Devant le Congrès américain en mai, le premier ministre 
Benjamin Netanyahu a dit qu’Israël maintiendrait longtemps sa présence 
dans la Vallée du Jourdain en Cisjordanie. Le mois suivant l’armée 
israélienne intensifiait ses attaques contre les puits des Palestiniens 
qui y vivent.
        
        

En
 Palestine occupé, la question de l’eau est un problème d’une extrême 
gravité... Les colons juifs utilisent en moyenne plus de 4 fois le 
volume d’eau des Palestiniens. Le vol de cette précieuse ressource est 
donc une constante de la politique sioniste.
 
Le 14 novembre deux puits ont été démolis à Baqa’a, à 
l’est de Tammun, enlevant illégalement à des centaines de familles la 
possibilité d’irriguer leurs terres. Le 13 octobre, des fermiers ont 
reçu des ordres de démolition pour plusieurs puits de Kufr al-Deek, un 
village de la ville de Salfit près de Naplouse. En septembre les troupes
 israéliennes ont démoli 6 puits appartenant à des communautés bédouines
 palestiniennes dans la Vallée du Jourdain et ont menacé d’en démolir 6 
autres. Dans tous les cas les actions unilatérales des forces 
d’occupation israéliennes (FOI) sont clairement illégales parce que ces 
puits ont été construits avec l’autorisation de l’Autorité Palestinienne
 dans des secteurs de la Vallée qui sont supposément sous contrôle civil
 et militaire palestinien exclusif.
L’injustice est particulièrement flagrante dans la 
Vallée du Jourdain. Le 8 septembre, 50 jeeps, camions et bulldozers de 
l’armée ont encerclé Al Nasarayah, l’ont déclaré zone militaire 
sécurisée, ont procédé à la destruction illégale de 3 puits et ont 
confisqué le matériel d’adduction de l’eau attenant, les pompes qui ont 
coûté 40 000 dollars chacune à installer. Cinq jours plus tard, l’armée 
d’occupation est revenue à Al Nasarayah pour démolir 2 autres puits en 
s’arrêtant en chemin pour détruire encore un puits à l’est de Tamoun. Le
 jour suivant, les soldats des FOI sont entrés dans le village de Al- 
Fa’ara, près de Naplouse pour photographier 6 autres puits qu’ils ont 
l’intention de démolir et prendre leurs coordonnées GPS.
Les actions des Forces d’Occupation sont illégales en 
vertu du droit israélien, palestinien et international parce que ces 6 
puits avaient les permis nécessaires de l’Autorité Palestinienne et 
qu’ils se trouvaient dans les 5% de la Vallée du Jourdain qui ont selon 
les Accords d’Oslo de 1994 le label de zone A sur lequel l’Autorité 
Palestinienne a les pleins pouvoirs civils et militaires. La raison pour
 laquelle les Israéliens se livrent à ces actions apparaît au grand jour
 dans le contexte d’autres décisions israéliennes récentes —le projet, 
annoncé en septembre, de déraciner et déporter environ 27 000 bédouins 
hors de la zone C de Cisjordanie (la plupart des Bédouins de zone C 
vivent dans la Vallée du Jourdain) et la décision de la Division des 
Colonies au début du mois de juillet d’octroyer 130% de terre cultivable
 supplémentaire aux colons de la Vallée du Jourdain et d’augmenter de 42
 à 51 mètre cubes la quantité d’eau attribuée aux colons pour irriguer 
ces nouvelles terres.
Qu’ont en commun la destruction des puits des Bédouins 
palestiniens de la Vallée du Jourdain, le transfert des citoyens 
bédouins palestiniens hors de la Vallée du Jourdain et l’augmentation de
 la terre et de l’eau pour les colons de la Vallée du Jourdain ? 
Ensemble ces actions mettent en lumière la politique d’oppression et de 
nettoyage ethnique de la Vallée du Jourdain que les Israéliens mettent 
en oeuvre depuis que la Vallée est devenue une Territoire Occupé en 
1967.
