vendredi 26 février 2010

L’entente syro-iranienne : un double défi aux USA

26/02/2010
Les présidents Assad et Ahmadinejad ont signé un accord bilatéral 
supprimant les visas entre leurs pays. Khaled al-Hariri/Reuters
Les présidents Assad et Ahmadinejad ont signé un accord bilatéral supprimant les visas entre leurs pays. Khaled al-Hariri/Reuters
Diplomatie Pour Ahmadinejad, l'État d'Israël est « en voie de disparition ».

Le président syrien Bachar el-Assad a ironisé hier sur les efforts des États-Unis pour l'éloigner de son allié iranien, estimant au contraire que les relations bilatérales devaient être renforcées, lors d'une visite à Damas de son homologue Mahmoud Ahmadinejad.
Le président iranien, dont le pays est menacé de nouvelles sanctions en raison de son programme nucléaire controversé, est arrivé à Damas au lendemain d'un appel de la secrétaire d'État Hillary Clinton à la Syrie pour qu'elle prenne ses distances avec l'Iran.
Interrogé sur l'appel de Mme Clinton lors d'une conférence de presse commune avec son allié iranien, M. Assad a répondu par une boutade : « Nous nous sommes rencontrés aujourd'hui pour signer un "accord de séparation" entre la Syrie et l'Iran, mais en raison d'une mauvaise traduction nous avons signé un accord sur la suppression des visas.»
 « Je suis étonné qu'ils demandent aux pays de s'éloigner les uns des autres (....) alors qu'ils évoquent la stabilité et la paix au Proche-Orient et tous les autres beaux principes, a lancé M. Assad. Nous avons besoin de renforcer davantage les relations si l'objectif est vraiment la stabilité. »
Mme Clinton, dont le pays a entrepris un rapprochement avec Damas, a demandé à la Syrie de « commencer à s'éloigner de l'Iran », la priant aussi de cesser d'armer le Hezbollah, de coopérer davantage dans le dossier irakien et de reprendre les pourparlers de paix avec Israël.
 « Nous souhaitons que les autres ne nous donnent pas de leçons sur les relations dans notre région », a rétorqué le président syrien, soulignant que son pays « se prépare de façon permanente à une agression israélienne, de petite ou de grande envergure ».
 « Les relations entre la Syrie et l'Iran sont fraternelles, profondes, solides et pérennes », a confirmé le président iranien. « Aucun élément ne peut (leur) porter atteinte », a ajouté M. Ahmadinejad, dont la dernière visite en Syrie remonte à mai 2009.
Il a également affirmé, comme il l'a fait à de nombreuses reprises, que l'État d'Israël était « en voie de disparition ». « Si l'entité sioniste veut répéter les erreurs du passé, sa mort sera inévitable. » M. Ahmadinejad a assuré qu' « un Moyen-Orient sans Israël sera la promesse divine ».
M. Assad a aussi évoqué avec son homologue « les moyens de soutenir » la « résistance dans la région » qui est une « obligation morale, patriotique et légale », en allusion notamment au Hezbollah et au mouvement islamiste palestinien Hamas.
Le président iranien, qui sera de retour aujourd'hui à Téhéran, a rencontré dans la soirée des représentants de dix mouvements palestiniens, dont le chef en exil du Hamas, Khaled Mechaal.
Le président syrien a aussi de nouveau défendu le droit de l'Iran à un programme nucléaire civil. « Interdire à un État indépendant le droit à l'enrichissement (d'uranium) relève d'un nouveau processus colonialiste dans la région », a affirmé M. Assad.
La Syrie doit changer d'attitude face à son allié iranien sous peine de se marginaliser, a réitéré hier soir le porte-parole de la diplomatie américaine Philip Crowley. « Dans son évaluation des intérêts à long terme de la Syrie, le président (Bachar el-) Assad n'a qu'à regarder autour de lui dans la région pour reconnaître que la Syrie est de plus en plus marginale », a commenté M. Crowley. « Nous voulons voir la Syrie jouer un rôle plus constructif dans la région », a-t-il assuré, alors que Washington va de nouveau envoyer un ambassadeur à Damas, cinq ans après le départ du dernier en poste. « Cela serait une étape (pour la Syrie) de dire clairement que l'Iran doit agir différemment », a-t-il poursuivi, ajoutant que « malheureusement, cela n'a pas été le cas » hier.