lundi 18 août 2014

S. Nasrallah : "Oui, nous rentrerons à AlQuds, c’est une certitude" - 2ème partie

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Une partie importante de l’interview accordée par le secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah au journal libanais al-Akhbar a été consacrée à la dernière guerre israélienne « Bordure protectrice » contre la Bande de Gaza. Il y a réitéré son diagnostic exposé dans son discours datant du 12 juillet dernier.
S. Nasrallah : 'Oui, nous rentrerons à AlQuds, c’est une certitude' - 2ème partie
Les calculs erronés
Interrogé sur la modestie des objectifs déclarés par Israël, il a totalement approuvé : «  Ce sont les leçons de de la guerre de juillet contre le Liban en 2006. Les Israéliens ont tenté de les tirer mais ils se sont retrouvés coincés dans leur problème. Ils n’ont pas voulu mentionner de but précis. La guerre s’est poursuivie les premiers jours sans que l’on ne sache ses objectifs : d’aucuns ont dit vouloir abattre le Hamas, d’autres ont parlé de désarmer la résistance, d’autres de faire cesser les roquettes ou leur fabrication, même le sujet des deux soldats faits prisonniers a été ignoré.
Les Israéliens se sont retrouvés dans l’impasse. Ils s’attendaient à ce que les gens ne supportent pas tant de sacrifices. Comme  en 1996, lorsque Shimon Perez misait dans la guerre "Raisins de la Colère" contre le Liban sur l'épuisement des missiles chez la résistance (...). Tous ces calculs se sont avérés erronés ».
Intervention du Hezbollah ?
Sur la proposition d’intervention directe du Hezbollah aux côtés du Hamas qui avait été évoquée par le dirigeant de ce dernier, Moussa Abou Marzouk, le numéro un de la résistance libanaise explique : « Personne d’autre ne nous en a parlé. Si cette demande avait été sérieuse, elle aurait été discutée dans les cercles fermés et non à travers les médias. Les lignes de contacts entre nous n’ont jamais été rompues même au moment où la relation régressait. Il aurait pu lui ou un autre dirigeant en parler (...). Le fait de l’avoir soulevé dans les médias, à mon avis, pose certaines questions, mais je ne l’ai pas apprécié, je ne veux pas analyser, par principe, il vaut mieux être bien intentionné et compréhensif (...) mais ce genre de sujet ne peut être soulevé à travers les médias. »
Sayed Nasrallah ajoute que depuis, cette question n’a plus été abordée avec le Hamas.
Les leçons non tirées
Sur l’impact de la dernière guerre israélienne sur le Liban, Sayed Nasrallah admet qu’elle a contribué relativement à retarder la prochaine guerre israélienne contre le Liban : « Je ne peux pas dire si c’est pour longtemps ou peu de temps parce que ce n’est pas clair dans quelles conditions ou données les israéliens peuvent déclencher une guerre s’ils le veulent. Parmi les leçons qu’ils ont tirées depuis la guerre de juillet, celle qu’une guerre éventuelle devrait aboutir à une victoire cursive, décisive, et apparente. Dans la guerre de Juillet, tous ont dit qu’Israël a été vaincu, mais d’aucuns sortiront pour dire le contraire, comme ceux qui l’ont fait dernièrement au motif que le front du sud n’a pas été ouvert, sachant qu’il n’a jamais été ouvert ni lors de l’intifada de l’an 2000, ni durant l’opération "Plomb durci" en 2008, ni durant la guerre des 8 jours en 2012.
Les Israéliens ont stipulé tout d’abord que la victoire se devait d’être rapide, qui ne se transforme pas en une guerre d’usure et qui empêche le pilonnage des villes. Ils ont aussi voulu en second lieu qu’elle soit décisive, pas momentanée ni temporaire, et qu’elle puisse aussi réaliser tous les objectifs et non des buts secondaires. Ils insistent pour qu’elle soit aussi éclatante et non sujette à discussion.
L’une des causes essentielles est qu’ils s’attendent à ce que la prochaine guerre soit bien plus difficile de par ses cibles, compte tenu des capacités de la résistance, balistiques et autres. L’ennemi ne supporte pas de guerre d’usure. Il est actuellement sous pression, quoique le nombre des roquettes tirées à partir de Gaza sur Tel Aviv est très limité. Il parle de l’efficacité du Dôme d’acier mais c’est discutable parce qu’il peut intercepter un nombre limité de roquettes mais affrontera un problème réel face à un grand nombre de missiles. En fin de compte, l’ennemi a échoué dans sa tentative de tirer les leçons de la guerre du Liban. »
Le bon choix des Gazaouis
Interrogé sur le peuple gazaoui dans la dernière guerre, Sayed constate qu’il a pris position de ne pas capituler, de supporter les séquelles de sa position, quel qu’en soit le coût. Selon lui, il semble aussi être parfaitement en phase avec la résistance et être confiant que le chemin de la résistance pourrait très bien être fructueux. La logique des choses et la raison –et non les slogans- disent qu’il faut qu’il poursuive le combat.
