Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a exprimé mardi ses 
"regrets" après la mort d'un juge jordanien tué par des soldats 
israéliens, sans apaiser Amman qui en a fait porter "l'entière 
responsabilité" à l’État hébreu.
La mort lundi du juge d'origine palestinienne Raed Zeiter, 38 ans, au
 point de passage du pont Allenby entre la Cisjordanie occupée et la 
Jordanie, a soulevé de vives protestations en Jordanie liée à Israël par
 un traité de paix depuis 1994.
L'armée israélienne a affirmé que le juge avait attaqué les soldats 
et tenté de prendre l'arme d'un militaire. En revanche, sa famille et un
 centre palestinien des droits de l'Homme ont soutenu qu'il avait été 
tué de "sang-froid".
"Israël regrette la mort du juge Raed Zeiter et exprime sa sympathie 
au peuple et au gouvernement de Jordanie", a affirmé M. Netanyahu dans 
un communiqué. Il a annoncé qu'Israël avait accepté une requête 
jordanienne de constituer une "équipe conjointe" pour enquêter sur 
l'incident et celle-ci "commencera rapidement son travail".
Selon les médias israéliens, ce communiqué a été publié après des 
consultations-marathons entre l'émissaire de M. Netanyahu, Yitzhak 
Molkho, et des responsables jordaniens. Un haut responsable israélien a 
confirmé à l'AFP des "consultations discrètes à haut niveau". 
Courroux de la JordanieMalgré les "regrets" 
publics israéliens, le Premier ministre jordanien Abdallah Nsour a 
attribué au gouvernement israélien "l'entière" responsabilité de ce 
"crime hideux", devant une réunion du Parlement. "Les excuses du 
gouvernement israélien ne justifient pas cet acte perfide. La Jordanie a
 fait pression sur Israël pour qu'il présente des excuses formelles", 
a-t-il dit.
Le ministre de l'Information, Mohammed Momani, a exigé des "sanctions
 fermes" contre le soldat responsable de la mort du juge, un "civil 
jordanien sans arme".
"Nous ne resterons pas silencieux face à ce crime ignoble", s'est élevé le chef du Parlement, Atef Tarawneh.
Un citoyen jordanien présent dans l'hémicycle a tenté de brûler un 
drapeau israélien mais les policiers l'ont stoppé et l'ont sorti du 
Parlement. L'opposition islamiste jordanienne a, quant à elle, appelé à 
rompre les relations diplomatiques. Lundi, environ 200 personnes ont 
manifesté devant l'ambassade d'Israël en dénonçant le traité de paix.
Versions contradictoiresD'après les premières 
conclusions de l'enquête militaire israélienne, le juge se serait 
"précipité vers les soldats israéliens en criant 'Allah akbar' (Dieu est
 le plus grand) et en brandissant une barre de fer". "Il a tenté de 
prendre l'arme d'un soldat israélien, forçant les autres soldats 
présents à riposter en tirant vers ses jambes", a poursuivi l'armée, 
ajoutant qu'il avait alors "commencé à étrangler un soldat, obligeant 
les soldats à ouvrir le feu une nouvelle fois". A l'appui de ses dires, 
l'armée affirme avoir conduit "une enquête approfondie sous la forme 
d'un interrogatoire exhaustif des témoins par le personnel de sécurité" 
du pont Allenby.
Toutefois, le Centre palestinien des droits de l'Homme a contesté, 
dans un communiqué citant un témoin, cette version en affirmant que le 
juge avait été tué "de sang-froid" alors qu'il ne menaçait nullement la 
vie des soldats. Selon ce témoin, il a été bousculé par des soldats au 
moment de remonter dans une navette pour finir de traverser le pont, ce 
qui a déclenché une bagarre. Tombé à terre, le juge a alors repoussé un 
des soldats qui a tiré sur lui, l'atteignant mortellement à la poitrine.
Issu d'une famille originaire de Naplouse en Cisjordanie, Raed Zeiter
 avait la nationalité jordanienne et exerçait les fonctions de juge dans
 un tribunal d'Amman. Il a été enterré à Naplouse, le corps enveloppé 
dans un drapeau palestinien, en présence de centaines de personnes.
"Ils ont tué mon fils unique de sang-froid. Il n'était pas armé et ne
 savait même pas comment se servir d'une arme", a dit son père, Alaa 
Zeiter, venu d'Amman.
L'Autorité palestinienne a réclamé la création d'une commission d'enquête internationale.
Déjà les relations étaient tendues entre Israël et la Jordanie, M. 
Nsour ayant prévenu fin février que son pays pourrait demander une 
révision du traité de paix, après un débat en Israël sur "l'application 
de la souveraineté" israélienne sur l'esplanade des Mosquées à 
Jérusalem, dont le royaume est le gardien.
 
 
