Alors que l’attaque israélienne sur Gaza entre dans sa
deuxième semaine, plus de 165 Palestiniens ont été assassinés, avec
parmi eux 41 enfants, 23 femmes et 15 personnes âgées. De plus, 1130
Palestiniens ont été blessés, selon les informations obtenues par
Al-Monitor auprès du ministère de la santé à Gaza.
- Gaza, le 3 juillet 2014 - Conférence de presse des Brigades Izz ad-Din al-Qassam - Photo : Reuters/Mohammed Salem
Au milieu de toutes ces pertes humaines, il y a des craintes
croissantes d’une opération terrestre israélienne qui va encore
compliquer la situation sur le terrain.
Dans la soirée du 10 juillet, Abu Abida, porte-parole de la branche
armée du Hamas, les Brigades Izz ad-Din al-Qassam, a déclaré qu’une
invasion terrestre offrirait l’occasion de faire libérer les prisonniers
palestiniens détenus en Israël. Les Brigades al-Qassam se sont
préparées pour une longue bataille pouvant durer plusieurs semaines. Abu
Abida a également déclaré qu’Israël ne sera pas en mesure de décider de
la fin du conflit ou de ses conditions, soulignant que la bataille
donnera de nombreuses surprises.
Mahmoud al-Zahar, membre du bureau politique du Hamas, s’est exprimé
dans le réseau de télévision satellitaire Al-Aqsa, dans la soirée du 11
juillet sur la volonté de son organisation d’assumer la guerre. Selon
Zahar, la bataille sera décisive et changera les règles du jeu, même si
elle se poursuit pendant des mois.
Al-Monitor a demandé à un responsable du Hamas de premier plan
résidant actuellement en dehors de la bande de Gaza, quelle était
l’opinion de l’organisation concernant une opération terrestre
israélienne. Le responsable en question estime qu’il est peu probable
Israël envoie ses troupes dans la bande de Gaza car il en résulterait
des pertes pour l’armée israélienne. « Nous ne voulons pas qu’Israël
prenne cette mesure parce que cela va coûter la vie à de nombreux
Palestiniens. Israël pratiquera alors une politique de la terre brûlée
avant que ses soldats ne traversent les frontières de Gaza. »
« En tant que dirigeants politiques, nous sommes en communication
avec les combattants à l’intérieur de Gaza, lesquels ont commencé leurs
préparatifs militaires pour faire face à une opération terrestre. Ils
ont des plans sur le terrain qui pourraient inciter Israël à regretter
la décision d’entreprendre une telle opération : ils tueront beaucoup de
soldats israéliens, cibleront des véhicules militaires et captureront
des soldats pour s’en servir dans des échanges de prisonniers », a
ajouté ce responsable.
En prémisee d’une opération terrestre israélienne, les Brigades
al-Qassam ont tiré des roquettes « Kornet » sur des véhicules
israéliens. La première a atterri à l’est de Gaza sur la base Nahel Awz,
et la seconde près de Beit Hanoun, au nord de Gaza. Les Brigades
prétendent avoir fait mouche.
Raafet Marra, un responsable du Hamas au Liban, a souligné lors d’une
récente conférence de presse qu’il considérait une opération terrestre
comme peu probable en raison de la crainte d’Israël de mauvaises
surprises de la part des Brigades al-Qassam. Il a déclaré qu’Israël est
également réticent à envoyer ses soldats dans un monde inconnu, car il
manque de connaissances des capacités, des positions et des tactiques
qui les attendent. Il a dit également qu’Israël craignait des scènes de
chars détruits, de véhicules brûlés, de cadavres défigurés et de soldats
morts ou capturés.
Au moment on l’on parlait le plus d’une préparation israélienne pour
une opération terrestre, une information a été divulguée concernant des
efforts pour imposer un cessez-le-feu. L’initiative la plus notable a
été une conversation téléphonique le 10 juillet entre le président
américain Barack Obama et le premier ministre israélien Benjamin
Netanyahu.
Une personnalité palestinienne dans la bande de Gaza qui joue le rôle
de médiateur entre le Hamas et l’Occident a révélé à Al-Monitor :
« L’administration américaine a fait un effort pour calmer les tensions
entre le Hamas et Israël par l’intermédiaire d’une communication
indirecte avec le Hamas, en passant par le Qatar et la Turquie. Cela
représente un progrès pour les États-Unis, étant donné qu’ils ont
toujours considéré le Hamas comme une organisation terroriste. Les
États-Unis pourraient passer outre cette classification, dans le but
d’empêcher la région d’exploser ».
