Le Hamas a creusé un réseau complexe de tunnels pour faire face à une invasion terrestre israélienne.
- Un garçon palestinien place un drapeau du Hamas au sommet des décombres d’une maison détruite lors d’un raid aérien israélien dans le nord de la bande de Gaza, le 9 juillet 2014 - Photo : Reuters/Mohammed Salem
GAZA — Une guerre ouverte a finalement éclaté entre le Hamas et
Israël le 8 juillet, après la période d’intensification progressive des
hostilités qui a suivi l’enlèvement et l’assassinat de trois étudiants
d’une colonie proche de Hébron en juin et d’un jeune Palestinien de
Jérusalem-Est en juillet. Le meurtre par Israël, à Rafah le 6 juillet,
de six membres des Brigades Izz ad-Din al-Qassam, la branche armée du
Hamas, a ouvert la porte à une guerre intensive avec la riposte des
Brigades qui, le 7 juillet au soir, ont tiré des dizaines de salves de
mortier et de roquettes Grad et Qassam sur le sud d’Israël, ce qui
n’était pas arrivé depuis la guerre de 2012. L’armée israélienne a
lancé l’Opération Bordures Protectrices le 8 juillet au petit matin.
Al-Monitor a fait le tour des sites frappés par les forces
israéliennes à Gaza et appris de la bouche de Ashraf al-Qadwa, le porte
parole du ministère de la santé, que les frappes avaient fait 68 morts
dont 19 enfants et 10 femmes et 450 blessés chez les Palestiniens
(samedi matin 120 morts et je ne sais combien d’enfants, ndt). Ce sont
les frappes israéliennes sur les bâtiments civils de Rafah, Khan Younis
et Beit Lahiya qui sont responsables de toutes ces victimes.
Le Hamas n’a pas tardé à riposter à l’attaque israélienne et à faire
un certain nombre de déclarations. Mousa Abu Marzouk, le directeur
adjoint du bureau politique du Hamas, a déclaré le 8 juillet, au début
de la guerre, qu’ils étaient prêts pour une attaque israélienne, que les
réservistes étaient opérationnels et que leurs forces étaient en ordre
de bataille. Les Brigades Qassam ont aussi lancé une campagne
d’information en publiant plusieurs communiqués, dont notamment une
vidéo montrant la fabrication locale de roquettes et des combattants
portant des roquettes au milieu des flammes, avec comme sous-titre en
arabique et en hébreu : "Toutes les villes israéliennes sont proches de
Gaza."
Al-Monitor a rencontré un commandant du Hamas à Gaza seulement
quelques heures avant le grand assaut. Il nous a dit : "Cette roquette
montre le haut niveau de professionnalisme auquel les Brigades Qassam
sont parvenues à force de se battre contre l’armée israélienne. Elles
ont désormais la capacité d’envoyer des roquettes beaucoup plus précises
et meurtrières, et de tirer jusqu’à 36 roquettes en même temps." Il a
ajouté : "Ce n’est un secret pour personne que le Hamas a profité des
périodes de calme pour accélérer ses préparatifs en vue de l’offensive
actuelle en creusant des tunnels, en fabriquant des avions sans pilote
et en augmentant la portée de ses roquettes."
A ce propos, le site Web al-Majd Security affilié au Hamas a affirmé
que les Brigades Qassam avaient pris toute une série de mesures en vue
d’une longue confrontation avec Israël, les plus importantes d’entre
elles étant de garder secrète la location des lance-roquettes et de
construire des entrepôts souterrains pour les stocker. Et ils ont adopté
comme tactique de sélectionner des moments précis pour les tirs - par
exemple quand aucun avion ne survole Gaza - et de leurrer Israël avec de
faux lance-roquettes.
