mercredi 19 mars 2014

Violence à Gaza : Questions à la Résistance et à l'ennemi

Par Ibrahim al-Amin
Cet article, publié sur Al-Akhbar/anglais le 15 mars 2014, est la traduction de l'article publié sur le site en arabe.
Dans la dernière série d'affrontements entre Israël et les Palestiniens à Gaza, le Jihad Islamique est allé à contre-courant en exerçant de véritables représailles contre les bombardements israéliens continuels. Au vu de son opération "Briser le silence", on se demande : les roquettes frappant Israël étaient-elles un message direct à l'ennemi, ou bien un message à toutes les parties qui restent silencieuses à Gaza et à l'extérieur ?
Violence à Gaza : Questions à la Résistance et à l'ennemi
Des Palestiniens inspectent les dégâts causés par une attaque aérienne israélienne sur les tunnels de contre-bande à Rafah, au sud de la Bande de Gaza, le 14 mars 2014 (Photo : AFP-Said Khatib)
Le leader du Jihad Islamique, le docteur Ramadan Abdullah Shalah, a dit que la riposte était une réponse aux agressions israéliennes, et qu'il avisait l'Autorité palestinienne à Ramallah de ne pas s'engager dans un accord vide négocié par les Etats-Unis.
Comme prévu, Shalah n'a pas critiqué les autres factions palestiniennes engagées dans la résistance, ce qui nous interroge sur la véritable position du Hamas. En fait, tous les signes sur le terrain suggèrent que le Jihad Islamique a discuté de l'opération avec le Hamas. Il n'a pas cherché sa permission, mais il a agi avec raison et il a respecté le rôle du Hamas, principal partenaire dans la résistance, et son influence à Gaza. En outre, le Jihad Islamique n'allait pas combattre l'ennemi et entrer en conflit avec les autres factions palestiniennes.
Cependant, le Hamas n'était pas neutre, comme c'est souvent le cas avec les partisans de la "dissociation" dans d'autres parties du monde arabe. Il a adopté une position politique, qu'ont réaffirmé les Brigades Ezzidin al-Qassam ; mais le Hamas est parfaitement conscient que ce n'est pas le bon moment de se lancer une guerre illimitée contre Israël. Le Jihad Islamique reconnait également ce fait, mais la différence entre les deux est que le Hamas n'a pas intérêt à s'impliquer dans un seul round d'affrontements, parce que cela entraînerait une intervention internationale, tandis que le Jihad Islamique peut fonctionner par ses propres moyens.
En fait, le programme politique du Hamas a changé depuis 2011 ; la résistance n'est plus sa priorité absolue. Nous ne suggérons pas que le Hamas a renoncé à la résistance ou qu'il est prêt au règlement, mais le mouvement est en train de payer le prix de la confusion qu'il a créée depuis qu'il a soutenu l'opposition syrienne.
Les actions du Hamas sont toujours une question discutable, mais en tous cas tous les gens raisonnables doivent garder à l'esprit que la résistance reste l'unique moyen de restaurer les droits palestiniens.
Aujourd'hui, nous demandons au Hamas : n'est-ce pas le moment de faire un examen complet, transparent et courageux des trois dernières années ? N'est-ce pas le moment de redessiner une feuille de route qui ne serve que la résistance ?
Israël a intensifié ses attaques sur la résistance dans la Bande de Gaza ces dernières semaines tandis qu'il cherche à saper les mesures prises pour la renforcer. En fait, les responsables de Tel Aviv préfèrent s'engager dans des affrontements dispersés le long de la frontière de Gaza plutôt que de s'engager dans une accalmie que la résistance pourrait exploiter pour creuser des tunnels et fabriquer des mines terrestres. Pendant ce temps, Israël ne semble pas vouloir une guerre à grande échelle. Dans tous les cas, les événements qui se déroulent peuvent s'expliquer par l' "attentisme" adopté par l'ennemi depuis quelques temps maintenant.
Israël a exploité la crise syrienne pour briser les règles du jeu ; il a attaqué des cibles syriennes sans anticiper une réponse du côté syrien. Il a également tenté récemment sa chance au Liban, lorsqu'il a frappé une cible Hezbollah à la frontière libano-syrienne. Cependant, l'ennemi étudie maintenant l'attaque de missiles sur les Hauts du Golan, ainsi que l'attentat à la bombe d'hier qui a visé une patrouille israélienne dans les fermes de Chebaa occupées. Israël étudie tous ces événements comme un message de la résistance au Liban annonçant qu'il refuse tout changement des règles du jeu. Un message doit être répété si nécessaire.
Israël croyait que la Hamas est en "crise" et ne pouvait se permettre un affrontement tout de suite, et il pensait qu'aucune autre faction palestinienne, le Jihad Islamique inclus, ne pourrait répondre. De plus, la crise actuelle entre l'Egypte et le Hamas affecte la Bande de Gaza dans son ensemble, avec la destruction de la plupart des tunnels à la frontière égyptienne et Israël croit qu'il peut tirer avantage de la tension Gaza-Egypte. L'ennemi a même eu recours à la piraterie maritime en bloquant un soi-disant cargo transportant des missiles syriens en route pour Gaza, et il envisage maintenant d'exploiter l'incident comme un moyen d'imposer de nouvelles mesures sur le terrain qui vont au-delà de l'accord de conciliation de 2012.
Toutefois, Israël a été choqué par la réponse du Jihad Islamique, qui n'était même pas proportionnelle à la taille de l'agression israélienne. Tandis que 150 missiles ciblaient les colonies périphériques, Israël a été obligé de réfléchir à deux fois sur sa sous-estimation actuelle de la force palestinienne.
Pour Israël, la réaction du Jihad islamique fut beaucoup plus qu'une réponse de colère. La résistance est prête à s'engager dans une confrontation qui va au-delà de conflits mineurs. Et Israël et autres doivent examiner si la réaction du Jihad Islamique est limité à Gaza ou si elle est liée au mouvement de la résistance dans son ensemble.
Le dernier round à Gaza fut un succès majeur pour la résistance ; il inquiète Israël mais pose aussi encore plus de questions sur le Hamas.
Source : Al Akhbar
Traduction : MR pour ISM
http://www.ism-france.org