mercredi 21 juillet 2010

Des efforts mais pas d’avancées

La tournée de Mitchell et les différentes rencontres, notamment avec le président Hosni Moubarak, ont été axées sur la reprise des négociations directes. Une option toujours refusée par les Palestiniens, faute de garanties.
Cette semaine a connu une intensification de l’activité diplomatique au Proche-Orient. Objectif : reprendre les négociations directes entre Palestiniens et Israéliens. Ce sont les Etats-Unis et évidemment leur allié israélien qui sont à l’origine de cette demande, d’où les pressions qui vont crescendo pour que les Palestiniens acceptent cette requête. L’Egypte a été elle aussi sollicitée pour intervenir, ce qui explique la série de rencontres du président Hosni Moubarak avec les dirigeants palestinien Mahmoud Abbass et israélien Benyamin Netanyahu, ainsi que l’émissaire américain George Mitchell. Ce dernier a d’ailleurs consacré sa dernière tournée dans la région à la question des négociations directes, interrompues depuis l’offensive d’Israël contre Gaza fin 2008 début-2009, s’entretenant séparément avec les différents protagonistes.
« Les Etats-Unis cherchent à changer leur image face à la communauté internationale, surtout face au monde arabo-islamique. C’est pour cette raison qu’ils multiplient leurs efforts pour une reprise des négociations directes, même avec le risque qu’un éventuel nouveau round de pourparlers n’aboutisse à rien. Au moins auront-ils essayé », explique le Dr Mohamad Sobeih, conseiller et chargé du dossier de la Palestine auprès de la Ligue arabe.
Aucune des parties concernées n’a pourtant fait de commentaires après les entretiens distincts entre Hosni Moubarak d’une part et le président Abbass et le premier ministre Netanyahu d’autre part. Seules les autorités égyptiennes ont insisté sur la « nécessité de préparer les conditions adéquates pour la création de deux Etats ».
De même, le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, a souligné que des « garanties écrites » étaient préalablement requises. « J’ai eu le sentiment que le président palestinien était (en accord) avec les décisions du conseil ministériel (de la Ligue arabe), selon lesquelles passer automatiquement de négociations de paix indirectes à directes n’était pas faisable », a-t-il notamment déclaré. « Israël devait prendre une décision forte à même de renforcer la confiance des Palestiniens quant aux intentions de l’Etat hébreu », a ajouté le chef de la Ligue arabe.
Malgré cela, Washington ne baisse pas les bras et espère que les négociations de proximité passeront à des discussions directes d’ici au 26 septembre, date de la fin de la suspension provisoire de la construction de colonies juives en Cisjordanie. Or, nombreux sont ceux qui craignent que la construction de colonies ne reprenne après cette date.
« Netanyahu est dans une situation critique. A l’intérieur, il subit une campagne le pressant à décider la reprise de la construction des colonies. De l’autre côté, le président palestinien Mahmoud Abbass ne peut reprendre des négociations directes que si les autorités israéliennes annoncent un gel total de la colonisation », explique le Dr Saïd Okacha, politologue. Ainsi, Washington devrait théoriquement exercer plus de pression sur les autorités israéliennes. Mais d’autre part, le président américain, Barack Obama, est lui aussi dans une situation critique.
« Obama ne peut pas exercer de pression sur les Israéliens surtout avec l’approche des élections locales de novembre 2011. Ce qui fait que la situation est de plus en plus bloquée », estime le Dr Okacha, tout en ajoutant que ce sont les Israéliens qui doivent faire des concessions et non pas les Palestiniens. « Les Palestiniens ont raison d’être frustrés par le manque d’avancée dans les pourparlers indirects, c’est pour cette raison qu’ils sont actuellement peu enclins à répondre favorablement. Il ne s’agit pas uniquement de la question de colonisation. D’autres garanties doivent être données et des réclamations accomplies avant la reprise des négociations directes », estime-t-il.
Sous une intense pression
En effet, lors de sa rencontre samedi dernier à Ramallah (Cisjordanie) avec George Mitchell, Mahmoud Abbass a déjà réclamé plusieurs garanties tout d’abord sur les contentieux de la colonisation juive et de Jérusalem-Est, mais aussi sur les points de sécurité imposés aux Palestiniens de la part d’Israël. « Jusqu’à présent, il n’y a pas de clarification dans la position américaine sur un certain nombre de problèmes, en particulier ceux qui permettraient de passer à des discussions sur un règlement final », a expliqué un dirigeant de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), Yasser Abd-Rabbo.
De son côté, Abbass a affirmé qu’Israël doit accepter que le territoire en question soit établi sur les frontières de 1967 et souligné que l’Etat hébreu devait aussi agréer « la présence sur ce territoire d’une tierce partie ». Il faisait référence à des ententes auxquelles les deux parties seraient parvenues lors du mandat de l’ex-premier ministre israélien, Ehud Olmert, concernant le déploiement d’une force internationale, tel que l’Otan, dans le futur Etat palestinien, sans qu’aucun soldat israélien n’y soit stationné. Israël insiste pour garder le contrôle des frontières de l’Etat palestinien, invoquant des raisons de sécurité. Le représentant de l’OLP a souligné que « le calendrier n’est pas aussi important que les fondations du processus de paix », alors que les Palestiniens sont sous une intense pression de l’administration Obama pour engager rapidement un dialogue direct avec les Israéliens. La question est d’autant plus délicate pour l’Autorité palestinienne qu’elle en « joue de son image », estime en outre le Dr Sobhi Esseila, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, en ajoutant  : « Les dirigeants palestiniens ne peuvent pas entamer de négociations directes sans garanties et sans conditions car si ces négociations directes n’aboutissent pas à des résultats concrets, l’image de marque de l’Autorité palestinienne sera grièvement touchée ». Malgré tout le ballet diplomatique de cette semaine, on se retrouve donc à faire du surplace.
Maha Salem