Il a ajouté : « L’administration Obama ne veut pas de guerres dans la
région et elle tente de servir d’intermédiaire entre Israël et le Hamas
pour trouver un terrain d’entente acceptable par les deux parties. Mais
ses efforts sont bloqués par deux éléments : d’abord, l’obstination de
l’actuel gouvernement israélien, qui n’a pour l’instant emporté aucun
succès militaire, et d’autre part, l’intention du Hamas de lever le
blocus de Gaza, de mettre en œuvre la réconciliation [avec le Fatah] et
d’obtenir des garanties internationales pour tout cessez-le-feu à venir,
ce qui pourrait alors ouvrir la porte à un futur dialogue ».
Lors de son discours à Doha dans la soirée du 9 juillet, Khaled
Mechaal, responsable du bureau politique du Hamas, a indiqué qu’il avait
reçu des messages en provenance de pays occidentaux et orientaux
appelant à un cessez-le-feu et à l’arrêt des tirs de roquettes. Il a
rejeté ces demandes parce que c’est Israël qui a lancé les hostilités,
et il a souligné l’impossibilité d’un retour à la formule de la
désescalade réciproque.
Dans son discours du 11 juillet à la station de télévision
Al-Mayadeen basée à Beyrouth, le président de l’autorité palestinienne
de Ramallah, Mahmoud Abbas, a refusé toutes les conditions préalables
pour un cessez-le-feu. Il a fait savoir qu’il avait demandé que
Washington fasse pression sur Israël pour qu’il cesse ses opérations
militaires, et qu’il avait tenté en vain de convaincre le Hamas de
cesser ses tirs de roquettes.
Al-Monitor a interrogé un responsable de l’Autorité palestinienne qui
a révélé que « Israël veut revenir aux accords de la guerre de novembre
2012 - desserrer le blocus de Gaza, étendre la zone dans laquelle les
habitants de Gaza sont autorisés à pêcher, et le désenclavement de la
zone Est. Mais le Hamas a posé de plus grandes exigences, dont les plus
importantes sont la libération de 56 prisonniers qui ont été arrêtés
suite à la récente opération d’Hébron, l’autorisation d’importer des
matériaux de construction à Gaza, l’ouverture du passage de Rafah, la
fin des assassinats de membres du Hamas par les Israéliens et la levée
du veto d’Israël sur l’accord de réconciliation (entre le Hamas et le
Fatah) ».
Al-Monitor a appris d’un responsable des médias du Hamas que le
Qatar, la Turquie, les États-Unis, l’Union européenne, la Russie et les
Nations Unies sont à la recherche d’un cessez-le-feu entre le Hamas et
Israël. L’Égypte a proposé un cessez-le-feu ce lundi, qu’Israël étudie,
tandis que le Hamas insiste sur son exigence d’une levée du blocus.
Un fonctionnaire de haut rang de la Ligue arabe au Caire a informé
Al-Monitor que le Hamas « a demandé de nouveaux médiateurs pour garantir
un cessez-le-feu avec Israël, dont les États-Unis, la Russie et les
Nations Unies, le Qatar et la Turquie, plutôt que de permettre à
l’Égypte de jouer cavalier seul ». Le secrétaire d’État américain John
Kerry doit se rendre au Caire mardi pour pousser à un accord de
cessez-le-feu.
Une source du Hamas basée à Doha a déclaré à Al-Monitor que Meshaal
« est engagé dans des négociations marathon contre la montre, avec des
rencontres en vis-à-vis avec les partis européens, turcs, qataris et
russes. Les États-Unis sont en communication avec lui indirectement par
l’intermédiaire des médiateurs, craignant qu’Israël et le Hamas
atteignent le point de non-retour, c’est-à-dire le lancement d’une
opération terrestre. Meshaal a reçu une injonction de la direction
politique et militaire de l’organisation basée à l’intérieur et à
l’extérieur de la bande de Gaza de ne pas accepter un arrêt des combats
jusqu’à ce que nous ayons obtenu pour notre peuple une levée totale du
blocus, l’ouverture du poste-frontière de Rafah, la mise en place un
port maritime et la fin de la campagne répressive en Cisjordanie ».
Il a conclu en disant : « La guerre de Gaza a commencé après
qu’Israël soit revenu sur l’accord de cessez-le-feu de 2012. Après tout
ce bain de sang et tous ces sacrifices, nous n’accepterons rien de moins
que la satisfaction de chacune des revendications du Hamas. Le Hamas
est prêt pour une bataille qui peut durer longtemps, et nous
n’accepterons à aucun prix la fin de cette guerre avec un retour de la
bande de Gaza à la politique de la mort lente. Pour cette raison, il
semble qu’il est trop tôt pour parler d’un cessez-le-feu. »
* Adnan Abu Amer est doyen de la Faculté des Arts et responsable de la Section Presse et Information à Al Oumma Open University Education,
ainsi que Professeur spécialisé sur l’Histoire de la question
palestinienne, la sécurité nationale, les sciences politiques et la
civilisation islamique. Il a publié un certain nombre d’ouvrages et
d’articles sur l’histoire contemporaine de la Palestine.
Traduction : Info-palestine.eu - al-Mukhtar