samedi 4 juin 2011

La reconnaissance diplomatique d’un Etat palestinien ne suffit pas

jeudi 2 juin 2011
Analyse du Comité national palestinien pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BNC).
Avant et après septembre : la lutte pour les droits des Palestiniens doit s’intensifier.
Palestine occupée, 1er juin 2011 – Le Comité national palestinien pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BNC) salue chaleureusement la commémoration de la Nabka (= la Catastrophe) par la participation massive des Palestiniens aux marches du 15 mai. Celles-ci ont réactivé un esprit exceptionnel de résistance, de réel espoir et d’initiatives héroïques dans la lutte pour les droits fondamentaux du peuple palestinien. Ces marches, principalement conduites par de jeunes réfugiés palestiniens, ont donné un nouvel élan à la lutte des Palestiniens pour l’auto-détermination, la justice et le retour des réfugiés qui, durant la Nabka de 1948, ont subi un nettoyage ethnique de la part des milices sionistes, puis d’Israël.
Le Printemps Arabe de liberté, de démocratie et de justice sociale qui fleurit à travers la région a lui-même été inspiré par des décennies de résistance populaire palestinienne contre le colonialisme, l’occupation et l’apartheid israéliens. En retour, ce Printemps Arabe est aujourd’hui en train d’inspirer aux Palestiniens des protestations massives et pacifiques, après avoir démontré que, quand le seuil de la peur est franchi par un assez grand nombre de militants impliqués, et qu’existe la vision claire d’un futur libre d’oppression et d’assujettissement, tout oppresseur apparemment invincible peut être renversé.
Les grandes marches non-violentes de la jeunesse palestinienne en Cisjordanie, à Gaza, Damoun, Jaffa, Maroun-er-Ras (Liban) et Majdal Chams (Syrie), ont replacé le droit au retour des réfugiés au cœur de la question palestinienne. En franchissant les lignes israéliennes réelles et imaginaires, jusqu’ici infranchissables, à l’intérieur des hauteurs du Golan, de jeunes réfugiés palestiniens de Syrie, en particulier, ont pu, tout comme l’avaient fait leurs frères en Tunisie, en Egypte et ailleurs, démontrer au monde que la volonté de restauration des droits est plus puissante que les glaives, y compris le vain arsenal nucléaire d’Israël et ses autres armes de destruction massive.
Auprès des révolutions en expansion des peuples arabes et de leur capacité à renverser quelques unes des dictatures les plus brutales, ces marches commémoratives de la Nabka ont été confortées par la résistance populaire en cours contre le mur de séparation et les colonies, tous illégalement construits sur le territoire palestinien, et par le mouvement BDS, d’initiative palestinienne, en train de devenir rapidement global et qui remporte des succès dépassant les prévisions les plus optimistes.
L’instauration récente de l’anniversaire de la coalition des syndicats palestiniens pour le mouvement Boycott, Désinvestissement, Sanctions (PTUC-BDS), qui est de loin le plus vaste groupement des syndicats d’ouvriers et de professionnels, n’est que le dernier signe en date du fait que, par delà un quasi consensus dans le soutien à BDS, la société palestinienne met progressivement en œuvre dans tous les secteurs des tactiques BDS , constitutives d’une stratégie de résistance effective, populaire et civique.
BDS a aussi connu récemment une croissance à un rythme sans précédent. Tout récemment, Stop the JNF, une campagne BDS coordonnée avec le Réseau international juif anti-sioniste, la campagne de solidarité avec la Palestine en Ecosse et au Royaume Uni, et d’autres partenaires, a joué un rôle-clé pour inciter le premier ministre britannique David Cameron à abandonner son patronage honoraire de l’organisation raciste.
Le retrait de la firme nationalisée allemande Deutsche Bahn du projet israélien illégal d’une ligne A1 reliant Tel Aviv à Jérusalem a par ailleurs créé un précédent dont l’impact ne saurait être sous-estimé.
La perte continue de contrats de milliards de dollars par Véolia, la société française impliquée dans le projet illégal de tramway reliant à Jérusalem les colonies israéliennes qui entourent la ville, constitue également pour des entreprises européennes un vif rappel du fait qu’engager des partenariats qui tirent profit des violations israéliennes du droit international n’est pas seulement contraire à l’éthique et socialement irresponsable, mais peut aussi leur coûter cher en termes financiers.
La rupture par l’université de Johannesburg de ses relations avec l’université israélienne Ben Gourion, pour cause de complicité de celle-ci dans des violations des droits de l’homme, a aussi rompu un tabou et donné au mouvement BDS la plus tangible victoire de boycott académique qu’il ait remportée à ce jour.
Les rangs de plus en plus denses d’artistes et de groupes musicaux boycottant Israël a été très encourageant pour le mouvement.
