mardi 14 décembre 2010

A propos de l’éditorial du quotidien Le Monde du vendredi 10 décembre 2010

publié le lundi 13 décembre 2010
Dominique Ballereau, CVPR

 
OPINION :

Le journal Le Monde,ignore-t-il qu’il y a un occupant et un occupé, un colonisateur et un colonisé ?
Le quotidien Le Monde nous a habitué depuis longtemps à ses prises de position très « soft » à l’égard de la politique israélienne, en particulier dans les Territoires occupés.
Comme la plupart des medias français, ce journal tente par tous les moyens de présenter le face-à-face entre Israël et les Palestiniens comme un dialogue entre deux parties qui seraient « à égalité » de droits et de devoirs, mues par des motifs de paix et de coopérations. Or, rien n’est plus faux. D’un côté, nous trouvons un Etat constitué, surarmé, agissant dans l’impunité la plus totale selon ses intérêts, soutenu et armé par l’ensemble des nations occidentales. De l’autre, nous observons une administration sans aucun pouvoir, dirigée par un président échu depuis 2009, dont le rôle est réduit à compter les victimes des multiples agressions israéliennes et les innombrables destructions d’infrastructures et de bâtiments, publics ou privés. L’éditorial du Monde du vendredi 10 décembre 2010, intitulé « Proche-Orient : Washington doit changer de cap » nous transmet une vision trompeuse de ce face-à-face diplomatique en remuant les vieux poncifs de la propagande israélienne, en pointant les responsabilités réciproques des adversaires et en proposant les moyens de parvenir à une paix véritable.
Il y a tout d’abord, précise l’éditorial, le rôle d’Obama qui a su prendre à bras le corps le conflit israélo-palestinien « dès son arrivée à la Maison Blanche ». Louable intention, dira-t-on, mais le résultat est là : aucune avancée n’a été enregistrée, bien que le président US ait employé « la méthode douce ». Faudrait-il la méthode « forte » ? Deux années de perdues donc, malgré « quelques poignées de mains » sans lendemain entre les deux protagonistes.
Mais voilà, les Américains « ne veulent pas être davantage humiliés », précise l’éditorial, et c’est pourquoi Obama propose des avions F35 « dernier cri » à Netanyahou… pour accepter l’arrêt des implantations en Cisjordanie ! Ce dernier refuse bien sûr et les Américains sont doublement humiliés ! On rêve devant tant de soumission d’un côté et de cynisme de l’autre. Mais, reconnaît l’auteur de l’éditorial, Le chef du gouvernement de Tel Aviv profite de la victoire des républicains pour « renforcer ses positions ». On s’en serait douté.
Plus loin, il est précisé – quelle hardiesse… - qu’ « Obama doit changer d’approche » et qu’il est urgent de « placer chacun face à ses responsabilités ». Nous y voilà ! s’agit là d’une vaste supercherie qui permet aux sionistes de faire croire que la faute est du côté palestinien, alors que les Israéliens « peinent » à construire la paix.
La suite de l’éditorial suggère que « Washington doit mettre un plan sur la table », pour que les problèmes pendants soient définitivement réglés : frontières, Jérusalem, réfugiés. Mais pour qui prend-t-on les Palestiniens ? Ont-ils le droit de donner leur avis, ou les Américains et les Israéliens sont-ils les seuls à décider ? Mais la suite vaut son pesant de papier : il faudra installer un « dispositif de sécurité pour empêcher que le futur Etat palestinien ne se transforme en base de tirs de missiles contre Israël » ! Imagine-t-on que la future Palestine indépendante, qui a subi des décennies d’occupation, de destructions et d’assassinats, va se mettre à bombarder son voisin, ce qui l’encouragerait à réoccuper la Cisjordanie et ferait revenir l’ensemble de la région à son point de départ ?
La conclusion de l’éditorial se veut moralisatrice, et ne manque pas de sel : « Passé un certain délai [lequel ?] le plan pourrait être soumis au Conseil de sécurité de l’ONU. Cela lui conférerait une légitimité de nature à l’imposer. » Notons que cela fait des années qu’une intervention de l’ONU est réclamée, alors que les Israéliens comme les Américains s’y opposent, ces derniers par le biais de leur veto au Conseil de sécurité.
En prenant une fois de plus fait et cause pour l’occupant israélien, malgré la l’esquisse de proposition d’un plan de paix en trompe-l’œil, le quotidien Le Monde, comme la quasi-totalité des medias français, se range résolument dans le sillage de la diplomatie israélienne. Notre devoir est de dénoncer cette connivence, qui n’a que trop duré.