mercredi 19 août 2009

Quand Netanyahou fait un bras d’honneur à Sarkozy

publié le mardi 18 août 2009

Pierre Barbancey
Le président français, qui avait demandé, en catimini, une « mesure de clémence » envers Salah Hamouri, essuie un arrogant refus du premier ministre.

Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, a répondu avec mépris à la France : il a rejeté, jeudi, la demande de Nicolas Sarkozy de libérer notre compatriote Salah Hamouri. Un rejet motivé comme suit : « Le premier ministre a décidé de rejeter la demande de libération de ce Palestinien à la suite de la recommandation de la commission de libération du ministère de la Justice, qui a repoussé sa demande car il n’a jamais exprimé de regret. » Le conseiller juridique du gouvernement israélien, qui fait office de procureur général, Menahem Mazouz, a estimé, dans un avis, que Salah Hamouri continuait à « représenter un danger pour la sécurité du pays ».

C’est une véritable claque pour l’Élysée qui, jusqu’à présent, avait traité ce dossier sans trop de considération. Vérité à Tel-Aviv, erreur à Téhéran ? Il a fallu la pression du comité pour la libération de Salah, des articles de presse, pour que les autorités françaises commencent à s’inquiéter. Or, contrairement à d’autres cas, le Quai d’Orsay recommandait la « diplomatie silencieuse ». Comme si, en l’occurrence, il ne fallait pas gêner Tel-Aviv. Nicolas Sarkozy n’a ainsi jamais prononcé publiquement le nom de Salah Hamouri. Il n’a pas non plus reçu sa famille, laissant ce soin, il y a seulement quelques semaines, à l’un de ses conseillers. En revanche, il a reçu et même écrit aux parents de Gilad Shalit, ce soldat israélien possédant également la nationalité française, capturé dans la bande de Gaza.

Sarkozy a rencontré les parents de Florence Cassez, incarcérée au Mexique, et il est intervenu auprès de son homologue mexicain pour la libération de la jeune femme. Ces derniers jours, on a entendu le président français et son ministre des Affaires étrangères exiger la libération de Clotilde Reiss, cette universitaire française arrêtée en Iran, où elle était lectrice. La France a dénoncé une arrestation arbitraire de la part de Téhéran, des accusations « dénuées de tout fondement » et a annoncé être prête à tout mettre en oeuvre pour la libération de Clotilde. Le Figaro de samedi révèle même que « le chef de l’État gère en direct l’affaire Clotilde Reiss » [1].

Le refus de Netanyahou doit amener les autorités françaises à changer d’attitude. La France doit se faire plus pressante, mettre tout en oeuvre pour obtenir la libération de Salah Hamouri parce que les accusations portées contre lui sont « dénuées de tout fondement », sauf à penser qu’un tribunal militaire d’occupation, parce qu’il est israélien, aurait plus de valeur qu’un tribunal iranien. Sauf à penser que le « plaider-coupable » de Salah Hamouri - ce qui lui permettait d’être condamné à une peine bien inférieure à celle qu’il aurait reçue s’il niait - a valeur d’aveux. Salah pas plus que Clotilde ne peuvent être condamnés dans de telles conditions.

Dans la lettre qu’il avait fait parvenir à Netanyahou, mais jamais rendue publique comme si, là encore, on avait peur d’indisposer Israël, Nicolas Sarkozy demande une « mesure de clémence ». Ce qui laisse entendre que le président français, pourtant avocat de formation, prêterait un quelconque crédit à un tribunal militaire illégal. Le général de Gaulle était donc coupable, en son temps, jugé sous occupation de notre pays ? Netanyahou motiverait son refus par une absence de « regrets » de la part de Salah ! Mais Salah est innocent, tout comme Clotilde Reiss. Exprime-t-on des regrets pour un acte qu’on n’a pas commis ?

Ce qui est plus grave, c’est que la discrétion dont font preuve les autorités françaises s’agissant du cas de Salah Hamouri est bien l’expression d’un soutien à la politique israélienne. Paris, comme Bruxelles, serait bien inspiré de prendre enfin des mesures de nature à ramener Tel-Aviv dans le chemin du droit international, celui qui condamne l’occupation des territoires palestiniens, la destruction de maisons palestiniennes ou le blocus imposé à la population de la bande de Gaza. Soutenir la libération de Salah Hamouri, c’est rejeter l’arbitraire colonial qui fait de tout Palestinien un « terroriste » en puissance.

[1] C. Reiss a été libérée le 16 août, sous caution. 200 000 € auraient été versés par l’Etat français, ce que confirme B. Kouchner. Voir sur cette affaire le Temps

Sarkozy paie cher la libération de Clotilde Reiss

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/891...

et le NouvelObs

Affaire Reiss : les intérêts bien compris d’un rapprochement Damas-Paris

http://tempsreel.nouvelobs.com/spec...

publié par l’Humanité le 17 août

http://www.humanite.fr/2009-08-17_I...

Note : CL, Afps