jeudi 28 janvier 2010

Oslo : "la pression sur Mahmoud Abbas n'est pas la solution"



norvege.jpgJonas Gahr Store est le ministre norvégien des Affaires étrangères. Au début des années 90, son pays joua un rôle pionnier, en permettant aux Israéliens et aux Palestiniens d'entamer des négociations secrètes, qui allaient aboutir aux fameux accords d'Oslo sur la reconnaissance mutuelle entre les deux anciens ennemis. Depuis, la diplomatie norvégienne est restée active au Moyen-Orient. Elle présente la particularité de parler à tous les acteurs du conflit, y compris les islamistes du Hamas. De passage à Paris, au retour d'une tournée au Moyen-Orient, Jonas Gahr Store a répondu à nos questions. 

Les Américains ont mis de nouvelles idées sur la table. Les négociations de paix israélo-palestiniennes vont-elles reprendre ?

Jonas Gahr STORE: Il faut travailler à une reprise de ces pourparlers. Il n’y a pas d’alternative. Il faut accepter les complexités actuelles, et chercher à les débloquer, non par des déclarations, qui feront la une des journaux, mais par une action diplomatique discrète, des contacts en coulisses pour qu’un jour prochain, les deux parties retrouvent la confiance, après s’être couverts, en cas d’échec.
 

Les deux camps y sont-ils prêts ? Les Palestiniens exigent au préalable le gel total de la colonisation israélienne ?
STORE:
Les Palestiniens sont prêts à négocier pour leur Etat. Mais ils posent toujours des conditions préalables. Et nous avons une situation politique compliquée autour du président Mahmoud Abbas, qui a été rendu encore plus compliquée par les conséquences du rapport Golsdone, qu’on ne peut pas effacer d’un trait de plume. Il ne faut pas de pression sur Mahmoud Abbas, mais des gestes qui l’inciteront à reprendre le chemin des négociations. La pression sur Abbas n’est pas la solution, j’en suis convaincu. Ce n’est pas raisonnable.


Que faut-il penser du nouveau plan américain présenté par l’émissaire Mitchell aux deux parties ?
STORE: Il y a des éléments très importants dans ce plan, ainsi que dans celui élaboré par l’Egypte, il y a dix jours. Ce dernier consiste à mettre l’accent sur des gestes, des garanties, et un cadre de négociations qui peut redonner un peu de confiance aux parties pour s’engager.

Peut-il y avoir une reprise des pourparlers, avant que les Palestiniens se réconcilient entre eux?
STORE:
C’est une tragédie d’être occupé. C’est une double tragédie d’être occupé et divisé. Il n’y aura pas d’horizon pour les Palestiniens sans une réconciliation préalable entre Fatah et Hamas. Mais pour l’instant, on observe un jeu de certains pays, au-delà de la région, sur certains groupes. Je veux parler des engagements que l’Iran prend vis-à-vis du Hamas. En dépit de ces interférences, nous devons mettre l’accent sur les efforts de bonne gestion de l’Autorité palestinienne, préparer des élections pour qu’on puisse avancer, et un peu plus tard, soutenir la réconciliation, mais sur des bases palestiniennes, et non pas définies par des pays tiers.

  
La Norvège est l’un des très rares pays en Europe à rencontrer ouvertement les dirigeants du Hamas. Pour quels résultats ?
STORE: Depuis les années 70, notre politique consiste à rencontrer tous les groupes. Nous allons continuer. Il faut connaître les acteurs pour bien apprécier la situation dans son ensemble. Mais pour soutenir un processus politique, il faut aussi être qualifié, et pour l’instant, je ne vois pas le Hamas faire assez d’efforts pour devenir un véritable acteur à des pourparlers avec Israël. Il n’a pas tous les torts. En 2007, après les accords de La Mecque sur la réconciliation entre factions palestiniennes, l’Europe et les Etats-Unis ont manqué une occasion. On ne doit pas dire au Hamas, c’est blanc ou noir. On ne leur dit pas : ou vous acceptez nos conditions, ou nous refusons de parler avec vous. Ce n’est pas ainsi que l’on traite avec les acteurs d’un conflit. Il faut au contraire créer un processus qui encourage les parties à avancer.