Al-Monitor a révélé, en février, que le Hamas s’était procuré
quelques missiles anti-aériens et qu’il avait remarqué récemment que la
majorité des avions israéliens survolant Gaza avaient lâché des ballons
pour se protéger des détecteurs thermique des missiles anti-aériens. Les
Brigades Qassam affirment qu’elles ont atteint un hélicoptère Apache
israélien avec un missile SAM-7, au dessus de Khan Younis, le 7 juillet
dans l’après-midi, mais les médias israéliens prétendent que l’avion
n’a pas été endommagé.
Israël semble déterminé à lancer une offensive sur le terrain et a
rappelé 40 000 réservistes à cet effet. Les Brigades Qassam affirment
qu’elles les attendent de pied ferme, fortes de leur expérience de 2008.
Les commandants du Qassam ont une brochure, dont Al-Monitor s’est
procuré un exemplaire, qui détaille les mesures à prendre en cas
d’attaque terrestre : "Une offensive terrestre sera le scénario le plus
difficile à mettre en oeuvre à la fois pour le Qassam et pour Israël
parce qu’il causera la mort de beaucoup de monde. Mais les combattants
du Qassam sont parvenus à un niveau de professionnalisme qui exclut de
se précipiter au combat contre les soldats israéliens comme avant.
Désormais, il faut d’abord analyser les intentions de l’ennemi israélien
et déployer des cellules armées de l’autre côté des lignes israéliennes
pour les prendre à revers."
La brochure parlait avec confiance de la possibilité de piéger les
soldats israéliens qui entreraient à Gaza. "Le point fort des Brigades
Qassam est que, si Israël se décide à lancer une offensive terrestre,
ses soldats passeront de chasseurs à gibier et seront des proies faciles
pour les tirs croisés à condition que les préparatifs, le
renseignement, les plans, et l’identification des points faibles de
l’ennemi soient rigoureux ; tout cela, plus l’élément de surprise,
permettra de déconcerter les Israéliens et de les décimer dans des
fusillades qui prouveront la supériorité des techniques de combat des
combattants du Qassam."
Les dizaines de tunnels de Gaza font partie du défi que devra relever
l’armée israélienne en cas d’invasion. Selon le commandant du Hamas,
"Les tunnels creusés sous toutes les rues et les allées de Gaza,
représentent un potentiel puissant que les brigades vont exploiter pour
augmenter la confusion de l’armée israélienne et créer des problèmes de
sécurité qu’elle ne pourra pas surmonter. Elle sera alors obligée de
modifier ses méthodes de combat contre le Hamas."
La manière dont ces tunnels pourraient participer à une contre
offensive du Hamas en cas d’invasion terrestre israélienne a été mise en
lumière le 6 juillet dernier quand Israël a bombardé un tunnel qui se
trouvait sous l’aéroport international en ruines, provoquant la mort de
six combattants du Qassam. Par ailleurs on peut juger du niveau de
préparation du Hamas à la guerre en cours, par l’opération de commando
des "hommes grenouilles" des Brigades Qassam à Ashkelon, au nord de
Gaza, qui s’est apparemment terminée par la mort des membres du
commando. Les Brigades Qassam revendiquent aussi l’explosion qui a eu
lieu dans un tunnel, le 8 juillet, dans le secteur israélien de Kerem
Shalom, au sud de Gaza.
Le Hamas affirme que ce qu’ils ont préparé pour l’actuelle
confrontation avec Israël réserve encore bien des surprises. Cela
indique peut-être que les deux camps vont tenter d’élargir le champ de
la bataille au-delà des limites des conflits précédentes, tant au niveau
des techniques que de l’intensité de la guerre.
* Adnan Abu Amer est doyen de la Faculté des Arts et responsable de la Section Presse et Information à Al Oumma Open University Education,
ainsi que Professeur spécialisé sur l’Histoire de la question
palestinienne, la sécurité nationale, les sciences politiques et la
civilisation islamique. Il a publié un certain nombre d’ouvrages et
d’articles sur l’histoire contemporaine de la Palestine.
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet
http://info-palestine.net