La question de l’eau est cruciale dans cette oppression 
—et cruciale dans la lutte des Bédouins palestiniens pour rester dans 
leur patrie et résister à l’occupation. En effet Israël ayant pris le 
contrôle absolu de l’exploitation et de la distribution de l’eau des 3 
nappes aquifères qui se trouvent sous la Cisjordanie et qui desservent 
les deux côtés de la Ligne Verte, la population palestinienne de 
Cisjordanie et de Gaza, et notamment la population bédouine de la Vallée
 du Jourdain, a vu se tarir progressivement les sources d’eau —qui 
autrefois coulaient à flot— autour desquelles ils avaient construit 
leurs villages et comme ils ne pouvaient pas creuser des puits 
suffisants à cause du blocage des administrations israéliennes, ils se 
sont trouvés dans l’obligation de payer à leur oppresseur des tarifs 
exorbitants pour avoir l’accès à un droit humain inaliénable de première
 nécessité.
La lutte pour l’eau est une question de vie et de mort 
encore plus cruciale pour les Bédouins de la Vallée du Jourdain que dans
 le reste de la Cisjordanie. Le "drainage" des droits palestiniens à 
l’eau dans la Vallée du Jourdain —pour reprendre le titre d’un rapport 
du Centre de Développement Ma’an— a une histoire longue et tumultueuse. 
Quand la Cisjordanie a été occupée en 1967, l’armée israélienne a établi
 un règlement militaire stipulant que toute l’eau de la Cisjordanie 
serait contrôlée par l’état et la société nationale des eaux, Mekorot, 
s’est approprié les nappes phréatiques et les puits en service de 
Cisjordanie pour l’usage d’Israël et de ses nouvelles colonies. Entre 
1967 et les Accords d’Oslo de 1994, les Bédouins palestiniens de la 
Vallée du Jourdain ont d’abord vu leur terres puis leur eau disparaître 
derrières les grilles bien gardées des colonies où les colons 
disposaient de grandes quantités de la seconde pour faire fleurir la 
première.
La situation était de plus en plus désastreuse quand en 
1995 il y a eu un rayon d’espoir avec l’Article 40 des accords d’Oslo II
 qui établissait un accord intérimaire qui devait être revu dans les 
cinq ans (mais qui est toujours en place aujourd’hui), selon lequel un 
quart des ressources en eau de Cisjordanie serait contrôlé par 
l’Autorité Palestinienne et un Comité conjoint des eaux serait 
instauré ; il aurait pour fonction selon les termes du rapport de la 
Banque Mondiale de 2009 intitulé ’Evaluation des restrictions du 
développement de l’eau palestinienne : Cisjordanie et Gaza’, "de 
contrôler la gestion des nappes phréatiques, les décisions étant prises à
 l’unanimité des deux camps".
Cependant Oslo a apporté avec lui de nouveaux systèmes 
d’oppression institutionnalisée. Depuis que Oslo I en 1993 a mis 95% de 
la Vallée du Jourdain en zone C (sous total contrôle militaire 
israélien) ni les communautés bédouines de la zone C, ni l’Autorité 
Palestinienne, ni le fourmillement permanent d’ONG internationales ne 
peut entreprendre de constructions de leur propre initiative et sans 
permis, parce que, comme le dit le mouvement, issu de la base, 
’Solidarité de la Vallée du Jourdain’ : "Dans la zone C, l’accès aux 
services de base, comme celui de l’eau, est restreint grâce au système 
de permis dissuasif de l’Administration Civile Israélienne. Chacun sait 
qu’obtenir un permis pour construire quoi que ce soit —même pour de 
l’eau— est extrêmement difficile voire impossible. Cela empêche les 
Palestiniens de construire de nouvelles infrastructures et d’améliorer 
les installations existantes."
A ces dispositions oppressives qui ont pour but 
d’empêcher toute autonomie communautaire, s’ajoute le fait que les 
Bédouins palestiniens qui vivent dans les 95% de la Vallée du Jourdain 
en zone C sont privés de la possibilité d’améliorer leur accès à l’eau 
par trois systèmes de contrôle bureaucratiques en cascade —le Comité 
Conjoint des Eaux, où un groupe de décideurs israéliens et palestiniens 
autorise ou refuse l’accès à l’eau ou les projets de rénovation déposés 
par l’Autorité Palestiniennes des Eaux (pour les zones A, B et C) ; 
L’Administration Civile Israélienne qui, si un projet est accepté par le
 Comité Conjoint des Eaux, le soumet à une foule de restrictions 
techniques et de contrôles bureaucratiques qui ont pour effet de 
retarder sa mise en oeuvre pour ne pas dire l’empêcher complètement ; et
 là dessus, se greffe l’armée israélienne, qui, au gré de sa fantaisie 
et sans aucun respect des lois, ne cesse de détruire les puits, les 
réservoirs d’eau et l’infrastructure des communautés bédouines des zones
 A, B et C même quand ils ont les permis nécessaires.
