous, au Shabak » et je lui ai dit que le traitement de mon fils ici était ok, et qu’il n’avait pas besoin d’aller dans un hôpital israélien. Il m’a répondu, pour me faire peur, que mon fils risquait de mourir s’il n’était pas mieux soigné. Je lui ai répondu : « S’il meurt, ce sera à cause de vos armes et de vos gaz tous les vendredis. J’habite près du mur et tous les vendredis, nous devons quitter notre maison pour protéger nos enfants de toutes ces choses, sinon ils mourraient. »
Là, il a essayé une autre tactique. Il m’a demandé si j’avais une maison, et si peut-être j’avais besoin d’argent. Je lui ai dit : « J’ai une maison et un travail, et je n’ai besoin de l’aide de personne. »
Après ça, il est revenu au problème de mon fils qui a besoin d’un traitement en Israël, parce qu’il savait que là j’ai un vrai problème et que c’est là-dessus qu’il pouvait essayer d’obtenir ma coopération et que je devienne un informateur contre mon propre peuple. Il m’a demandé ce que je ferais s’ils refusaient de me donner l’autorisation de passer le checkpoint pour emmener mon fils à l’hôpital, et je lui ai dit que sa mère l’accompagnerait. « Et si nous refusons le permis à elle aussi ? » Je lui ai dit : « Sa grand-mère ira. » « Et si nous refusons à sa grand-mère ? » J’ai dit que je l’emmènerai en Jordanie. « Et si nous t’arrêtons à la frontière ? » J’ai répondu : « Je l’emmènerai à Ramallah – et que Dieu nous aide. »