En bref, BDS est en train de toucher de nouveaux horizons et de causer de sérieuses inquiétudes parmi les responsables israéliens, comme il apparaît dans l’avertissement du ministre israélien Ehud Barak, selon lequel la pression contre Israël menace de frapper « comme un glacier, de tous les côtés ».
Septembre prochain marquera le vingtième anniversaire du lancement du « processus de paix » israélo-palestinien, largement reconnu, selon tout standard objectif, comme un total échec. Ce simulacre de processus a servi de couverture pour la colonisation intensive par Israël des terres palestiniennes, pour le déni permanent des droits fondamentaux des Palestiniens et pour leur nettoyage ethnique progressif, tout en prétendant spécieusement travailler à la paix.
Dans ce contexte, le mouvement BNC accueille avec faveur la reconnaissance, par une grande majorité d’états à travers le monde, que le droit des Palestiniens à avoir un état et à se libérer de l’occupation palestinienne n’a que trop tardé et ne devrait pas être plus longtemps tenu en otage par une « diplomatie » américaine fanatiquement biaisée au profit de la défense de l’expansionnisme israélien. Cependant, reconnaître un état palestinien est en soi clairement insuffisant pour mettre réellement fin à l’occupation israélienne et à la règle coloniale. Elle ne mettra pas davantage un terme au système israélien en cours depuis des décennies de discrimination raciale légalisée, qui correspond à la définition de l’apartheid par les Nations Unies, ni ne permettra aux millions de réfugiés palestiniens de retrouver leurs maisons d’origine, dont ils ont été violemment déracinés et exilés.
Une reconnaissance diplomatique doit avoir pour effet la protection du droit inaliénable à l’auto-détermination du peuple palestinien en son entier, représenté par une OLP démocratisée et englobante, qui ne soit pas seulement représentative des Palestiniens sous occupation mais aussi des réfugiés en exil, qui constituent la majorité du peuple palestinien, ainsi que des citoyens discriminés d’Israël. Pour qu’elle aille au-delà du symbole, il faut que cette reconnaissance soit le prélude à des sanctions effectives et durables contre Israël, afin d’amener celui-ci à satisfaire pleinement à ses obligations selon le droit international.
Comme il est apparu dans la lutte pour mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud ou dans les soulèvements pour la liberté et la justice qui sont en cours dans le monde arabe, les gouvernements du monde ne s’opposent à un régime d’oppression manifestement illégal et immoral pour les seuls motifs éthiques ; les intérêts économiques et les dynamiques de pouvoir hégémonique pèsent bien davantage dans leurs considérations.
En fait, le discours militant et belliqueux du premier ministre israélien Benjamin Netanyahou devant le Congrès américain, couplé à la plus récente et humiliante soumission aux volontés d’Israël du président américain Barack Obama, montrent de toute évidence que se berce d’illusions quiconque s’accrocherait à l’espoir que Washington aurait la capacité ou la volonté de contribuer à l’édification d’une paix juste.
La leçon décisive à retenir de l’Afrique du Sud est que, pour que les gouvernements soient amenés à cesser leur complicité avec les graves et persistantes violations d’Israël contre les droits de l’homme et le droit international, ils doivent y être contraints par la pression massive, venant de la base et bien organisée qu’exercent des mouvements sociaux et d’autres composantes de la société. Le mouvement BDS a prouvé qu’il est la stratégie la plus efficace et prometteuse de solidarité internationale avec le peuple palestinien dans notre lutte pour l’auto-détermination, la liberté, la justice et l’égalité.
A la lumière de ce qui précède, et inspiré par le volontarisme et la puissance populaires qui ont suscité le Printemps Arabe, BNC fait appel aux groupes animés de conscience et de solidarité pour construire un mouvement massif de Boycott, Désinvestissement, Sanctions aux Etats-Unis et ailleurs dans les pays les plus puissants, avant et après septembre. Seul un tel mouvement de masse peut garantir que, quelle que soit la reconnaissance diplomatique d’un état palestinien qui intervienne aux Nations Unies en septembre, on fasse progresser les droits du peuple palestinien, et qu’on fasse payer plus cher à Israël l’occupation, le colonialisme et l’apartheid, en l’isolant et en isolant les complices de ses crimes. Un mouvement de solidarité massive qui peut amener des élus, en particulier aux USA, à rendre des comptes aux citoyens plutôt qu’à un lobby sioniste au service des visées coloniales et bellicistes d’Israël et en conflit direct avec les intérêts des Américains et d’autres nations, là réside la seule espérance d’une paix globale et durable fondée sur la justice.
http://www.bdsmovement.net/2011/before-and-after-september-7154
(Traduit de l’anglais par Anne-Marie PERRIN pour CAPJPO-EuroPalestine)
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