Gaza, entre deux axes
L’une des questions posées par le journal, basée sur le constat qu’il existe un problème réel entre l’axe de la résistance et l’administration égyptienne, et pas seulement avec le Hamas, s’interroge sur la position que le Hezbollah va adopter du gouvernement de Sissi.
Sayed répond : « Je voudrais emprunter des propos de dirigeants de la résistance palestinienne selon lesquels il n’y a pas un seul problème à Gaza, mais un problème double. Le problème de la confiance avec les Israéliens, et celui, certes plus essentiel et plus primordial est que Gaza se trouve à cheval entre deux axes, l’axe qatari-turc et l’axe égypto-saoudien... Cette division est certes bien violente. Mais il faut à tout prix la surmonter.
Dans nos consultations avec nos frères dans les factions palestiniennes et nos frères iraniens, j’ai proposé aux Iraniens de contacter les Turcs, les Qataris et les Égyptiens et les Saoudiens même, via les Émiratis ou Oman. En ce qui nous concerne en tant qu’axe de la résistance, nous ne sommes nullement concernés par la politique de marquer des points ou d’investir la résistance dans des calculs internes ou régionaux. Il y a un but essentiel, c’est de faire cesser la guerre contre Gaza et de suspendre le blocus. En temps de guerre, la priorité est que les gens parlent ensemble.
Mais au milieu des évènements, la position égyptienne a été difficile et le Premier ministre turc Recep Tayyeb Erdogan a mené une attaque personnelle contre le président égyptien Abdel Fattah Sissi, il en est de même pour le Qatar à travers al-Jazeera. Leur position était très négative vis-à-vis de l’Égypte, or lorsqu’on veut aider Gaza, il faut parler avec l’Egypte et les Palestiniens eux-mêmes avouent qu’il ne peut y avoir de solution sans l’Égypte.
Ceci nécessite que les deux axes entre lesquels se trouve bloquée Gaza devraient accorder la priorité à Gaza, à l’insu de toutes les autres discordes ou conflits, ce qui n’a pas lieu comme il le faut.
Hamas – Hezbollah : retour à la normale
Sur la relation entre le Hezbollah et le Hamas ces derniers temps, Nasrallah assure que les contacts n’ont jamais été rompus malgré les divergences sur le dossier syrien. « Bien entendu la situation a été affectée en raison des évènements syriens et irakiens et dans la région. Concernant le dossier syrien, dans toutes les rencontres qui avaient eu lieu, ils nous demandaient de comprendre leur position et nous le demandions de même avec la nôtre, )...) de longues discussions ont été entamées entre nous (...). Bien entendu le sujet de Gaza ramène ce processus à ses débuts, ce qui va nous permettre de communiquer et de coopérer davantage, ce qui va avoir pour effet d’améliorer les relations entre le Hamas et le Hezbollah et entre le Hamas et la république islamique d’Iran. Le sujet syrien est très compliqué, il dépendra des évolutions régionales, et n’a aucune perspective pour le moment.
"Allons-nous entrer à Jérusalem ?", a été l’une des questions qui lui ont été adressées. « Oui, j’en suis certain », a-t-il assuré.
La Palestine, une doctrine
Une humeur générale se répand et consiste à s’interroger sur le lien des gens avec la Palestine et pourquoi devrions-nous libérer AlQuds, a été une autre question à laquelle il a répondu longuement.
« L’un des problèmes les plus dangereux que nous pourrions affronter compte tenu de l’humeur générale des Libanais que celle des Arabes, est celui que les peuples de la région considère la présence d’Israël comme quelque chose de normal, qu’il ne représente plus de menace ni pour la région, ni pour ses peuples et qu’il n’est que le problème exclusif du peuple palestinien...
Ce genre de propos a une dimension politique, sécuritaire et économique. Tout d’abord Israël est un État illégitime qui constitue une menace continue pour toute la région avec laquelle on ne peut cohabiter...
Raison pour laquelle l’objectif final de la nation devrait être celui d’éliminer ce danger, hormis les sensibilités et les problèmes et tout ce qui se passe entre les Palestiniens et les autres, entre les chiites et les sunnites, entre les musulmans et les chrétiens (...) tous les conflits et les divergences ne doivent en aucun cas altérer la culture qu’Israël est une tumeur cancérigène, qu’il est un mal absolu, et une menace pour tous les pays de la région, aussi bien ses gouvernements que ses peuples, voire pour sa dignité et son honneur (...) et qu’il faut éradiquer.
Oui, eux voudraient nous faire parvenir à ce stade et parfois ils arrivent à le faire. Mais nous ne devons en aucun cas les laisser faire. Du point de vue dogmatique (idéologique), ce sujet ne devrait en aucun cas être discuté. Dans le domaine  doctrinal se rétrécit la marge de l’humeur et de l’émotion populaire, lorsque les gens disent qu’ils adoptent une position dogmatique concernant Israël, cette position ne peut être ébranlée par la nature de la relation avec les Palestiniens.
Raison pour laquelle, la relation du Hezbollah avec le conflit contre l’ennemi sioniste et avec les faits en Palestine ne peut en aucun cas être discutée.
Source : Al Manar