Et donc les décisions consensuelles concernant l’eau 
promises par les accords d’Oslo II, se sont transformées dans la réalité
 en contrôle unilatéral institutionnalisé de l’opprimé par l’oppresseur 
car, étant donné la structure du contrôle israélien, il devient 
pratiquement impossible à l’Autorité Palestinienne et aux ONG de mettre 
en oeuvre des projets valables et durables de développement des 
infrastructures de la zone C de Cisjordanie.
Au niveau du Comité Conjoint des Eaux, selon le rapport 
’Drainage’ de Mam’an, "le fait que les décisions doivent être 
consensuelles signifie en fait qu’Israël a un droit de veto sur les 
projets palestiniens... [de plus] Israël ne consulte pas ce Comité quand
 il tire l’eau des nappes aquifères pour son usage personnel (que ce 
soit pour les colonies israéliennes ou autre) en violation de la règle 
de gouvernance de l’Article 40. L’accès aux données sur l’usage 
israélien des ressources d’eau est dénié à l’Autorité Palestinienne 
tandis qu’Israël dispose de toutes les données sur les ressources en eau
 de Cisjordanie... Environ 150 projets concernant l’eau ou des 
installations sanitaires attendent d’être approuvés par le Comité ’pour 
des raisons techniques et sécuritaires’, et un seul projet d’un nouveau 
puits palestinien dans la nappe aquifère occidentale a été accepté 
depuis 1993. A l’opposé Israël peut construire des aqueducs vers ses 
colonies illégales sans passer par le Comité Conjoint pour l’Eau. On 
voit donc qu’Israël contrôle totalement les ressources hydrauliques de 
la Cisjordanie et de la bande de Gaza.
Le rapport de 2009 de la Banque Mondiale confirme la 
réalité non-consensuelle du ’processus de décision consensuelle’ du 
Comité Conjoint des Eaux : "Le comité n’a pas rempli son rôle qui était 
de fournir un cadre approprié à la gestion et au développement conjoints
 des ressources... Les problèmes et les objectifs politiques ont limité 
le nombre des projets approuvés... De profondes dissymétries —de 
pouvoir, de capacité et d’information— ont remis en question le rôle du 
Comité en tant que Comité ’Conjoint’.... Israël prend des décision 
concernant l’eau unilatéralement et sans en référer au Comité... 
Seulement un tiers (en valeur) des projets présentés au Comité Conjoint 
entre 2001 et 2008 ont été réalisés... En conclusion : 1) Le processus 
est généralement très lent ; 2) le taux de rejection des projets de l’AP
 est élevé ; 3) le Comité Conjoint n’a presque jamais rejeté de projets 
israéliens (un seul n’a pas été approuvé) ; et 4) les projets de creuser
 des puits —et jusqu’à tout récemment — de construire des centrales 
d’épuration ont bénéficié d’un très faible taux d’approbations... Pour 
obtenir l’approbation de projets urgents concernant l’eau, l’AP est 
contrainte de faire des compromis contraires à sa politique générale. 
Une telle asymétrie dans l’équilibre des pouvoirs (Un des deux camps, 
Israël a pratiquement tous les pouvoirs et n’a pas d’impératifs 
d’urgence), ajoutée au constat des maigres résultats (en faveur des 
Palestiniens) obtenus par le Comité Conjoint,  a engendré une perte de 
confiance des Palestiniens et une remise en question du bien fondé d’une
 approche ’conjointe’ de facto de la gestion des eaux."
Deeb Abdelghafar, le directeur des Ressources 
Hydrauliques de l’Autorité Palestiniennes des Eaux raconte comment "nous
 avons soumis notre demande il y a deux ans pour creuser des puits dans 
la partie nord de la Vallée du Jourdain [pour fournir] de l’eau aux 
particuliers et aux cultures et nous savons qu’ils l’ont étudiée mais 
nous n’avons toujours pas de réponse et nous ne sommes pas optimistes...
 Il y a plus de 80 puits agricoles qui ont besoin d’être restaurés dans 
la Vallée du Jourdain et le Comité Conjoint a gardé notre projet de 
restauration de ces puits pendant 4 ans avant de le refuser."
