samedi 5 avril 2014

Kerry évoque un repli américain, Abbas reste sourd aux menaces d’Israël

La diplomatie américaine tentait vendredi d’arracher un compromis pour sauver les pourparlers de paix israélo-palestiniens dont l’infatigable secrétaire d’Etat John Kerry lui-même a ouvertement évoqué la fin.
Le négociateur palestinien Saëb Erakat a rencontré dans l’après-midi le médiateur américain Martin Indyk, a-t-on appris de sources palestiniennes proches des discussions.
M. Kerry a déploré qu'«au cours des derniers jours les deux parties aient pris des initiatives qui n’aident pas» au dialogue, ajoutant qu’il allait se concerter avec le président américain pour «évaluer précisément ce qu’il est possible et n’est pas possible» de faire.
«Il y a des limites au temps et aux efforts que les Etats-Unis peuvent consacrer si les parties ne sont pas désireuses de faire des progrès», a prévenu le chef de la diplomatie américaine à Rabat, d’où il s’est entretenu avec les dirigeants des deux camps vendredi. «Ce n’est pas une démarche sans fin et ça ne l’a jamais été».
Après le refus d’Israël de libérer le 29 mars le dernier contingent de prisonniers prévu dans le cadre de la relance des pourparlers sous l’égide de M. Kerry en juillet, le président palestinien Mahmoud Abbas a réagi demandant mardi l’adhésion de la Palestine à 15 conventions et traités internationaux.
M. Abbas a refusé de revenir sur ces demandes, lors d’une conversation téléphonique avec M. Kerry jeudi soir, a annoncé à l’AFP un responsable palestinien.
Le secrétaire d’Etat a jugé les exigences du président palestinien pour prolonger les négociations de paix au-delà de l’échéance du 29 avril difficiles à accepter pour Israël, a indiqué ce responsable.
Selon des sources proches des discussions, les Palestiniens exigent notamment la libération d’un millier de prisonniers supplémentaires, dont d’importants dirigeants, alors qu’Israël en proposerait environ 400, en fin de peine.
- Riposte palestinienne graduée -
Egalement sourd aux appels au calme américains, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense Moshé Yaalon ont demandé dès mercredi à l’administration militaire dans les Territoires palestiniens de proposer une série de mesures punitives contre les Palestiniens, selon le quotidien Haaretz.
Israël compte accroître les restrictions sur les activités des Palestiniens en Cisjordanie, selon les médias israéliens et pourrait également de nouveau bloquer le transfert de taxes collectées pour le compte de l’Autorité palestinienne.
En outre, dans un geste interprété par ses détracteurs comme une mesure de rétorsion, le ministère israélien de l’Intérieur a donné jeudi son feu vert à la construction d’un musée archéologique controversé dans un quartier palestinien, à Jérusalem-Est occupé et annexé.
«Les deux parties disent qu’elles veulent poursuivre» les négociations, «mais nous n’allons pas rester assis là indéfiniment», a déclaré M. Kerry.
Une porte-parle du Département d’Etat a par la suite tenté d’atténuer ces propos, martelant que les Etats-Unis restent «engagés» dans le processus de paix en cours. «Nous sommes toujours en train de négocier», a souligné Marie Harf, «jusqu’à ce que nous parvenions à la fin de ce processus, chacun doit être attentif à ne pas faire de prédictions sur la suite».
Quelque 1.500 de Palestiniens ont manifesté devant la prison israélienne d’Ofer, près de Ramallah (Cisjordanie), à l’appel des familles des prisonniers dont la libération prévue le 29 mars a été annulée par Israël.
Huit manifestants ont été blessés par des tirs israéliens, dont deux grièvement, selon des sources médicales. Selon une porte-parole militaire israélienne, 200 Palestiniens avaient jeté des pierres sur les soldats.
Le Parlement israélien doit débattre lundi de la crise du processus de paix.
Selon le quotidien Yediot Aharonot, les dirigeants israéliens n’excluent cependant pas de parvenir à un compromis avant l’échéance du 29 avril.
Les correspondants de Défense du Yediot et du quotidien Haaretz soulignaient vendredi que la riposte de Mahmoud Abbas à la non-libération des prisonniers avait été mesurée, les demandes d’adhésion concernant essentiellement des textes ne présentant pas de menace sérieuse pour Israël.
Amnesty International a salué les demandes d’adhésion, appelant la direction palestinienne à aller beaucoup plus loin.
«Amnesty réitère son appel à la Palestine pour devenir un Etat partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI). Cette démarche pourrait ouvrir la voie à la justice pour les victimes de crimes de guerre (...) dans les Territoires palestiniens occupés», selon l’organisation.
AFP
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