lundi 25 août 2014

Comment Israël a saboté la réconciliation Hamas-Fatah

Les services secrets israéliens tentent de semer la sédition entre Hamas et Fatah en annonçant l’arrestation en mai dernier de 93 militants du Hamas en Cisjordanie, qui auraient projeté de renverser l’Autorité Palestinienne et de lancer des attaques sur Tel Aviv.
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L’assassinat des dirigeants de la résistance palestinienne a été une constante de la politique de l’Etat sioniste. Ici est enterré le bébé âgé de 7 mois de Mohammed Deif (commandant en chef des Brigades al-Qassam), tué en même temps que sa sœur Sara âgée de 3 ans et leur mère, lors d’une attaque terroriste israélienne visant son père, le 19 août
Le sabotage de la réconciliation nationale entre Hamas et Fatah et du gouvernement de consensus dirigé par Rami al-Hamdallah est l’un des principaux objectifs israéliens sous-tendant l’actuelle agression contre la bande de Gaza, qui a provoqué la mort de plus de 2000 personnes, dont un quart d’enfants, et plus de 10 000 blessés, ainsi que la destruction de dizaines de milliers de logements.
Après l’échec de l’agression visant cet objectif – le sabotage de la réconciliation - nous ne sommes donc pas surpris que les services secrets israéliens tentent de semer la sédition entre les deux termes de l’équation politique palestinienne en annonçant l’arrestation - en mai dernier - de 93 militants du Hamas en Cisjordanie, qui auraient projeté de renverser l’Autorité Palestinienne et de lancer des attaques sur Tel Aviv.
Ofir Gendelman, porte-parole du Premier Ministre Netanyahou, a posté sur son compte twitter : « Une cellule de 93 membres du Hamas a été arrêtée, elle avait prévu de renverser l’Autorité [Nationale] Palestinienne, de s’emparer de la Cisjordanie et de lancer des attaques terroristes contre Israël qui auraient déstabilisé la Cisjordanie ».
De son côté, la radio israélienne citait le Service de Sécurité Intérieure israélien, le Shabak [ou Shin Bet] disant « un fusil M-16, des pistolets et des lance-roquettes avaient été saisis avec de grandes quantités de munitions et une somme de 6.000 shekels [1.285€], une voiture et une maison dans le village d’al-Awjah près de Jéricho, lesquels avaient été préparés dans des buts terroristes ».
Le moment choisi pour révéler cette prétendue cellule en insistant bien sur le fait que Khaled Meshaal, chef du Bureau politique du Hamas, était au courant, et que Riyad Nasir, chef de la cellule, avait été recruté par Saleh al-Arouri, un dirigeant du Hamas qui réside en Turquie : tous ces facteurs pris ensemble confirment qu’il existe un plan pour assassiner les deux hommes, Meshaal et Arouri ensemble, sur la base de leur implication dans cette opération.
De hauts responsables de la ligne dure de l’extrême droite israélienne, dont certains parlementaires, ont appelé à assassiner Meshaal en envoyant un commando à Doha où il se trouve, afin de le liquider physiquement en raison de sa direction du Hamas et de son approbation des attaques de missiles lancés vers les colonies israéliennes au nord de la bande de Gaza.
Il n’est pas inhabituel que l’évocation du nom de l’homme dirigeant une prétendue cellule soit une préliminaire à sa liquidation, et nous devons nous rappeler que Netanyahou était Premier Ministre quand la tentative d’assassinat de Meshaal a été conduite par une cellule du Mossad dans la capitale jordanienne, il y a 15 ans.
La maladresse de ce médiocre scénario ne convaincra même pas les plus naïfs ; en effet, comment cette cellule renverserait-elle l’Autorité de Ramallah avec 6 pistolets, un fusil M-16 et 7 lance-roquettes, sans parler des 1.285€ ? Et en toute naïveté, si cette cellule a été arrêtée en mai dernier, pourquoi l’annoncer trois mois plus tard, juste pendant l’agression contre Gaza et la formation d’une délégation unifiée pour négocier au Caire sous médiation égyptienne ?
Israël n’est pas juste un état qui a raté son agression contre une petite bande terre comme l’enclave de Gaza et contre les factions de la résistance qui la défendent, il a également échoué dans ses mensonges médiatiques et politiques ainsi que dans sa guerre psychologique, parce ce plan allégué est de facture et de production médiocres.
Malgré tout nous devons attirer l’attention, vu l’état de défaite et de rupture qu’expérimente le gouvernement Netanyahou, et vu la confusion qui en résulte, sur la nécessité de rester vigilants quant à une opération d’assassinat possible de dirigeants du Hamas visant à compenser sa sévère défaite à Gaza.

* Abdel Bari Atwan est palestinien et rédacteur en chef du site Raialyoum. Abdel Bari Atwan est considéré comme l’un des analystes les plus pertinents de toute la presse arabe.