Même si le Comité Conjoint des Eaux approuvait un 
projet, sa mise en oeuvre serait handicapée par le fil rouge de 
l’Administration Civile israélienne, continue Abdelghafar : "L’étape la 
plus difficile du processus pour nous est l’Administration Civile parce 
qu’elle comporte plus de 14 départements et chaque département doit 
approuver le projet. Et nous ne pouvons jamais faire accepter un projet 
parce que certains départements l’approuvent et d’autres non". Ayman 
Rabi, directeur-adjoint du Groupe Hydrologique Palestinien  pour le 
Développement des Ressources en Eau et de l’Environnement, une ONG qui 
travaille à l’amélioration des accès en eau et des installations 
sanitaires dans les Territoires Occupés palestiniens est aussi contrarié
 par la situation que Abdelghafar : "Il est très difficile maintenant de
 faire quoi que ce soit dans la zone C et c’est ce qui gêne le plus 
notre travail dans le secteur... nous devons demander des permis et nous
 les demandons généralement à l’AP et eux ils présentent notre demande 
au Comité Conjoint des Eaux... mais même si le Comité Conjoint approuve 
le projet, l’Administration Civile Israélienne réclame d’autres papiers,
 les démarches sont tellement longues et compliquées et ils font 
tellement de difficultés quand le projet est en zone C qu’on finit par 
se décourager de faire quoi que ce soit dans cette zone." Le rapport de 
la Banque Mondiale cite un contributeur anonyme qui se plaint des mêmes 
problèmes : " La première chose que nous demandons est une lettre de 
l’Autorité Palestinienne des Eaux approuvant le projet. Ensuite nous 
allons au Comité Conjoint. Puis il faut aller à l’Administration Civile 
—et un délai de 2 ou 3 ans est normal. En fait aucun de nos projets pour
 la zone C n’a jamais été accepté."
Etant donné que quasiment tous les projets de 
construction d’infrastructure en zone C sont écrasés dans l’oeuf par le 
double rouleau compresseur du Comité Conjoint des Eaux et de 
l’Administration Civile israélienne, les ONG sont obligées de concentrer
 leurs efforts, comme dit Abdelghafar, sur "les interventions civiles 
d’urgence —en fournissant de petits camions citernes et des citernes, en
 construisant des réservoirs pour recueillir l’eau de pluie— c’est de 
l’aide humanitaire d’urgence". Même si on ne peut nier qu’elle soit 
nécessaire, cette aide au coup par coup se fait au détriment de projets 
d’avenir de grande envergure qui s’attaqueraient aux racines des 
problèmes au lieu d’essayer seulement d’atténuer leurs conséquences. 
Selon le rapport de la Banque Mondiale : "Face à la difficulté de mettre
 en oeuvre des projets importants, il a semblé raisonnable de se tourner
 vers des projets d’urgence à court terme, souvent de petits projets 
menés par des ONG et ces petits projets constituent la plus grande 
partie du développement du secteur hydraulique... mais une multiplicité 
des petits donateurs et de projets rend la planification plus 
difficile... Les ONG ont l’avantage d’être présentes sur le terrain et 
de pouvoir répondre à la demande... Elles sont adaptables... mais 
travaillent à court terme et sur une petite échelle" (p.63).
Dans le village de Hamsa, près du check point de Hamra 
dans la Vallée du Jourdain, Abu Riyad, qui habite Hamsa depuis 30 ans 
avec sa famille doit maintenant aller très loin chercher de l’eau 
potable et de l’eau d’irrigation car deux énormes puits construits dans 
des colonies voisines ont asséché les sources auxquelles se sont 
approvisionnées des générations d’habitants de Hamsa. On peut lire dans 
le rapport ’Drainage’ de Ma’an : "Comme il n’a pas l’eau courante, Abu 
Riyad doit aller chercher de l’eau à Ein Shibleh. En plus il n’est pas 
sûr de la qualité de l’eau et il ne sait pas si elle a été traitée. Il 
ne paie pas l’eau mais cela lui coûte 200 shekels pour transporter 10 
mètres cubes d’eau. Comme l’eau sert à tous les besoins de la famille, 
la boisson des hommes et des animaux, la lessive, etc... Abu Riyad doit 
transporter cette quantité d’eau tous les quatre jours. Avec 
l’augmentation du prix de l’essence, l’eau représente une dépense de 
plus en plus lourde pour la famille... la communauté reçoit très peu 
d’aide. Les ONG locales et internationales donnent parfois des bons pour
 avoir de l’eau ou des citernes gratuites mais c’est toujours pour une 
période limitée et cela ne procure qu’un soulagement temporaire.
De fait, Abu Riyad a de la chance de ne pas payer l’eau.
 Ayman Rabi du Groupe Palestinien d’Hydrologie se plaint que, dans 
beaucoup d’opérations humanitaires de son organisation "ceux qui 
reçoivent l’eau doivent participer aux frais, malheureusement. Cela ne 
nous plaît pas mais cela a été convenu avec l’Autorité palestinienne des
 Eaux. Nous avons demandé aux personnes de contribuer à hauteur de 10 
shekels par mètre cube, bien que nous n’aimions cela, et nous leur 
remplissons leur citernes quand ils nous le demandent."
De nombreuses organisations, au lieu de fournir de 
l’eau, donnent des citernes aux communautés en péril pour que les 
Bédouins puissent aller chercher l’eau aux points d’eau. Mais en offrant
 des citernes au lieu d’amener l’eau courante à ces communautés, ces 
ONG, avec les meilleures intentions du monde, aggravent le problème en 
forçant les Bédouins à parcourir de longues distances, à travers une 
myriade de check-points, pour aller chercher de l’eau dans les zones A 
ou B où il y a toujours de l’eau. Le rapport de la Banque Mondiale 
critique le fait que "les check-points de l’occupation et les 
couvre-feux entravent sévèrement la circulation des camions citernes qui
 vont chercher de l’eau pour les communautés... il y a 36 check-points 
fixes en Cisjordanie, y compris le barrage du Mur de Séparation, qui 
affectent sérieusement l’accès aux communautés des camions-citernes et 
des équipes de maintenance... Etant donné les risques pour leur sécurité
 personnelle qu’encourent les chauffeurs et les longues heures de route,
 le prix de l’eau des camions-citernes à énormément augmenté".
On voit, avec le cas de Abu Riyad, à quel point cette 
pratique est devenue coûteuse pour un Bédouin qui n’a pas d’autre choix.
 Selon Fathy Khdirat de Solidarité de la Vallée du Jourdain, "utiliser 
des camions-citernes de cette manière coûte 30 shekels aux Bédouins pour
 un mètre cube d’eau alors que leurs voisins des zones A et B paient le 
mètre cube d’eau entre un demi et 3 shekels". Le maintien de cette 
inégalité fait l’affaire de l’Occupation en incitant les Bédouins à 
passer de la zone C en zone A ou B.
De plus, les aides d’urgence à court terme reviennent 
beaucoup plus cher aux ONG que ne reviendrait l’installation de 
conduites d’eau permanentes qui relieraient les Bédouins aux points 
d’eau. Pour une telle installation, il suffirait d’environ 7000 dollars,
 soit 10 % des 700000 dollars qui ont été récemment dépensés en aides 
d’urgence, selon Fathy Khdirat. Mais entre le Comité Conjoint des eaux, 
l’Administration Civile israélienne et l’armée d’occupation, il est 
impossible de construire des infrastructures hydrauliques permanentes 
pour les Bédouins, et donc les organisations d’aide humanitaire n’ont 
d’autre choix que de travailler dans le cadre restrictif et oppressif de
 la loi israélienne. Selon le rapport de la Banque Mondiale ; "au mieux,
 le rôle de l’AP se réduit à améliorer le service de l’eau et des 
sanitaires des communautés palestiniennes dans le cadre des contraintes 
imposées... les parties prenantes reconnaissent qu’un développement 
aussi contingent et morcelé est inefficace et onéreux mais il ne voient 
pas comment faire autrement".
Le système bureaucratique basé sur la corruption et la 
contrainte dans lequel les organisations civiles et politiques 
israéliennes et palestiniennes se débattent entraîne des atteintes aux 
droits humains sur le terrain en violation du Droit à l’Eau inscrit dans
 le Commentaire général n° 15 des articles 11 et 12 de la Convention de 
Genève sur les droits économiques, sociaux et culturels du Conseil 
économique et social de l’ONU de novembre 2002. Le document stipule que 
"le droit à l’eau comprend à la fois des libertés et des droits. Les 
libertés incluent le droit d’avoir un accès suffisant aux ressources 
d’eau existantes en toute liberté... à l’opposé les droits incluent 
l’accès à un système de distribution d’eau qui permette à tous de jouir 
du droit à l’eau de manière égalitaire". La Convention donne la liste 
des droits spécifiques à l’eau —le droits à ce que "l’eau soit 
physiquement accessible : l’eau et les installations et les services 
adéquats doivent être faciles d’accès pour tous les secteurs de la 
population. De l’eau potable doit être accessible en quantité 
suffisante... à proximité ou dans le voisinage immédiat de chaque 
famille, institution éducative et lieu de travail..." ; le droit à ce 
que l’eau "soit économiquement accessible : l’eau et les installations 
et les services hydrauliques doivent être abordables pour tout le monde.
 Les coûts directs et indirects et les frais associés à la fourniture de
 l’eau doivent être raisonnables..." ; et le droit à "la 
non-discrimination : l’eau et les installations et les services 
hydrauliques doivent être accessibles à tous, y compris aux secteurs les
 plus pauvres et les plus marginalisés de la population, selon la loi et
 dans les faits, sans discrimination".
Le rapport de Ma’an, ’Drainage’, explique que le Droit à
 l’Eau tel qu’il est décrit dans ce document ne signifie pas que les 
gens aient le droit d’avoir un accès illimité à de l’eau gratuite ou à 
l’eau courante, mais il signifie que l’eau et les services liés à l’eau 
doivent être bons marchés, que l’eau et les installations d’eau doivent 
se trouver à proximité des habitations et que l’eau doit être utilisée à
 bon escient. Ce droit n’est pas lié à la race, à l’âge, au sexe, à la 
religion ni aux opinions politiques... le document stipule aussi que les
 individus et les communautés peuvent participer aux décisions 
concernant l’eau et les installations et services sanitaires au niveau 
locale et national et avoir une influence sur elles".
Voici rapidement quelques faits tirés de ’drainage’ qu’il faut examiner à la lumière du Droit à l’Eau de l’ONU :
En octobre 2009, Amnesty International a noté que "180 
000 à 200 000 Palestiniens vivant dans des communautés rurales n’ont pas
 l’eau courante et même dans les villes et les villages 
qui sont reliés au réseau de distribution d’eau, il n’ a pas souvent 
d’eau au robinet."
Selon les travaux de WASH, le mètre cube d’eau acheminé 
par des camions-citernes privés dans 290 communautés de Cisjordanie a 
augmenté de 100 à 200% depuis le début de l’intifada.
40% des Palestiniens de la Vallée du Jourdain consomment
 moins d’eau que la quantité minimale établie par l’Organisation 
Mondiale de la Santé qui est de 100 litres cubes d’eau par jour.
56 000 Palestiniens de la Vallée du Jourdain consomment 
environ 37 millions de mètres cubes d’eau par an tandis que 9 400 colons
 seulement en consomment environ 41.
Les Palestiniens paient l’eau plus cher que leurs 
homologues en Israël : Mekorot facture le mètre cube d’eau 1,8 shekel 
aux Israéliens tandis que les Palestiniens le paient environ 2,5 
shekels.
Il y a un consensus quasi universel sur le fait qu’il 
existe dans la Vallée du Jourdain une politique systématique 
d’oppression et de nettoyage ethnique qui ne concerne pas seulement 
l’eau mais tous les aspects de la vie des 15 000 Bédouins qui ne sont 
reliés à aucun système de distribution d ’eau dans les 95% de la Vallée 
du Jourdain qui sont en zone C.  Selon Deeb Abdelghafar de l’Autorité 
Palestinienne des Eaux "la Vallée du Jourdain est une territoire unique 
du point de vue israélien. Ils essaient de prendre le contrôle de ce 
territoire et pour cela ils veulent en chasser les habitants en les 
privant d’infrastructures hydrauliques adéquates... Ils font tout ce 
qu’ils pour décourager les habitants de rester ici, ils veulent les 
faire tous  partir."
Des militants comme Fathy Khdirat de Solidarité de la 
Vallée du Jourdain, un mouvement populaire qui travaille à la 
construction d’infrastructures pour les Bédouins de la Vallée, sont 
déterminés à encourager ceux qui vivent sous l’occupations à résister à 
l’oppression et à demeurer dans leur pays natal. "J’ai passé toute ma 
vie sous l’Occupation" souligne Fathy " et je veux que mes enfants aient
 un meilleur avenir. Je suis né ici et je ne me tairai pas."